La partie de go
Nouveau rebondissement dans le feuilleton des relations américanonord-coréennes : Donald Trump rencontrera au mois de mai Kim Jongun. C’est pour qui la bonne nouvelle? Pour la population des pays concernés au premier chef par la menace d’un conflit ( millions aux USA, millions au nord de la péninsule coréenne), mais aussi pour la totalité des , milliards d’êtres humains dont aucun n’a envie de rôtir dans le feu nucléaire. L’annonce, hier, par les émissaires de Kim, de ce sommet inédit dans l’histoire des deux nations, n’est pas une surprise. La présence de la petite soeur du dictateur, lors de la cérémonie d’ouverture des JO d’hiver en Corée du Sud, était un premier signe médiatique de détente internationale. Donald Trump a souvent évoqué l’éventualité d’une rencontre les yeux dans les yeux, avant même d’accéder à la Maison-Blanche en . Certes, l’escalade verbale au cours des derniers mois n’était guère rassurante. Florilège: « Ils se heurteront au feu, à la colère et à la puissance, une puissance que le monde n’a jamais connue », côté Trump, mais aussi « mon bouton nucléaire est beaucoup plus gros et plus puissant que le sien » en réponse à « Le bouton nucléaire est toujours sur mon bureau ». Des mots et des vraies menaces : celle du bombardement de l’île nucléaire de Guam. Boum. Au risque de récolter des frappes militaires US, sous le nom de code «Nez ensanglanté». Badaboum. Sans oublier les essais de tirs balistiques à répétition depuis le site de Sain-ni, au sud de Pyongyang, auxquels la dictature a dit hier renoncer en attendant les résultats de sommet. La pire des erreurs serait de ramener ce duel à une bataille d’ego, mèche courte contre mèche lente, Crazy Donald versus Rocket Man. C’est à une partie de go, ce jeu si complexe, que l’on assiste. Trump est assisté d’un conseiller national à la sécurité, le général McMaster, influencé par les théories d’un théoricien prussien, Clausewitz qui édicte comme principe de « surprendre l’ennemi ». De son côté, si Kim est aussi peu zen, c’est qu’il a plus biberonné au juche, un concept nationaliste « maison », qu’au confucianisme et au taoïsme, les deux philosophies dont tout dirigeant asiatique est censé s’inspirer. Dans les deux camps, pas de match nul possible, mais un accord gagnant-gagnant envisageable, où chacun apparaîtrait comme le vainqueur aux yeux de son propre monde. Celui qui a le plus à perdre reste Kim : pour subsister, son régime a besoin de desserrer l’étau des sanctions économiques imposées par la communauté internationale.
«Dans les deux camps, pas de match nul possible, mais un accord gagnant-gagnant envisageable.»