Nice-Matin (Cannes)

Menton : l’auteur d’un coup de poing mortel reste libre

Richard avait frappé Angelo en 2014 à Menton. La victime était mal tombée. Elle était décédée trois semaines plus tard. L’accusé a été condamné hier à cinq ans de prison avec sursis

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Une fois n’est pas coutume, le sort du Mentonnais Richard L., 43 ans, accusé d’avoir porté un coup-de-poing fatal à Angelo Martino, 54 ans, le soir du 3 août 2014 à Menton, s’est joué dans la salle des pas perdus. L’accusé était jugé depuis lundi pour des «violences volontaire­s ayant entraîné la mort sans intention de la donner». Au terme des premières heures de son procès, Richard, un homme cabossé par la vie, a échangé avec Christine et Nathalie, les deux bellesfill­es de la victime, parties civiles. En larmes, tous se sont enlacés, unis, finalement, par ce drame absurde. De la même manière, hier, lors du verdict (cinq ans de prison avec sursis), l’accusé et les parties civiles se sont réconforté­s mutuelleme­nt. La justice venait d’être rendue. Chacun semblait satisfait de la décision de la cour d’assises des Alpes-Maritimes présidée par Benoît Delaunay. Richard L. qui n’aura jamais été détenu dans ce dossier, reste sous la surveillan­ce de la justice pendant trois ans. Il doit continuer de soigner son addiction à l’alcool et travailler.

Un rapprochem­ent inattendu

Ivre, Richard L. était venu demander des comptes à Angelo Martino, le soir du drame, avenue du Généralde-Gaulle. Anna, leur amie commune, accusait Angelo d’avoir eu des rapports non protégés alors qu’il était atteint d’une maladie sexuelleme­nt transmissi­ble. Richard L, en colère, sans doute encore amoureux de son ex-petite amie, avait, d’un coup de poing, mis k.-o. la victime qui décédera trois semaines plus tard. A l’heure des plaidoirie­s, Me Audrey Vazzana, conseil des proches d’Angelo Martino l’admet devant les jurés: « On a assisté à un rapprochem­ent impensable. Je vous dois d’être transparen­te. Ces deux jeunes femmes étaient dans la colère et la haine d’avoir perdu un être cher. Elles sont aujourd’hui apaisées ». Le comporteme­nt de Richard Labroche n’est pas étranger à cette bouleversa­nte et inattendue réconcilia­tion. Richard est apparu comme un homme fragile, influençab­le. Peintre en carrosseri­e, actuelleme­nt au chômage, il n’a jamais cherché à fuir ses responsabi­lités, à minimiser son geste. Il est venu chercher condamnati­on. Sa valise est prête. Il sait qu’il risque d’aller en prison pour la première fois de sa vie après un coup de colère mal maîtrisé. L’avocat général Caroline Chassain prend en compte la sincérité d’un accusé rongé par le remords d’avoir tué un homme. L’accusation, au nom de la société, requiert néanmoins cinq ans d’emprisonne­ment dont un an assorti du sursis et trois ans de mise à l’épreuve.

Chute fatale

L’avocat général rappelle que «la prise d’alcool qui aurait amoindri la conscience de l’accusé, est considérée par la loi comme une circonstan­ce aggravante». Le magistrat de l’accusation admet néanmoins que «ce n’est pas le coup de poing qui a provoqué la mort mais la chute». Angelo Martino est mal tombé : sa tête a heurté un coin de table.Fragilisé par sa maladie, il sombrera dans le coma le 18 août 2014 avant de mourir d’une hémorragie le 28 août. Un argument développé à son tour par la défense représenté­e par Me Brigitte Mindegua: « Vous avez une faute à juger. Un seul coup de poing», rappelle-t-elle aux jurés. Et la défense de stigmatise­r au passage le rôle trouble d’Anna, cette femme qui fréquentai­t à la fois Richard et Angelo. Pour une raison qui échappe à la défense, «elle a mis le feu aux poudres». Ce témoin clef, introuvabl­e, savait qu’Angelo Martino était malade. Pourquoi s’est-elle plainte auprès de Richard L. d’avoir peut-être été contaminée avant même d’avoir subi un test de dépistage ? Me Mindegua démontre à la Cour et aux jurés l’inutilité d’envoyer derrière les barreaux son client. Après une heure trente de délibéré, défense et parties civiles accueillai­ent le verdict avec soulagemen­t.

 ?? (DR) ?? Angelo Martino, homme unanimemen­t apprécié, était décédé trois semaines après avoir reçu le coup-de-poing.
(DR) Angelo Martino, homme unanimemen­t apprécié, était décédé trois semaines après avoir reçu le coup-de-poing.

Newspapers in French

Newspapers from France