Réforme de la SNCF : ce que dit notre sondage
Il n’est pas sûr, c’est un euphémisme, que l’appel à la grève de l’intersyndicale des cheminots contre la refonte de la SNCF suscite un vif écho dans la population. Sans surprise, c’est ce qu’il ressort d’une enquête de l’institut Elabe
(1) effectuée mardi et mercredi. Ce sondage met en lumière l’envie de réforme des Français, sans toutefois dénigrer les cheminots autant qu’on aurait pu le croire… « Il y a là un faux paradoxe,
analyse Bernard Sananès, président d’Elabe, dont le
gouvernement va devoir tenir compte : à savoir qu’on peut être favorable à la réforme, sans forcément stigmatiser les cheminots. » 65 % des sondés estiment ainsi que le projet porté par le gouvernement est utile pour l’avenir de la SNCF. En bonne logique, les électeurs de François Fillon et Emmanuel Macron y sont respectivement favorables à 89 % et 80 %. Ceux de Marine Le Pen à 57 %. Seuls ceux de Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon le jugent négatif, mais à 53 % et 51 % seulement, un vrai motif d’étonnement en soi. Pour Bernard Sananès, «cela montre que chacun a aujourd’hui bien conscience que le statu quo n’est plus possible, quelles que soient les réticences sur la réforme proposée elle-même».
% des sondés hostiles à la grève
43 % des personnes interrogées se disent par ailleurs hostiles aux appels à la grève, contre 34 % qui les approuvent et 23 % qui s’y déclarent indifférents. Seuls 10 % des sondés s’affirment prêts à «apporter leur soutien » aux mouvements sociaux. Là encore, les électeurs de LREM et LR se rejoignent dans le rejet de la grève, à 63 % et 73 %, ceux du FN sont très partagés (39 % favorables, 37 % défavorables), tandis que ceux des Insoumis et du PS approuvent, à 60 % et 51 %, les appels à débrayer. «L’opinion n’est pas encore totalement cristallisée, note Bernard Sananès, mais l’hostilité à la grève est quand même forte. Habituellement, les mouvements sociaux génèrent plutôt une sympathie spontanée, alors que cette fois on perçoit une réelle réticence au soutien. »
Un regard positif sur les cheminots
Puisque le Français n’est jamais à un paradoxe près, les
cheminots pourront tirer réconfort du troisième volet du sondage, qui s’intéresse au regard porté sur eux. 61 % des sondés affirment en avoir une « bonne opinion », dont 6 % une « très bonne opinion ».
Dans le détail partisan, les jugements positifs culminent à 83 % et 70 % parmi les électeurs de Mélenchon et Hamon, passent à 63 % chez ceux de Macron comme Marine Le Pen, et tombent à 51 % chez ceux de Fillon. 70 % des retraités, enfin, ont une bonne image de la SNCF, contre 54 % des classes moyennes actives. «Le gouvernement est proche de gagner la bataille de l’opinion, mais il ne la gagnera que s’il répond au souci d’équité des Français et ne stigmatise pas des cheminots qui sont, sinon adorés, du moins respectés », conclut le patron d’Elabe.
THIERRY PRUDHON