SIGNÉ ROSELYNE
Le regard de Roselyne Bachelot sur l’actualité
La semaine de Roselyne Bachelot
Lundi
Quand ça veut pas, ça veut pas... Le Front national tenait son congrès de la refondation à Lille le week-end dernier. Tout avait été mis en scène pour faire oublier les avanies qui s’étaient succédé depuis quelques mois. Procès en incompétence dressé contre Marine Le Pen depuis l’humiliation du débat raté de la présidentielle, impossibilité de constituer un groupe à l’Assemblée nationale, départ de son conseiller Florian Philippot, accusations d’emplois fictifs au Parlement européen, multiplication des défections de conseillers municipaux FN... Comme si cela ne suffisait pas et pour ajouter au calvaire de la présidente frontiste, dans les jours qui précédaient le congrès, sa nièce Marion Maréchal-Le Pen faisait un triomphe au raout des conservateurs américains et son père Jean-Marie sortait le premier tome de ses mémoires qui s’installait en quelques heures comme un best-seller. La promotion du livre était accompagnée de commentaires acrimonieux du vieux chef à l’égard de sa fille la montrant définitivement comme « pas au niveau ». Tout avait été donc préparé pour faire oublier cette séquence désastreuse. Chirac assurait que les emm... volent toujours en escadrille et la formule se vérifia une fois de plus. Le nouveau nom Rassemblement national se révéla celui du parti d’un collaborateur notoire durant l’occupation nazie, Marcel Déat, un responsable du Front national de la jeunesse fut filmé proférant d’ignobles injures contre un agent de sécurité noir, le sulfureux conservateur américain Steve Bannon tint un discours ahurissant en enjoignant aux militants FN d’être fiers s’ils étaient traités de racistes ! Il fallait voir la tête horriblement gênée des caciques qui entouraient leur présidente alors qu’une traduction improbable ridiculisait les organisateurs. Cerise sur le gâteau, interrogé par des journalistes français sur ce qu’il pensait de Marine Le Pen, Steve Bannon se lança dans un panégyrique de... Marion ! La grimace douloureuse de Marine, debout à ses côtés, faisait peine à voir. Quelques jours auparavant, son père, avait cruellement assuré que sa fille lui faisait pitié. On ne peut imaginer pire oraison funèbre.
Mardi
Les spécialistes de la communication politique et les responsables du parti Les Républicains s’interrogeaient sur l’impact dans l’opinion publique de la révélation des propos très agressifs de Laurent Wauquiez, tenus lors d’un cours dans une école de commerce de Lyon. Certains craignaient un désastre, d’autres assuraient au contraire que les Français allaient adorer les formules «cash» du président de LR. Plus balancés, des commentateurs – dont j’étais – avançaient que la dégradation de son image était inévitable mais que la violence des accusations plairait au noyau dur des militants LR. Je m’étais trompée et les sondages parus ce jour sont une claque terrible pour Laurent Wauquiez. Il chute lourdement
dans l’ensemble des catégories de population, mais c’est dans sa cible primaire – les militants et les sympathisants LR – que la dégringolade est la plus spectaculaire : moins points ! Depuis, d’excuses en faux-fuyants, il fait profil bas mais il lui faudra beaucoup d’efforts pour rattraper les dégâts de son incontinence langagière.
Jeudi
Petit quiz politique : mais qui est donc Delphine Gény-Stephann ? Allez, je vous aide : ce pur produit de la technocratie-polytechnicienne et ingénieure des Ponts est secrétaire d’État auprès de Bruno Le Maire et à ce titre chargée du commerce et de l’artisanat. Nous apprenons que demain elle se rendra dans le cadre de l’opération Artisan d’un jour chez un boucher de la Nièvre où elle apprendra à faire... des paupiettes ! Les facétieux entonneront la célèbre rengaine des Charlots : « Tu es la reine des paupiettes », monument incontournable de la chanson française. Plus sérieusement, la personnalité de madame Gény-Stephann – dont la dignité et la compétence ne sont pas en cause – interroge sur un casting gouvernemental qui fait l’impasse sur les préoccupations quotidiennes des français, à l’exception notable du ministre de l’Éducation. Les causes en sont diverses. Sophie Cluzel, la secrétaire d’État aux personnes handicapées est une personne fort estimable, mais dénuée de tout poids politique et rend ce dossier primordial inaudible. Les Plic et Ploc de la France périphérique, Stéphane Travert à l’Agriculture et Jacques Mézard à la Cohésion des territoires, ont un charisme qui se rapproche de celui du parpaing. Et ne parlons
pas du secrétaire d’État placé auprès de Jacques Mézard, Julien Denormandie, dont le titre de gloire est d’avoir déclaré qu’en Îlede-France seulement une cinquantaine de personnes dormaient dans la rue. La politique familiale est un secteur abandonné puisque ce n’est pas l’omniprésente secrétaire d’État Marlène Schiappa qui l’a en charge, mais bien Agnès Buzyn que la lourde charge du dossier Santé empêche de s’impliquer comme il le faudrait sur les questions cruciales des modes de garde, des familles monoparentales ou de la conciliation vie professionnelle et familiale. Les seniors sont d’ailleurs logés à la même enseigne. Si Emmanuel Macron veut compenser un déficit d’image notoire sur les questions de proximité, il faudra qu’à l’occasion d’un prochain remaniement, il procède à la fois à une réorganisation de son équipe mais aussi à des nominations plus en phase avec la réalité sociologique du pays et plus à même de porter médiatiquement la politique du gouvernement.
Vendredi
C’est vraiment la poisse ! Il pleuvait hier quand François Hollande est allé voter pour élire le futur premier secrétaire du PS et aujourd’hui, son fidèle lieutenant, Stéphane Le Foll, fidèle entre les fidèles, jette l’éponge puisqu’il est lourdement distancé par Olivier Faure. C’est la seconde mort politique de François Hollande et c’est un peu triste. Ce qui est drôle par contre est que le candidat qui écrase le scrutin est celui, qui, de l’avis général, était de loin le plus mauvais dans le débat organisé par la chaîne d’information LCI. Les militants socialistes ont donc fait preuve d’un masochisme et d’un mépris pour les contingences médiatiques qui les honorent.
Samedi
La semaine est contrastée pour Emmanuel Macron et Édouard Philippe. Au chapitre des «bonnes» nouvelles pour le pouvoir, classons le relatif échec du mouvement lancé par certaines associations de retraités ainsi que l’essoufflement de la mobilisation dans les Ehpad. Pour autant, les questions restent pendantes et demanderont des choix douloureux. Par ailleurs, personne n’attendait sérieusement que les syndicats abordent les négociations sur la SNCF dans un esprit constructif, tant la réussite de la démarche protestataire est pour eux une question de vie ou de mort. La sortie du calendrier des jours de grève est de nature à leur mettre durablement les usagers à dos, ce qui ouvre une opportunité à saisir si les ministres en charge font preuve d’habileté. Par contre, la gestion du dossier de la révolte mahoraise à Mayotte est infiniment plus compliquée et les propositions de la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, ne sont pas de nature à apporter la moindre solution à moyen et long terme. L’idée de frapper d’extraterritorialité la première maternité de France, celle de Mamoudzou, posera des problèmes juridiques impossibles et ne fera que multiplier les déjà nombreuses maternités clandestines destinées à assurer la nationalité française aux enfants d’immigrés illégaux. La solution d’urgence est de mener une politique de traque sans merci contre les entrées comoriennes en déployant massivement des forces de sécurité et à moyen terme de renoncer au droit du sol dans ce département français, ce qui exigera une réforme constitutionnelle. Le gouvernement pourrait alors profiter de la mise en place du concept de « différenciation » lancé à propos de la Corse pour bâtir un statut ad hoc pour Mayotte.
« Laurent Wauquiez fait profil bas mais il lui faudra beaucoup d’efforts pour rattraper les dégâts de son incontinence langagière. »