Un directeur d’Ehpad : «C’est une vraie révolte des personnels»
«Des technocrates assis derrière un bureau » et qui décident à la place de ceux qui, du matin au soir, sans moyens, vivent, accompagnent la vieillesse, la fin de vie au quotidien… Voilà ce que fustigent les soignants, les salariés des Ehpad, engagés dans un mouvement de révolte inédit, historique. Gérard Brami est président de l’APMESS 06, l’Association des petits et moyens établissements sanitaires et sociaux des Alpes-Maritimes, et animateur départemental de l’AD-PA, Association des directeurs au service des personnes âgées (ex-Association des directeurs d’établissements d’hébergement pour les personnes âgées). Gérard Brami a été auditionné à Paris, dans le cadre de la mission parlementaire « flash » sur les Ehpad.
D’où vient la colère des salariés ?
De la loi du décembre . C’est une mauvaise loi, mal préparée. Elle fait la part belle au « domicile ». C’est bien, car nous aussi, nous estimons que c’est la vraie réponse pour les personnes très âgées. Mais ce qui a mis le feu aux poudres, c’est la notion de convergence… On nous dit : « Pas d’effectifs supplémentaires », mais « convergence », on déteste ce mot ! En gros, c’est prendre aux Ehpad pauvres pour donner aux Ehpad miséreux. Cela augmente la situation de précarité des Ehpad.
Les personnels sont épuisés car pas assez nombreux…
Le ratio global au niveau national est de , personnel pour un résident. Depuis l’après-guerre, un seul homme politique a évoqué la notion de ratio dans le cadre du Plan Solidarité grand âge, c’est le ministre Philippe Bas, en juin . Il voulait arriver à personnel pour résident avant … On est en et on est loin du compte.
Le taux d’arrêts maladie est aussi important…
Le taux d’absentéisme est en moyenne de %, et nous ne disposons quasiment pas de crédit de remplacement de personnel. Il y a plus d’accidents de travail dans les Ehpad que dans le BTP ! C’est dire l’épuisement des personnels, mais aussi des directrices et directeurs. La révolte est unanime.
Que dites-vous de la valeur du point GIR ?
() Toutes les fédérations ont écrit au conseil départemental des AlpesMaritimes. La valeur du point GIR est la plus faible de France. C’est ça le scandale : la variation ! Elle est parfois de plus de % d’un conseil départemental à un autre. Pour places de maison de retraite, ça correspond à à employés de plus ou de moins. Cette variation de valeur du point GIR a mis la panique dans toute la France. Comment se fait-il qu’il y ait autant de différences d’un département à un autre ?
Le moins bien loti qu’ailleurs ?
Au niveau national, la dotation a évolué de , % à % par an sur les dernières années. Dans les A.-M., elle a augmenté de , % à %... mais sur la totalité des ans ! Pendant trois ans, elle est même restée bloquée. C’est pour cela aussi que la révolte est plus forte chez nous qu’ailleurs en France.
Quel regard portez-vous sur la situation des Ehpad ?
Nous disons deux choses : si on continue comme cela, on va favoriser la maltraitance mais aussi l’épuisement professionnel. Le secteur du handicap a deux fois plus de moyens que nous, on ne critique pas, au contraire, mais on aimerait avoir autant !