Sarkozy: «Je pourfendrai cette bande d’assassins!»
L’ancien chef de l’État a violemment contre-attaqué après sa mise en examen, hier soir sur TF1. Il souligne l’absence de preuve matérielle et dénonce une machination des proches de Kadhafi
Oeil noir, mâchoire tendue, index vengeur. Blessé mais combatif à l’envi. C’est un Nicolas Sarkozy tel qu’attendu, déterminé à en découdre, qui s’est présenté hier soir sur le plateau du 20 heures de TF1. Sa défense s’est articulée autour de deux axes: l’absence de preuve matérielle et une ignominie faite à lui-même comme à la France, par «une bande d’assassins et de criminels» en quête de vengeance.
◗ « Jamais trahi la confiance…»
Sans s’appesantir, l’ancien chef de l’Etat a regretté ce qu’il considère comme un acharnement, affichant d’abord «la profondeur de (son) indignation». «Je dois aux Français la vérité, je n’ai jamais trahi leur confiance. Je dois pourtant avoir dépassé les 150 h de garde à vue dans tous les dossiers montés contre moi. Je ne suis pas au-dessus des lois, mais pas en dessous. On m’a informé par téléphone à 8 h du matin que j’étais en garde à vue... »
«Que la boue»
Sarkozy à l’attaque, d’emblée : «Aucun élément nouveau par rapport aux calomnies qui courent dans certaines rédactions n’a été produit, alors qu’aucune campagne présidentielle n’a pourtant été mise au laser autant que la mienne. Mais moi, j’ai des documents à produire, je veux que les Français sachent ce qui est en train de se jouer. Les supposés indices ne sont pas concordants car aucun membre de la bande de Kadhafi ne mentionne les mêmes chiffres. Les policiers qui m’ont interrogé sur le liquide qui aurait circulé durant ma campagne présidentielle de 2007 ont évoqué une somme de 38000 euros, soit 0,0018 % de la campagne qui a coûté 21 millions. On est bien loin des allégations de M. Kadhafi et de Mediapart.» Il poursuit : « II existe donc, disent les officiers de police judiciaire, une forte probabilité pour que le document produit par Mediapart soit un faux. Deux prétendus signataires libyens ont même dit que ce n’était pas leur signature.» Et tempête : «Il n’y a pas un document, pas une photo, pas une preuve. Il n’y a dans ce dossier que la boue, la malveillance, la calomnie.»
« Monstruosité »
L’accusation selon laquelle il aurait pu faire preuve de complaisance à l’endroit du régime de Kadhafi ? «Une monstruosité» pour l’ancien Président, qui insiste: «J’ai été le seul chef de l’État qui a reçu les opposants à Kadhafi, qui s’est battu à l’ONU pour obtenir un mandat afin qu’il ne puisse plus imposer la terreur à son peuple.» Il déroule dans la foulée sa défense, basée sur un règlement de comptes venu de «la bande à Kadhafi»... «Une bande d’assassins, le père, le fils, le neveu, le cousin, le beau-frère, le porte-parole, qui m’agonissent d’injures depuis le 11 mars 2011, après que j’ai reçu ses opposants le 10 mars 2011. M. Senoussi, qui m’accuse, est un terroriste condamné à perpétuité pour avoir été l’ordonnateur de l’attentat sur le vol UTA qui a fait 170 morts en 1989.» Il s’exonère de tout arrangement: «J’ai conduit la coalition internationale contre le régime Kadhafi qui avait prévu de faire couler des rivières de sang à Benghazi.»
« Takieddine a menti quatre fois »
Sarkozy fulmine : « Dans cette bande de mafieux qui me calomnient, il y a M. Takieddine, un intermédiaire sulfureux qui a fait de la prison et a pillé l’État libyen par des sociétés offshore. Je ne l’ai jamais reçu entre 2004 et aujourd’hui. Cet individu, qui est un malfaiteur, ne m’a jamais remis aucune valise et a menti à quatre reprises. Il a dit qu’il m’aurait croisé au ministère de l’Intérieur autour du 27 janvier 2007 et m’aurait remis une valise de 5 millions d’euros. Mais j’ai la preuve que le 27 janvier, je n’étais pas à Paris, pas plus que le 25, le 26 ou le 28. » «Il dit aussi qu’il a rencontré mon directeur de cabinet au premier étage du ministère de l’Intérieur, alors que, de toute éternité, le bureau du directeur de cabinet se situe au rez-dechaussée. Et on n’a jamais retrouvé la moindre trace d’un rendez-vous entre Takieddine et moi sur mes agendas qui ont été saisis. Ces gens-là, qui sont des assassins, des criminels, ne produisent aucune preuve.» Sur l’interdiction qui lui est faite d’entrer en contact avec divers protagonistes du dossier, Sarkozy ironise: « Je n’ai aucune envie de voir monsieur Takieddine. Quant à Claude Guéant et Brice Hortefeux, j’ai eu tout loisir de les côtoyer depuis des années, je ne vois donc pas bien à quoi peut servir de ne plus les voir…»
◗ « La France, ce n’est pas fini »
Drapé dans son indignation, Nicolas Sarkozy a en conclusion enfoncé le clou et promis une résistance sans merci. «Comment se fait-il qu’il n’y ait pas la moindre preuve ? Il faut des preuves, c’est trop grave. Comment se fait-il qu’on mette un ancien Président au même niveau qu’une bande d’assassins ? Ça me prendra un an, deux ans ou dix ans, mais je pourfendrai cette bande et je ferai triompher mon honneur ! La politique, c’est fini. Mais la France, ce ne sera jamais fini. Je suis blessé pour notre pays.»