Vitiligo : aucun patient sur le bord de la route
À la une Responsable du centre niçois expert de cette affection de la peau, le Pr Passeron est confiant sur les progrès à venir pour les cas les plus difficiles
«Désolé, on ne peut rien faire, c’est psychologique!» C’est ainsi que se concluent trop souvent les consultations médicales pour les patients atteints de vitiligo, cette affection de la peau à l’origine de taches blanches pouvant envahir tout le corps. «Notre centre voit affluer des patients de tout l’Hexagone, voire de l’Europe, désespérant de trouver une réponse», constate le Pr Thierry Passeron, dermatologue et responsable du centre expert sur le sujet au CHU de Nice (1). Pourtant des solutions existent, et « elles devraient être encore plus nombreuses dans l’avenir grâce à une meilleure connaissance de la maladie», rappelle avec force ce spécialiste. Un message à l’attention des patients, mais aussi des médecins, peu ou mal informés sur cette affection qui « pourrit » la vie de 0,5 à 1 % des Français. «Il ne s’agit pas d’un problème cosmétique; le vitiligo est une vraie maladie, auto-immune – le système immunitaire détruit les mélanocytes, qui ne se traite pas en allant chez le psy!» Autre idée reçue : ces patients sont à haut risque de cancer de la peau. « C’est faux, conteste le Pr Passeron. Nous savons même aujourd’hui que les personnes avec vitiligo ont un risque de mélanome trois fois inférieur au reste de la population.» Pas de panique, enfin, en cas d’antécédent familial. « S’il peut exister un terrain de prédisposition, le vitiligo n’est pas une maladie héréditaire. »
Du soleil !
Quid à présent du traitement? « Du soleil, encore du soleil, toujours du soleil ! », pourrait-on répondre. Avec quelques nuances. «Sans aller jusqu’à se brûler, il est conseillé de s’exposer au soleil tous les jours, jusqu’à ce que la peau devienne rose. En période hivernale, des séances d’UVB sont prescrites (prises en charge par l’Assurance-maladie) à réaliser dans un cabinet de dermatologie. » Cette exposition est complétée par un traitement topique (crèmes à base de dermocorticoïdes pour le corps ou de tacrolimus pour le visage). «Les effets sur les taches présentes au niveau du visage sont les plus spectaculaires. On obtient une repigmentation complète ou quasi complète dans 70 à 80 % des cas ». Les bénéfices sur les autres localisations sont un peu plus faibles : 50 % pour les taches situées sur tout le corps. « Les zones les plus difficiles à traiter restent les pieds et les mains.» Si les malades sont impatients d’obtenir des résultats – on peut les comprendre – ils doivent faire preuve de patience; c’est seulement au bout de quelques mois que cette exposition au soleil (ou aux UV), associée aux crèmes, produit des résultats. «En l’absence de bénéfices après six mois, inutile de poursuivre le traitement; mais il ne faut pas désespérer. De nouveaux traitements sont en cours d’expérimentation pour les formes résistantes, très étendues (plus de 5 % du corps touché) et les localisations (mains, pieds) les plus difficiles à traiter », annonce le Pr Passeron. Le centre qu’il dirige mène actuellement un protocole unique au monde avec un traitement en comprimés pour les formes sévères, dont les résultats seront bientôt connus. «On assiste, dans le champ du vitiligo, à la même révolution que celle qui s’est produite pour le psoriasis il y a 20 ans. » Quand ces mots émanent d’un des plus grands spécialistes au monde du vitiligo, ils peuvent redonner le sourire à tous ceux dont la vie est terriblement assombrie par cette affection.