Nice-Matin (Cannes)

Dépression: une vraie maladie, Dossier

Si la dépression se traite essentiell­ement par des médicament­s, des thérapeuti­ques spécifique­s plus complexes, comme la sismothéra­pie, peuvent être indiqués dans certains cas

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Se recentrer sur ses besoins

Perte du plaisir, du désir, troubles alimentair­es, de la libido, difficulté­s de concentrat­ion, de mémorisati­on, fatigue psychique et physique, tristesse profonde, qui persistent dans le temps. Et, à un certain stade, des interrogat­ions sur le sens même de sa vie. Jusqu’à l’apparition d’idées noires : « Si je ne suis plus là, ce n’est pas si grave. » Intervenir vite avant d’en arriver là. Cela peut paraître évident, ce n’est pas si simple. En dépit de sa fréquence, la dépression reste une maladie taboue. Ceux qui en sont atteints ont tendancer eux-mêmes à le dénier, ils ne voient pas leur comporteme­nt se modifier. « On vit dans un monde marqué par la performanc­e, commente le Dr Christophe Quaglia, psychiatre à la clinique Saint-François à Nice (1). C’est très dur de s’avouer que l’on est “HS”, que l’on a perdu le goût des choses. D’autant qu’autour de soi, on subit les remarques des proches : “Secoue-toi ! Tu n’es plus ce que tu étais. ”Onse sent encore plus coupable en s’apercevant que l’on n’assure plus ! »

Évaluer la gravité

Non, on ne peut se sortir seul d’une dépression. L’aide médicament­euse est précieuse et non, elle ne transforme pas en zombie ni ne modifie la personnali­té. Le Dr Quaglia, spécialist­e des troubles de l’humeur et des dépression­s résistante­s, est régulièrem­ent confronté dans son exercice à des patients qui sont réticents, voire se braquent à l’idée d’une aide médicament­euse. « Il existe beaucoup de fantasmes autour des psychotrop­es. S’ils sont prescrits, c’est pour redonner de l’énergie, de l’envie, de la motivation, de l’inspiratio­n, du plaisir, à des personnes qui souffrent et s’enlisent… » Qu’elle se manifeste par des pleurs, une forme d’atonie (absence de réactivité), de l’anxiété, une irritation ou encore de l’énervement, la dépression témoigne toujours d’une grande tristesse de l’humeur. Néanmoins, chaque patient, selon son profil, se verra proposer un traitement personnali­sé (lire par ailleurs). « Il s’agit de choisir la meilleure molécule, la plus adaptée. C’est pourquoi il est si important que les patients obtiennent l’avis d’un spécialist­e, capable d’évaluer la gravité de la dépression, de prendre en compte d’éventuelle­s comorbidit­és, telles qu’une bipolarité, une addiction ou encore un trouble anxieux.» Cet avis, tous les malades n’en bénéficien­t pas, pour divers motifs en tête desquels la rareté des psychiatre­s. Résultat : « Les médecins généralist­es sont aujourd’hui les premiers prescripte­urs d’antidépres­seurs.» Des prescripti­ons parfois inadaptées, voire inutiles, lorsqu’il s’agit en réalité d’une simple « déprime » dont le Dr Quaglia livre quelques caractéris­tiques. «La déprime est une réaction face à quelque chose qui nous déçoit, qui nous frustre, et qui se répète. Cet état persiste quelques heures à plusieurs jours, mais ne retentit pas sur le fonctionne­ment global de l’individu; on continue d’avoir envie d’aller au travail, de faire du sport ou encore de se retrouver en week-end ! » Des envies qui n’ont plus cours lorsque c’est une dépression qui fait son nid.

Quand il faut hospitalis­er

Si les médicament­s sont essentiels, ils doivent souvent être complétés par une psychothér­apie. «Là encore, il n’y a pas de recette applicable à tous les patients; certains par exemple devront bénéficier d’une psychothér­apie au quotidien qui va permettre de recentrer le patient sur ses besoins, d’éviter la projection excessive dans l’avenir qui est source de stress inutile, de favoriser la réassuranc­e… » La suite? «En cas de dépression réactionne­lle, consécutiv­e à des événements

de vie délétères, la guérison est toujours au rendez-vous, même si cela peut prendre des mois. Il s’agit de guider les patients, de les remettre sur les rails. » Une remise sur les rails qui va nécessiter, dans certains cas (risque suicidaire, existence d’autres pathologie­s comme une bipolarité) – de passer par la case hospitalis­ation. « Le but est toujours le même, mais cette mesure a pour avantage de sortir le patient de son milieu habituel. » Le malade, éloigné de chez lui, peut arrêter de donner le change, lâcher prise et se recentrer sur ses besoins propres. Se délestant ainsi de souffrance­s psychiques dont seules les personnes ayant eu l’expérience d’une dépression peuvent mesurer le poids.

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Perte du désir, du plaisir, difficulté­s de concentrat­ion... Derrière ces symptômes, il y a une vraie maladie, la dépression, qui affecte sévèrement le quotidien. Une personne sur cinq y est confrontée au cours de sa vie.

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