Nice-Matin (Cannes)

«La suppressio­n de l’état d’urgence a été une faute»

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON

Après l’attentat de Trèbes, la politique a vite repris ses droits. Depuis ce week-end, les ténors des Républicai­ns et du Front national n’ont de cesse de stigmatise­r le laxisme de l’Etat et la «coupable naïveté» d’Emmanuel Macron face au terrorisme, selon la formule de Laurent Wauquiez. Eric Ciotti, spécialist­e des questions de sécurité chez LR, en a lui aussi remis une couche, pour réclamer le rétablisse­ment de l’état d’urgence et l’enfermemen­t ou l’éloignemen­t des fichés S.

En quoi l’état d’urgence aurait-il pu empêcher un acte terroriste comme celui commis à Trèbes ?

La suppressio­n de l’état d’urgence, le er novembre dernier, fut une erreur et une faute. On a laissé croire aux Français que de nouvelles dispositio­ns tout aussi fortes se substituai­ent à l’état d’urgence, mais c’était une fable. Les chiffres sont cruels pour le gouverneme­nt. Un exemple, les perquisiti­ons administra­tives : il y en a eu quatre mille six cents du  novembre  au  octobre . Et depuis le er novembre, il n’y en a plus eu que six, tellement la mesure est devenue inapplicab­le.

Mais l’état d’urgence n’a pas empêché l’attentat de Nice…

Je n’ai jamais prétendu que l’état d’urgence pouvait éviter tous les attentats. Mais il a permis d’en éviter un nombre conséquent, d’ouvrir trente procédures judiciaire­s et de saisir six cents armes. Qui peut prétendre de bonne foi que si une perquisiti­on administra­tive avait été opérée au domicile de cet individu qui était surveillé, on n’aurait pas pu éviter l’attentat de Trèbes ? Par ailleurs, avec l’état d’urgence, les individus dangereux pouvaient être assignés à résidence à leur domicile. Désormais, ils le sont dans le périmètre d’une ville entière. Le risque zéro n’existe pas, mais il faut se donner toutes les chances pour détecter le plus tôt possible les dangers potentiels.

Vous préconisez l’internemen­t des fichés S français et l’expulsion de ceux qui sont étrangers. Est-ce vraiment faisable juridiquem­ent ?

Il faut savoir ce que l’on veut. On est engagé dans une guerre où la barbarie islamiste a décidé de nous détruire ou de nous soumettre à un modèle culturel qui n’est pas le nôtre. Et nous, nous opposons à ce combat vital des arguties juridiques. Bien sûr qu’il est possible de lever ces obstacles ! J’ai défendu des amendement­s dans ce sens à l’Assemblée. Ils ont toujours été rejetés par les gouverneme­nts de Hollande et Macron, qui ont la même approche naïve. S’il faut pour aller sur ces sujets une réforme constituti­onnelle, eh bien allons-y, soumettons-la par référendum aux Français ! On débat aujourd’hui de questions politicien­nes pour réformer la Constituti­on et limiter le nombre d’amendement­s des députés et on ne pourrait pas réformer notre Constituti­on pour protéger nos concitoyen­s ?

On imagine que vous avez bondi en entendant Christophe Castaner dire, ce week-end, qu’il était préférable d’accueillir les djihadiste­s français partis en Syrie pour « mieux identifier le risque»…

Ça m’a fait bondir, effectivem­ent, tellement cette approche confine à la naïveté. Il n’est pas rassurant que de telles personnali­tés aient en main la responsabi­lité du pays.

Que proposez-vous pour assécher l’islamisme qui prospère sur le terreau de la petite délinquanc­e ?

Cette guerre, nous la gagnerons avec une volonté nationale forte. Il faut réarmer notre nation contre le terrorisme. Budgétaire­ment d’abord. Depuis cinquante ans, on s’est considérab­lement affaibli. Il faut avoir le courage de dire que notre police, nos services de renseignem­ent, nos militaires, nos magistrats ont besoin de beaucoup plus de moyens. Il faut aussi un réarmement culturel, en combattant sans relâche l’avancée de l’islamisme politique qui veut imposer à notre pays ses règles religieuse­s qui seraient supérieure­s aux lois de la République. Il faut opposer à cette avancée une laïcité exigeante. J’ai déposé des textes en ce sens, notamment pour interdire le port du voile à l’université ou dans les services publics. Je considère, enfin, que la République doit reconquéri­r les quartiers qu’elle a abandonnés à des bandes mafieuses et communauta­risées. Après l’attentat de Carcassonn­e, des journalist­es ont été pris à partie violemment par certains habitants qui défendaien­t le terrorisme et personne n’a réagi. C’est ahurissant! La République ne peut plus tolérer de tels comporteme­nts. Nos adversaire­s testent nos faiblesses qui, hélas, ont été trop fortes. Il nous faut changer de cadre contre la délinquanc­e du quotidien et le communauta­risme et être moins naïfs envers ceux qui constituen­t une menace pour nous.

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