Nice-Matin (Cannes)

Claudia Tagbo pète le feu pour Perf’ d’acteur !

Avant de tourner la suite de Qu’est ce qu’on a fait au Bon Dieu et C’est quoi cette famille, l’humoriste est à l’affiche du festival Performanc­e d’acteur, ce soir au Palais des Festivals

- ALEXANDRE CARINI acarini@nicematin.fr

C’est une nature. Sacré tempéramen­t ! Un volcan, qui ne craint pas l’effusion. Claudia Tagbo. Le rire jaillit comme lave, au moindre bon mot. Dans le salon de l’hôtel cannois où elle nous reçoit, elle s’enquiert si l’on sert des «jus de trucs bizarres», prend brièvement la pose devant la piscine en mode mannequin, « mais non, c’est pour déconner », s’assied sur la banquette puis change de place « pour être en face», sourit, grimace, s’écrie, bondissant­e et rugissante. Ouf ! Claudia telle qu’en elle-même, à la ville comme à la scène. L’humanité déborde, sous toutes ses coutures. Les vannes s’ouvrent, dans un flot ininterrom­pu. Tagbo être prévenu, le tourbillon t’emporte. Crazy ou Lucky, mais jamais tout à fait assagie. Pourvu qu’on en rie !

Comment passe-t-on de Crazy à Lucky ?

Je suis une folle qui va à la rencontre des autres. Mais la génèse de ce nouveau spectacle, ce sont les attentats de . Après, quand on se réveille le matin et que tout va bien, on se dit que c’est une chance. Il n’existe pas encore de machine pour ça, pour être toujours là : quand c’est ton moment, c’est ton moment ! Lucky, c’est aussi une façon de dire merci.

Une résonance d’autant plus flagrante que vous habitez à proximité du Bataclan ?

Je vis dans le e. Comme tout le monde, j’ai été bouleversé­e par ces attentats. On était à mille lieues de penser que ça pouvait se produire en France. Comment l’artiste peut traduire ça… ou pas ! Pour moi, le rire ensemble participe du vivre

‘‘ ensemble. C’est ne pas se rétracter avec nos peurs, comme une tortue. Ce spectacle, c’est une bulle de bienveilla­nce.

Vous dites « spectacle citoyen ». Un rire engagé et engageant ?

Je suis une militante de la bonne humeur ! Moi, je suis née sur un Continent, je vis sur un autre, je me réveille sur la Côte d’Azur : c’est une chance ! Ce spectacle est aussi un prolongeme­nt de moi, à travers les autres.

C’est aussi l’idée du poème de Léopold Sédar Senghor, qui fait l’ouverture du show ?

Exactement. Il n’y a pas plus métissé que Senghor, et sans me comparer à lui, je me rêve aussi dans cette pluralité.

Dans Lucky, malgré votre incroyable énergie, vous êtes aussi un peu assagie ?

Depuis Crazy, je suis un peu plus femme et bordée. Moimême, je me redécouvre tous les soirs, alors c’est la règle du tiers : un tiers Crazy , un tiers Lucky, et peut-être un tiers de sagesse, on peut toujours croire !

Mais rassurez-nous, vous chambrez toujours les mecs ?

Ah oui, mais dans ce spectacle, tout le monde en prend pour son grade. Y compris la maîtresse de cérémonie ! C’est d’ailleurs ce qui est mignon dans ce métier, il y a beaucoup d‘autodérisi­on.

Vous avez un petit côté Whoopi Goldberg. Une personnali­té qui vous a inspiré ?

Vous voulez parler du peps ? ! Mais je n’ai pas le même langage que les Américains, où les gros mots fusent. Moi, je suis tellement amoureuse de la langue française, que j’aime en jouer. Et puis, il n’y a que celle-là que je connais vraiment.

Votre imitation du sprinter américain Maurice Green est néanmoins impression­nante?

Je suis trop faaaan ! Dès avant le départ, il a déjà gagné la course dans son regard. Un vrai taureau dans son couloir, il faisait peur ! J’ai moi-même fait de l’athlétisme avant un gros claquage. D’abord du sprint, mais fallait aussi transporte­r du monde derrière (elle désigne son fessier). Après, j’ai fait du lancer de poids !

Aujourd’hui, lancer de vannes ?

Oui, mais je prends garde de ne jamais blesser personne. Il y en a un qui prend toujours cher, c’est mon père. Parce que c’est mon meilleur ami ! En réalité le plus grand humoriste de la famille, il sort des trucs de fous ! Il parle à mes producteur­s, et eux se disent : « ah ouais, en fait, il est vraiment comme dans les sketches ! ».

Jamel Debbouze, Laurent Ruquier ou Arthur : figures tutélaires ?

Le Comedy Club, ce sont des bons souvenirs. Moi, je viens du théâtre classique, avec un esprit de troupe. Là, c’était  artistes pour  spectacles, avec  ego : il fallait trouver sa place et sa respiratio­n en huit minutes. On ne demande qu’à en rire de Ruquier, je l’ai pris comme un challenge : être sur le

‘‘ qui-vive sur un sujet imposé, et je n’ai pas eu peur d’être notée ! Et puis avec Arthur, je suis rentré dans toutes les maisons pour Vendredi tout est permis. C’est un vrai divertisse­ment qui me rend proche des gens, même s’il faut parfois canaliser cette proximité !

Et seule en scène ?

Ca, je le vis comme un cadeau. Vous vous rendez compte ? Il y a   spectacles par jour à Paris, et des gens viennent me voir sur scène. Pour moi, c’est un speeddatin­g !(rire).

De l’humour, toujours ?

Pour l’instant, oui, mais je me rêve toujours en tragédienn­e ! Je joue aussi dans un téléfilm, bientôt diffusé sur Arte, Le temps des égarés, où je joue une traductric­e de l’OFPRA pas très sympathiqu­e, qui se fait payer pour inventer des histoires sur les réfugiés, afin qu’ils restent sur notre territoire. Dans un tout autre registre, Je vais bientôt tourner dans la suite de Qu’est ce qu’on a fait au bon Dieu ?, et de C’est quoi cette famille ? En fait, je suis le conseil de mon père sur ce métier : « Ne te retiens pas, et ne laisse jamais quelqu’un te mettre dans une case !»

Tout le monde en prend pour son grade! ”

La scène, pour moi, c’est un speed-dating ”

 ?? (Photos Sébastien Botella) ?? Claudia Tagbo sait prendre la pose sourire...mais elle ne reste pas longtemps figée !
(Photos Sébastien Botella) Claudia Tagbo sait prendre la pose sourire...mais elle ne reste pas longtemps figée !

Newspapers in French

Newspapers from France