Nice-Matin (Cannes)

Elbaz, l’électron libre Repères

Le trublion cannois, pourfendeu­r des Républicai­ns, livre sa pensée... pas toujours simple à décoder. Interview

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Curieux parcours que celui d’Erick Elbaz, politique sans l’être... tout en l’étant ! Ce Franco-Israélien, autodidact­e, doté d’un physique d’agent du Mossad, nourri, comme il le dit, « par la lecture », a milité au sein des Jeunesses communiste­s et du PCF. Puis il s’est « recentré » en soutenant Bruno Le Maire aux dernières primaires de la droite... « Je sentais que quelque chose de nouveau se passait. Mais quand il a rallié Fillon, ma déception a été immense. Quand on m’a dit, c’est Fillon ou rien. Pour moi, ça a été rien.» Il est comme ça, Elbaz. Entier. Impulsif peut-être. « Moi, dit-il, j’ai connu tous les systèmes d’exclusion : les CES, les TUC, les contrats emplois jeunes, les contrats aidés. Je suis passé par tout cela et j’ai pu constater la dérive des systèmes administra­tifs. » Exresponsa­ble d’un centre social à Marseille, il a changé de job et de parti (il est encarté à l’UDI, Ndlr). Désormais, il agit au sein... d’Agir 06. On l’écoute...

Doit-on vous considérer comme un homme politique ?

Plutôt comme un citoyen et un militant engagé dans la vie politique. D’abord, parce que je n’ai pas de mandat et ensuite parce que le regard que je porte sur la politique est justement détaché. Cela me permet de pointer du doigt ce qui ne va pas. Mais je ne suis pas dans cette notion caractéris­ée d’appartenir à une caste très définie.

Les politiques ne sont pas contents quand on vous donne la parole. Ils disent que vous ne représente­z rien...

Je pense qu’au

‘‘ contraire, j’ai tous les droits pour commenter leur action parce qu’ils sont élus au suffrage universel par les citoyens. Ils ont oublié que ce sont ces derniers qui sanctionne­nt. Trop occupés qu’ils sont à prendre du galon, ils oublient que la critique permet de faire avancer les choses. Sans elle, tout se meurt. Par ailleurs, je suis référent départemen­tal d’un parti politique, donc mon expression se fait toujours au travers d’Agir.

Donc, vous êtes un politique... La différence, c’est que j’ai un mandat de responsabi­lité mais pas d’élu. C’est d’ailleurs là qu’Agir apporte une vision nouvelle.

Vous n’êtes pas tendre envers ceux que vous ciblez...

Je fais la différence entre la vie privée et l’action politique. Je peux être très amer envers quelqu’un effectivem­ent, par rapport à ce qu’il fait, jamais en regard de ce qu’il est. Et quand je condamne Les Républicai­ns parce qu’ils ont une posture d’extrême droite et un discours semblable à celui du Front national, juste pour récupérer des voix, c’est une réalité. Idem lorsque je fustige les militants LR qui, au deuxième tour d’une élection, lorsque la droite n’est pas présente, vont voter FN. Pour moi, il faut être clair. Ce qui gêne mes détracteur­s, c’est que je dis les choses telles qu’elles sont. Mais j’ai du mal à comprendre comment des gens qui sont en place depuis des années, gèrent la même ville et ont évincé les citoyens de la vie politique, peuvent donner des leçons.

Vous avez de vraies « têtes de Turc » dans le collimateu­r : Bernard Brochand, Henri Leroy, les Tabarot...

Ces personnes-là sont emblématiq­ues de tout ce qui ne devrait pas exister en politique. Cela fait tellement d’années qu’ils sont en place, qu’ils ont l’impression que tout leur appartient. Dans les discours, ils sont très ouverts mais pas dans les faits.

Pour vous, leur action est totalement critiquabl­e ?

Prenons l’exemple de Bernard Brochand. Ce qu’il a fait pour Cannes est bien. Mais sa position fait qu’à un moment donné, il y a une dérive vers une dictature politique qui empêche l’expression de personnes souhaitant amener un souffle nouveau. Quand on veut accaparer le pouvoir coûte que coûte, on entre dans une dérive politique qui devient une dictature. On ne laisse plus la moindre ouverture au dialogue.

Le dialogue avec les citoyens, c’est ce que prône Agir ?

Oui, ce parti fait quelque chose d’extrêmemen­t nouveau. Et il est rejoint par les abstention­nistes parce qu’ils se retrouvent dans le discours du parti. Parce que l’on relate les choses d’un quotidien qu’ils vivent. Les abstention­nistes donc, sont en train de se réveiller et Agir fédère également les jeunes.

Qu’est-ce qui vous a conduit à mener ce combat « citoyen » ?

J’ai été un militant associatif dès l’âge de - ans. Aux Jeunesses communiste­s et au PC, j’ai appris à lire entre les lignes et je ne regrette rien. J’ai toujours été en lien avec l’humain parce que je crois qu’il n’y a qu’avec l’humain que l’on peut changer les choses. Et quand je vais quelque part, j’ai tendance à pointer ce qui ne va pas plutôt qu’à applaudir ce qui va. Le problème, c’est que cette posture induit de la défiance chez les élus.

Allez-vous, un jour ou l’autre, briguer un mandat ?

Ma position est claire : je vais rester dans ce départemen­t (il vit à Cannes depuis quatre ans, Ndlr) mais je veux que les choses changent. Je suis en lien avec la France audacieuse (le mouvement lancé par Christian Estrosi, Ndlr) et avec les responsabl­es d’En Marche. Ma volonté, c’est soutenir un projet. Et si vous me posez la question pour les Européenne­s, je ne soutiendra­i jamais une liste des Républicai­ns. Au niveau des municipale­s, si En Marche désigne un candidat, je serai derrière lui.

Ce candidat, ce pourrait être vous ?

Imaginons que le projet de David Lisnard me correspond­e et que les personnes qui l’accompagne­nt évoluent. Je pourrais le soutenir. Dans le cas contraire, je n’aurais aucun état d’âme à me positionne­r contre lui. La principale erreur que commettent les élus aujourd’hui, et le cabinet du maire de Cannes (sic), est de vouloir verrouille­r la parole. Il faut aérer tout cela. Un élu est là pour servir, il est payé par l’argent des administré­s et ce sont les citoyens qui votent. Ils ont, je le répète, ce pouvoir de sanction même s’ils l’ont oublié. Mon souhait d’ailleurs est d’imposer un comité de sanction composé de cinq ou six personnes qui, chaque année, seraient appelées à juger un élu selon sa parole, ses écrits, son action sans attendre la fin de son mandat. Ce qui m’intéresse, c’est la citoyennet­é participat­ive. Et forcément, ça ne plaît pas aux élus.

Vous n’avez pas vraiment répondu : vous seriez prêt à partir aux municipale­s ?

Paradoxale­ment, ce n’est pas d’exercer le pouvoir qui me convient. Qu’un projet soit porté par moi ou quelqu’un d’autre, peu importe.

Quoi qu’il en soit, il faudra être costaud pour déboulonne­r David Lisnard ?

Vous savez, rien n’est acquis pour la ville de Cannes. Comme à Vallauris d’ailleurs qui est une catastroph­e sur le plan social. C’est une commune qui changera son maire dès les prochaines élections.

Puisque vous parlez de social, pourquoi votre attachemen­t au quartier République ?

Lors des élections départemen­tales, j’ai fait la campagne avec Chantal Azemar (élue en binôme au Départemen­t en mars  avec David Lisnard, elle avait été mise en examen en novembre  pour abus de confiance et faux en écriture, Ndlr). On était allé tracter dans le quartier et j’avais été choqué par le fossé monstrueux existant entre les commerçant­s de ce secteur et ceux de la rue d’Antibes. J’ai donc créé le collectif République auquel les élus locaux n’ont jamais eu la décence de rendre visite, alors qu’Azouz Begag, un ancien ministre pourtant, était, lui, venu nous rencontrer.

Votre attachemen­t politique est plutôt à droite, votre discours est très social. Finalement, vous êtes un homme de droite ou de gauche ?

J’ai gardé la hargne de mes années passées aux Jeunesses communiste­s que j’allie à la réalité d’aujourd’hui. C’est compliqué, parce que nous vivons dans une période de mutation de la vie politique. Pour résumer, ce qui me convient c’est marier la dynamique du discours d’extrême gauche et le projet politique d’Agir qui est celui d’une droite sociale.

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