Berglund-Barisano : l’été de la femme à Madoura
Ce haut lieu de l’art, de l’histoire et de la création consacre une exposition à deux artistes au talent original, Isabel Berglund et Olivia Barisano
Pour prendre en quelque sorte le contre-pied de la mise à l’honneur de celui qui est l’archétype de l’homme créateur, Pablo Picasso, auquel l’été sera dédié, le directeur de Madoura, Yves Peltier, invite pour la première fois dans le cadre de ses expositions, deux femmes qui parlent à travers leur art de leur condition de femme et témoignent de leur place d’artiste dans la société. La première, Isabel Berglund met en exergue la scène artistique scandinave. Cette artiste danoise qui vit et travaille à Copenhague signe ici sa première exposition personnelle en France. En utilisant la technique ancestrale du tricot, Isabel Berglund, fait entrer de plain-pied cet artisanat commun et populaire dans une dimension véritablement artistique. Cette pratique universelle utilisée ici comme un vecteur artistique à part entière. En nouant, tressant, entrelaçant des fils pour créer des surfaces souples qui ont vocation à envelopper, recouvrir ou protéger, elle emploie le fil, la laine ou la corde pour rappeler que le tissage, art millénaire, peut aussi atteindre à une dimension supérieure. Ici, à Vallauris, où l’identité du savoir-faire s’inscrit comme l’ADN de la création, cette exposition originale prend toute son importance. Si le matériau change, l’acte artistique existe comme pour établir un lien entre l’artisanat et l’art contemporain. Au centre de l’exposition une pièce monumentale et colorée qui occupe l’essentiel de l’espace et intitulée Floating Island of Pearls, illustre cette démarche originale. Pour Isabel Berglund, cette exposition prend une saveur toute particulière: dans son enfance, l’artiste avait découvert une photo de Picasso en train de travailler dans l’atelier, sans se douter qu’ellemême serait plus tard invitée entre ces murs.
Un art vivant
À l’entrée c’est une artiste qui vit et travaille ici, Olivia Barisano, qui propose une approche différente de ce lien entre les gestes du quotidien et celui de l’artiste par le biais de la vidéo. Scénographe spécialisée dans les costumes et les décors, elle a filmé sa grand-mère pour retrouver en images toute la beauté et la simplicité du travail quotidien d’une femme qui tient son foyer et son ménage. En vingt et une minutes de prises de vues filmées pratiquement sans montage sur une série de six robes, elle met en mouvement des surfaces picturales qui exacerbent les gestes quotidiens de la femme. Simples et répétitifs ils sont porteurs d’une essence artistique certaine grâce au prisme de ces captures sur le vif qui restent dans un mouvement poétique voulu comme une peinture, une abstraction dont les motifs décrivent des énergies et des rythmes différents. Là aussi la thématique est d’une force certaine puisque le quotidien devient en quelque sorte oeuvre d’art par le biais de l’image et du regard de la créatrice. Deux concepts, deux propositions qui sortent vraiment des conventions et dans lesquels chacun trouvera matière à réflexion, par la volonté de proposition d’éléments artistiques qui symbolisent un art véritablement vivant. ■ Exposition ouverte jusqu’au 31 août à l’atelier Madoura, lieu d’art, d’histoire et de création, Rue Suzanne et Georges Ramié à Vallauris (téléphone 04.93.64.41.74).