Nice-Matin (Cannes)

GOLF « On va secouer tout ça »

Président du Comité Ryder Cup, Pascal Grizot a pris la tête d’un nouveau “comité performanc­e” dont l’objectif sera d’aider les meilleurs français à atteindre le Top 20 mondial

- PROPOS RECUEILLIS PAR FABIEN PIGALLE

Pays hôte de la Ryder Cup en septembre, la France, qui garde l’espoir d’avoir un représenta­nt au sein de l’équipe européenne, souhaite passer la vitesse supérieure. Et vite. Las de ne voir aucun tricolore dans le top mondial, la Fédération Française de golf vient de créer un nouveau Comité Performanc­e. L’objectif est de mieux cibler les talents, et de les accompagne­r dans leur transition vers le monde pro. Si la FFG compte y mettre les moyens, elle gardera un droit de regard en retour sur le projet du jeune espoir. Pascal Grizot, déjà président du comité Ryder Cup ne souhaite plus rien laisser au hasard. Il a décidé de resserrer quelques boulons.

Pourquoi avoir accepté ce nouveau rôle ?

J’ai été capitaine de l’équipe de France de  à . La Ryder Cup va se terminer fin septembre et il était important de se tourner vers l’avenir. Je faisais déjà partie de la commission haut niveau et le président Jean-Lou Charon a souhaité me confier logiquemen­t cette nouvelle responsabi­lité.

Quels sont les objectifs du Comité Performanc­e ?

On veut avoir des Français parmi les  meilleurs joueurs du monde, comme la Suède, l’Espagne etc. Chez les femmes, comme chez les hommes. Nous serons épaulés par deux joueurs expériment­és Gwladys Nocera et Thomas Levet. Nous devons utiliser leurs compétence­s. C’est un grand challenge qui s’offre à nous car malgré les objectifs que nous nous étions fixés dans le passé, on n’a jamais cassé ce plafond de verre du top  mondial dans la durée. On l’a atteint de manière éphémère avec Victor Dubuisson qui a été e mondial pendant quelques semaines, pareil pour Karine Icher.

On a l’impression que vous avez envie de réveiller, voire secouer les joueurs français ?

Je ne veux pas les réveiller... mais je sais que parmi eux, il y a des compétence­s, des capacités, pour faire mieux. Maintenant, il faut qu’ils s’en persuadent euxmêmes ! Tout ne peut pas passer par la fédération. Ce sont d’abord leurs ambitions. Notre rôle, c’est de les accompagne­r. Mais au départ, c’est à eux d’avoir le projet de faire partie des meilleurs joueurs du monde. On va un peu

secouer tout ça. Ceux qui ont la volonté, nous les aiderons. Mais ceux qui auront l’ambition, respectabl­e, de faire juste partie des  meilleurs joueurs, ceux-là, nous considéron­s qu’ils n’ont pas besoin d’avoir l’aide de la Fédération pour y arriver.

Quelles pourraient être les retombés de la Ryder Cup pour le golf français ?

Je pense que ça a été un objectif pour les joueurs d’en faire partie. Que ce soit en France ou pas... C’est un rêve de participer à la Ryder Cup. Mais quand elle se joue dans votre pays, il y a un supplément d’âme. Ça a dû susciter des vocations. Notamment chez Alexander Levy... Il n’avait pas besoin d’une Ryder Cup en France pour trouver sa motivation. Mais c’est un plus, c’est sûr. L’absence d’un Français serait-elle préjudicia­ble ? Je ne pense pas. Mais d’en avoir un, c’est clair, ce serait un plus. Ne serait-ce que pour justifier des opérations menées jusqu’ici par la Fédération.

C’est-à-dire ?

Quand les joueurs passent pros, on n’a plus la main sur eux, ils gagnent beaucoup d’argent et le peu que pourrait apporter la Fédération ne leur servirait pas à grand-chose. Pour nous, en revanche, la période où ils sont encore amateurs est très importante. Et jusqu’à présent, nous ne pouvions faire mieux que ce que nous avions fait. Victor Dubuisson a été numéro  mondial amateur. Sans l’aide de la Fédération, il l’a dit, il n’y serait pas arrivé... Alexander Levy a gagné le championna­t du monde amateur, et sans la Fédé, ça n’aurait pas pu être possible. Mais quand ils passent pros, c’est ensuite très différent. On le voit bien avec un joueur extrêmemen­t talentueux comme Romain Langasque. Avec l’aide de la Fédé et son talent, il a gagné le Bristih amateur, puis il passe pro, ne prend peut-être pas toujours les bonnes décisions et on s’aperçoit qu’après une montée sur le Tour Européen, il redescend sur le Challenge Tour. On espère qu’il va y remonter. Aujourd’hui, l’apport de Thomas Levet ou Gwladys Nocera au sein du comité peut peut-être aider nos meilleurs joueurs français à gagner du temps.

Quelle photograph­ie faites-vous du haut niveau amateur français ?

Je ne suis pas content du tout ! Quand le meilleur joueur français et e au ranking mondial, on ne peut pas être content (Edgar Catherine, e). Ce n’est pas du tout l’époque que j’ai connue lorsque j’étais capitaine de l’équipe de France. Ok, c’était peut-être aussi une histoire de génération. Mais j’aime à dire qu’on est responsabl­e. On avait les meilleurs joueurs mondiaux, Victor (Dubuisson), Alexander Levy, Romain Wattel, Julien Brun... On a gagné des titres comme on en a jamais gagné. Je veux retrouver cette densité chez les amateurs pour avoir plus de chances d’atteindre nos objectifs chez les pros.

Quelle place occupe le sud-est dans le paysage du golf français ?

Il est évident que lorsqu’on a de bonnes conditions d’entraîneme­nt tout au long de l’année, c’est un facteur décisif dans le succès. Dans le sud, on s’entraîne mieux que dans le nord, c’est comme ça. Après, c’est bien le sud... mais j’aime bien aussi le sud des Etats-Unis, l’ouest des US. Il faut aller chercher les meilleures conditions d’entraîneme­nt. En France, c’est sûrement dans le sud-est, mais il faut que nos joueurs se déplacent un peu plus loin.

Votre objectif est aussi de développer une vraie passerelle avec les USA. Vous expliquez que les joueurs français ont tendance à revenir trop facilement en France après leur parcours universita­ire aux USA. Expliquez-nous ?

La carrière de sportif au plus haut niveau ne peut pas se faire dans le confort. Si on le fait dans le confort, on peut, avec beaucoup de talents se retrouver e mondial. Le vrai haut niveau, c’est d’optimiser au maximum ses compétence­s pour aller chercher la meilleure place possible. Si un joueur est e et a fait tout ce qu’il fallait pour être e, je respecte. Mais s’il est e sans avoir mis tout en place autour de lui pour atteindre le top  mondial, là, j’ai plus de mal à comprendre. Et si je peux avoir un effet positif sur des décisions, (comme les aider à rester aux USA, ndlr), je veux les prendre pour que le joueur accroche de meilleurs résultats.

Est-ce une main tendue à Victor Dubuisson ?

J’ai beaucoup d’affection pour Victor. Je l’aime beaucoup. Mais après, comme on l’a dit, à chaque champion de se déterminer. La Fédération peut venir aider, mais il faut que le joueur ait envie de mener lui-même son projet. Je respecte le mode de vie de Victor. Je me dis juste que compte tenu de son talent, c’est sûr qu’il pourrait prétendre à de biens meilleurs résultats qu’il n’a aujourd’hui. Mais c’est sa décision. Une chose est sûre, je serai toujours là le jour où il a besoin. Je lui tendrai toujours la main pour qu’il atteigne ses objectifs ambitieux, s’il les a toujours.

Son annonce de forfait pour au moins six mois a-t-elle été vécue comme un coup de massue ?

Pas pour moi. Quand il nous dit l’année dernière qu’il a compris et qu’il a envie de jouer plein de compétitio­ns, on s’aperçoit qu’il ne le fait pas. Donc maintenant qu’il a dit qu’il ne jouerait plus jusqu’à la fin de l’année, peut-être que nous aurons une bonne surprise... Avec Victor on ne sait jamais. Il est capable de ne jouer qu’un tournoi et de le gagner. Avec lui, il faut toujours laisser la porte ouverte.

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AFP) Quatre millions d’euros, c’est le budget de la Fédération alloué aux hauts niveaux amateur et pro.(Photo

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