Nice-Matin (Cannes)

Meneur de son

Musicien et producteur, il impulse ses bonnes ondes à travers plusieurs formations résolument rock

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Le picotement du sel, le cri de la rafale, l’arôme du zénith. Sébastien Gastaldi a poussé au milieu des Embruns comme une agapanthe. Dans le camping antibois familial de la route de Biot qu’il transforme rapidement en studio d’expériment­ation musicale. Passant du zinc à hydrater la foule, à la scène pour la voir exsuder. Implacable fascinatio­n. Faire hurler ses tripes en décibels, retendre ses viscères en mégahertz : ça le tient depuis toujours. Il tire sur sa clope, sourit : « Une fois que t’y as goûté… » Mordu, piqué, accro. Impossible de s’en défaire depuis 34 ans. Faut dire qu’elle le transcende depuis minot. S’il a fondé son premier groupe à 12 ans, Vertige, c’est grâce à elle. À cette pulsion dingue qui s’empare de ceux qui laissent leur instinct prendre le dessus. « Petit, j’étais inscrit à l’Accordéon club de Juan-les-Pins. Je faisais de l’orgue et de la batterie. Depuis, je suis autodidact­e. »Ce n’est pas vraiment lui qui a choisi, c’est son naturel qui l’a poussé dehors. Son regard se fait rieur : « Oui, on s’est fait virer du club avec Jean-Yves Pecoraro… En fait durant un concert on est parti sur un boogie, tout le monde s’est levé c’était la folie. Et on ne s’arrêtait pas malgré les gestes de la responsabl­e.» Sanctionné­s pour leur performanc­e bien trop rock’n roll, les amis prennent la porte sur un prétexte stylistiqu­e. « Sur une des photos de groupe on avait nos manches de chemises relevées, la cravate desserrée: ça a été le motif du renvoi. » Trop rock’n roll, j’vous ais dit… Se nourrissan­t de bons gros riffs tartinés par les légendes – Led Zeppelin, Rolling Stones, Rage Against The Machine et cie –, il se met à la guitare, à la basse, au clavier et au chant. À 18 ans, il prend ses cordes, son arc et file réaliser un cursus dans une école de musique. Durant trois hivers – parce que « la saison » c’est à Antibes –, il fait résonner les pavés du XVIIIe. Une période où il découvre la production musicale, clé de la liberté. Une phase où tout devient possible. Même les rencontres les plus dingues avec des monstres électrique­s. « J’étais au City Rock Café, y’avait beaucoup de musiciens ce soir-là. Dont Brian Johnson. Un boeuf était prévu. Tout le monde s’apprête à jouer et Brian Johnson préfère retourner au bar. Je me retrouve au micro à chanter Highway to hell devant lui. » Après son interpréta­tion du divin psaume profane, il reçoit un encouragem­ent, un autographe, un « ne t’arrête jamais ». Devant son studio d’enregistre­ment, il raconte ça comme un gosse. Sans gloriole, aucune. Avec simplicité, totale. Papa de trois enfants, il gère également d’autres familles… Jonglant entre ses formations : Blah Blah – qui va secouer Les Voiles d’Antibes –, With U – qui jouera à la Gaude le 10 juin pour le Rock Fest caritatif –, No Sonic – le 8 juin au Bus Palladium à Paris – ou encore Blahkousti­c. Du monde, des dates, des villes, des soirées, des nuits. Une vie de route, de musique, d’insomnie. Vivant sur un autre fuseau horaire, il reconnaît que pour lui, le matin, c’est 13 heures. Parce qu’il préfère se réaliser à la lumière des étoiles. Entre technique et créativité. Parce qu’il préfère le mutisme nocturne pour chatouille­r sa gratte. Faire glisser l’éclisse. Se moquer de l’atmosphère, la changer, la modeler, l’orienter. Donner du poids à l’air. Et pourquoi pas noircir quelques pages dans ce nouvel éclairage? «C’est paradoxal hein. On a de la matière quand on ne se sent pas très bien. Mais le but c’est d’écrire des choses positives.» Coucher l’optimisme sur le papier pour exorciser les fantômes de minuit passé. « J’essaie de donner de l’importance à vivre le présent. » C’est bien pour cela que lorsqu’il pousse le bouton «off», c’est pour écouter les pousses bourgeonne­r. Main verte, il se fait tout ouïe devant la nature qu’il laisse aller à son rythme. Admirateur de la plus grande soliste que la terre ait portée.

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Textes : Margot DASQUE mdasque@nicematin.fr Photo : Jean-Sébastien GINO-ANTOMARCHI

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