Pour les collégiens de Picasso la justice n’a rien d’un jeu
À l’initiative de l’antenne de justice locale, deux classes de 5e ont livré une reconstitution de procès pénal au tribunal de grande instance de Grasse. L’aboutissement d’une année de travail
Alors, le prévenu, présenté en comparution immédiate, s’avance face à la présidente du tribunal et aux juges. Les faits reprochés ? Le vol d’un véhicule d’une valeur de 45 000€ en 2017. Quand on lui demande d’expliquer son geste, le suspect – dont le casier contient déjà deux condamnations pour vol – indique : « Je suis parti d’un anniversaire chez un pote. J’étais bourré, j’ai cru que c’était ma voiture. Comme je n’avais pas les clés, j’ai cassé la vitre. » La présidente s’étonne : « C’est quand même très curieux que vous confondiez les véhicules alors que vous n’en avez pas… » Réplique : « J’ai pas fait exprès. Ne me croyez pas si vous voulez… » La victime, qui s’est constituée partie civile, s’approche à la barre, évoque son mal-être depuis le vol.
Tout le monde avait un rôle à jouer
Puis son avocat prend la parole, avant de laisser place au procureur. Qui requiert deux ans de prison, 1000€ d’amende et les frais de réparation du véhicule. Malgré l’intervention de l’avocat de la défense, la présidente suivra les réquisitions du procureur. Sept autres affaires suivront. Après-midi banal au tribunal de grande instance de Grasse ? Pas tout à fait… En effet, les acteurs, au sens propre, du procès – témoins et public compris – n’ont pas plus de 14 ans et sont tous en 5e au collège Pablo-Picasso. Deux classes et une quarantaine d’élèves qui, à l’initiative de l’antenne de justice de Vallauris, ont reproduit une audience pénale. L’acte final d’un projet «néilya un peu plus d’un an, souligne Clarisse Nimal, responsable de la structure vallaurienne. Il s’est déroulé en plusieurs volets. D’abord, une prise de contact avec des professionnels du droit en salle de classe. Fabienne Atzori, procureur de la République, et Michael Janas, président du TGI, nous ont ensuite permis d’assister à des audiences en comparution immédiate, en mars. » Avant la reconstitution dans la cité des Parfums, les collégiens ont pu assister à la diffusion du court-métrage de Rost, Et si on s’en sortait? avant d’échanger avec le rapeur. C’est dans leurs habits d’apparat – clin d’oeil à l’association Relais de femmes pour les costumes – que les jeunes ont défilé sur les bancs du tribunal. Et chacun y est passé… En dépit de quelques petits moments de bafouilles dus au stress, ils ont tenu, durant plus de trois heures, leur rôle à la perfection. L’occasion, avec cette approche concrète, de leur apporter une vision globale sur le monde de la justice, de les ouvrir aux notions de droits, de devoirs. À la citoyenneté, tout simplement…