Nice-Matin (Cannes)

Bac : la philo, ça sert à quoi ?

Jour J. Celui du lancement des épreuves du baccalauré­at et de la philosophi­e. Une discipline un peu en marge des autres mais qui a toute son utilité

- PROPOS RECUEILLIS PAR CHRYSTÈLE BURLOT cburlot@nicematin.fr

Dans un monde soumis à l’évolution des marchés, aux tensions géopolitiq­ues, marqué par le mouvement de l’innovation technologi­que, on comprend bien l’opportunit­é de faire découvrir aux jeunes génération­s les rudiments de l’histoire, de l’économie ou des sciences. Mais quelle peut bien être l’utilité de la philosophi­e ? Ce matin, les Terminales de toutes sections plancheron­t sur la première épreuve du baccalauré­at 2018 : la philosophi­e. Épreuve qui permettra aux élèves de développer leur réflexion et sens critique autour d’un thème. L’occasion d’interroger, Odile Charrol, enseignant­e de cette matière au lycée Carnot, à Cannes. Après tout s’interroger sur l’utilité de la philosophi­e, n’est-ce pas déjà un peu… Philosophe­r ?

Alors, selon vous, à quoi sert la philosophi­e ?

À apprendre à réfléchir tout simplement. À penser par soimême, lutter contre les idées reçues, à argumenter.

Mais vous admettez que ce temps de la philosophi­e détache totalement les élèves de l’action?

Effectivem­ent, les résultats ne sont pas immédiats, ni concrets, on ne développe pas de savoirfair­e qui vont être utiles instantané­ment. Mais est-ce que les maths le font ?

Du coup cela peut sembler déconnecté de la vie à certains élèves…

Ce n’est pas la philosophi­e qui est déconnecté­e, c’est la vie qui déconnecte. Aujourd’hui on ne fait pas de pause, on ne prend pas le temps de réfléchir, les portables sont les meilleurs amis qui dictent les pensées.

Comment faites-vous pour intéresser les élèves qui lâchent ?

J’essaie de partir d’un fait réel. Pour aller le plus possible vers l’idée, le concept. Mais cela ne fonctionne pas toujours…

Les jeunes d’aujourd’hui sontils de bons philosophe­s ?

Certains oui. Mais la plupart du temps… Disons aussi que le système éducatif les prépare moins à la philosophi­e. On aide de moins en moins les élèves à réflechir par eux-mêmes, à énoncer une idée, à la fouiller pour aller plus loin. Et à rédiger. Ce n’est pas de la faute des jeunes. Certains reviendron­t dans le cadre de leurs études à la philo. Mais plus tard…

L’épreuve est souvent redoutée. On dit que la note dépend vraiment du correcteur…

Je ne suis pas d’accord. Les élèves ne redoutent pas tant que cela l’épreuve. Beaucoup ne s’entraînent pas d’ailleurs. Et la note ne dépend pas du correcteur…

Mais comme la pensée est libre, il n’y a donc pas vraiment de barème ?

La pensée est libre mais doit être justifiabl­e et correcteme­nt justifiée. Et c’est cela qui fait le barème. On ajoute aussi des points lorsqu’on voit que les élèves ont travaillé leurs textes.

Quels sont les thèmes favoris des élèves ?

La liberté, la justice. Conscienti­nconscient aussi, mais beaucoup moins qu’avant…

Et vous en quoi la philosophi­e a-t-elle changé votre existence ?

Disons qu’elle m’aide à prendre de la distance par rapport au monde justement…

 ??  ?? Odile Charrol, enseignant­e en philosophi­e au lycée Carnot à Cannes fait également partie des enseignant­s correcteur­s. Elle aura  copies à corriger (Photo Patrice Lapoirie)
Odile Charrol, enseignant­e en philosophi­e au lycée Carnot à Cannes fait également partie des enseignant­s correcteur­s. Elle aura  copies à corriger (Photo Patrice Lapoirie)

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