Sous les pavés Ces hôtels du temps jadis
Tous les mardis, en alternance avec notre chronique le passé redevient d’actualité
Jusqu’en 1860, le littoral azuréen souffrait d’un retard important en voies de communication préjudiciable au développement de son économie. Dès la création du PLM (Paris-Lyon-Méditerranée), en 1857, le prolongement de la ligne Marseille-Toulon jusqu’au Var sera déclaré d’utilité publique. C’est sous la mandature de Jean-Baptiste Rostan, maire de 1830 à 1865, qu’Antibes, encore entourée de son enceinte bastionnée, se dotera d’une gare dont la construction sera approuvée à par le conseil municipal en 1857 et qui n’accueillera le premier train que le 10 avril 1863 pour l’inauguration de la ligne les Arcs-Cagnes. J.-B. Meiffret dans son « Guide d’Antibes et de ses campagnes », paru en 1877, écrit : « Parmi toutes les questions importantes dont la prospérité d’Antibes dépend… L’édification d’un hôtel dans les environs de la ville, non loin de la gare, est celle qui prime toutes les autres par l’opportunité ». Après le démantèlement des remparts, à la fin du XIXe siècle, sera tracée l’avenue Robert-Soleau pour relier l’actuelle place DeGaulle à la gare. En face de celle-ci seront construits deux hôtels haut de gamme : leTerminus (l’emplacement aujourd’hui de la Résidence de la Mer )etl’ Antipolis, en haut de l’avenue de la Libération (aujourd’hui les résidences du Port Vauban). C’étaient deux hôtels luxueux avec vue sur l’anse SaintRoch, proches du train et du tramway. Le Terminus, longtemps géré par Jos Zimmermann, était un établissement moderne à l’époque avec eau courante, chauffage central, tennis, garage et, ce qui ne gâchait rien, une cuisine réputée et des prix modérés. L’hôtel Antipolis offrait également des prestations de qualité, des installations dernier confort, garage et cuisine renommés. On y relevait cuisine au beurre avec spécialités marseillaises (bouillabaisse, langouste), escargots et soupe au fromage, service possible en chambre. Quant à la cave, on la qualifiait de bonne. Les propriétaires de ces deux hôtels avaient rapidement compris la nécessité de pouvoir accueillir facilement la clientèle étrangère d’où pratique de l’anglais, indispensable déjà ! En bas de l’avenue de la Libération à l’intersection avec celle du 11-Novembre, se dressait un hôtel moins imposant par la taille mais également réputé, le Bellevue, nom parfaitement justifié avec vue imprenable sur l’anse Saint-Roch. Il existe toujours aujourd’hu sous l’enseigne The Australian Bar mais a pris de l’âge et beaucoup de rides. Cet établissement nommé un temps Bellevue et des 3 canards réunis (dans les années 1950), était un établissement réputé, vanté par maintes cartes postales: un petit bâtiment avec une terrasse couverte attenante et un joli jardin avec quelques palmiers. La proximité de la mer était un atout pour l’hôtel. Les propriétaires l’avaient compris et une grande terrasse face à l’anse Saint-Roch avait été édifiée pour s’y relaxer, prendre le soleil, se rafraîchir et même une jetée qui s’avançait en mer et une plage de sable. Un temps, il était possible d’y louer des pédalos. Seul handicap, il fallait se méfier des vives dont la nageoire dorsale occasionnait des piqûres douloureuses. En bordure de mer, rien des constructions touristiques actuelles, quelques petits bâtiments dont les habitants ne se rendaient même pas compte de leur privilège : la vue sur mer. C’était l’époque où le port Vauban n’existait pas encore et l’anse Saint-Roch avec sa faible profondeur, ses poissons et crustacés, était un véritable vivier. La nécessité d’adaptation de la ville au progrès a fait disparaître la plupart de ces témoins du temps d’autrefois. Mais les Antibois les gardent en leur mémoire.