Nice-Matin (Cannes)

Du centre ancien à La Bocca: retour sur l’histoire de l’abattoir de la ville

- Retrouvez notre rubrique hebdomadai­re qui fait la part belle au patrimoine local, dans les terres comme sur la frange littorale, grâce au récit méticuleux de Corinne Julien-Bottoni, passionnan­te historienn­e et guide conférenci­ère depuis  ans à Cannes, G

La rue de la Vieille-Boucherie évoque l’ancien masel médiéval. En latin, macellum signifie tuerie, qui deviendra par la suite, boucherie. Au XIIIe siècle, à Cannes, comme dans la plupart des cités médiévales, les bouchers qui formaient un important métier – le terme de corporatio­n n’étant pas encore instauré – s’étaient regroupés en un lieu bien défini où ils abattaient, dépeçaient et vendaient la viande aux habitants. L’eau des caniveaux déjà assez polluée préoccupai­t les municipali­tés successive­s. Lorsqu’il y avait pollution, les mégissiers et autres chevillard­s étaient aussitôt désignés.

Un premier transfert

Faisant suite aux réclamatio­ns assidues de la population, les édiles décidèrent de déplacer l’abattoir en le transféran­t sous le rempart du Suquet qui entourait encore le mont Chevalier. L’actuel boulevard Jean-Hibert accueillit donc ce nouvel édifice. Le centre-ville se trouvait ainsi libéré d’une activité qui, depuis des siècles, divisait commerçant­s et citadins. Il s’avérait cependant très difficile de traiter avec les bouchers qui étaient très puissants. En plus du commerce de la viande, ils tenaient aussi celui du cuir et du sel. La population les craignait surtout car leurs outils de travail, pouvaient se changer en cas de conflits et d’émeutes en armes redoutable­s. Le cadastre de Napoléon de 1812 indique bien l’emplacemen­t de la boucherie qui occupe toujours un espace important de la ville.

L’abattoir de la Bocca Au XIXe siècle, les politiques hygiéniste­s prônées par les différents gouverneme­nts incitèrent les municipali­tés à se pencher de nouveau sur la localisati­on des abattoirs. Il fallait absolument les éloigner des villes et aménager des structures couvertes, fermées et protégées. La ville acquit alors un terrain sur la route de Fréjus, au quartier de La Bocca, et entreprit la constructi­on d’un abattoir, au coeur du XIXe siècle, non loin de l’actuelle place Roubaud. Le centre-ville était ainsi libéré de cette tuerie quotidienn­e incompatib­le avec la vie d’une cité qui s’ouvrait au tourisme. Un plan de l’époque dévoile l’aspect de la façade principale du bâtiment. Les propriétai­res des maisons voisines s’élevèrent contre ce projet, mais l’édifice fut érigé et resta en activité jusqu’au début du siècle dernier, avant que de nouvelles réglementa­tions viennent modifier les conditions d’abattage du bétail. Un octroi se trouvait à proximité et était destiné à percevoir le droit sur les animaux vivants, abattus dans cet établissem­ent. Les bâtiments furent détruits avec le nouvel urbanisme en vigueur.

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(Photo Gilles Traverso) Aujourd’hui : avenue Francis-Tonner.
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Hier : la place de l’abattoir.
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