Nice-Matin (Cannes)

Mémoire de Grassois Sylvain Campana

- CORINNE JULIEN BOTTONI

Retrouvez cette rubrique qui donne la parole à un habitant de la cité des parfums ou du pays grassois. Aujourd’hui : Sylvain Campana, qui a, durant près de trois décennies, tenu le bar « Le Normandy », évoque la vie sur le boulevard du Jeu-de-Ballon.

Retourner sur le boulevard du Jeude-Ballon me rappelle de bons moments. Ça fait bientôt 20 ans que j’ai pris ma retraite, mais j’ai l’impression d’avoir quitté ce quartier hier, tant mes souvenirs demeurent vivaces » révèle Sylvain Campana, en évoquant «Le Normandy», un bar qu’il a tenu des années durant. Né le 18 février 1944 en terres piémontais­es, Sylvain est le petit dernier d’une fratrie de quatre enfants, composée de trois garçons et d’une fille. « Je suis arrivé à Grasse en 1950. En Italie, dans l’après-guerre, la vie était difficile pour mes parents, qui tenaient une épicerie-restaurant. Un oncle nous a fait venir à Grasse. Nous nous sommes alors installés à Saint-Antoine comme agriculteu­rs. Autour de notre maison, s’étendaient des champs de jasmin et de roses. On cultivait aussi du basilic pour répondre à la demande des parfumerie­s de la cité. » Après avoir fréquenté l’école primaire du hameau, Sylvain poursuit sa scolarité au collège Carnot, avant de passer son certificat d’études.

Réceptionn­iste à l’hôtel Beausoleil

« Le contact avec les gens me plaisait et je suis entré comme réceptionn­iste à l’hôtel Beausoleil, qui était alors une institutio­n grassoise. Je portais une livrée de groom, noire et mauve. Je faisais aussi office de barman. Tous les clients me connaissai­ent et je savais exactement ce qu’ils désiraient. » Après une dizaine d’années passées au Beausoleil, Sylvain décide de voler de ses propres ailes en prenant une affaire à son compte, à Valberg, accompagné de deux amis et de Christine, une jeune fille, guide touristiqu­e chez Fragonard, sa future épouse. « Nous passions l’hiver à la montagne et l’été, nous redescendi­ons à Cagnes-surMer, où nous gérions un restaurant. » Sylvain, en venant rendre visite à ses parents restés à Grasse, apprend que le bar « Le Normandy », sur le Jeu-deBallon, est à vendre. Désirant retrouver la cité qui l’a accueilli, il reprend aussitôt l’affaire.

Un client nommé Joe Dassin

« C’était un café qui existait depuis les années 1930. La personne qui l’avait créé avait travaillé sur le paquebot le Normandy. Le nom était ainsi tout trouvé pour l’enseigne du bar ! La clientèle se composait surtout de jeunes et nous étions ouverts jusqu’à deux heures du matin. » À l’époque, de nombreux artistes viennent se produire au palais des Congrès et au théâtre de Verdure. Sylvain et Christine reçoivent régulièrem­ent la visite de Serge Reggiani, Michel Sardou, Bernard Blier, des Compagnons de la Chanson et de Joe Dassin. « Je me souviens surtout de Joe, qui était d’une simplicité et d’une gentilless­e infinies. Il garait sa Mercedes devant le bar et s’asseyait en terrasse. Je choisissai­s un de ses succès dans le jukebox, croyant lui faire plaisir, mais il était tellement humble qu’il en était gêné. » Au bout d’une trentaine d’années passées dans les murs du « Normandy », le couple décide de prendre une retraite bien méritée. L’affaire est alors vendue et change de nom pour devenir la pizzeria Napoli. Aujourd’hui, Sylvain et Christine vivent au Plan-de-Grasse, quartier de la Paoute. Si Sylvain aime entretenir son jardin et cultiver son potager, son épouse se consacre à la lecture et au tricot. Tous deux apprécient les voyages et l’histoire locale. Leur fils vit à Paris, leur fille à Nîmes. Ils sont aussi les heureux grands-parents de trois petits enfants. Le couple a gardé de nombreux amis dont la plupart ont tenu des commerces à Grasse, tels Francis Fantino, le patron des Producteur­s Réunis. « C’est formidable de se retrouver en lisant Nice-Matin. On reconnaît un ami que l’on avait perdu de vue et tout notre passé ressurgit alors ! »

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Hier : Sylvain à gauche, Lucie sa soeur et ses deux frères Laurent et Bernard entourant leur père. Aujourd’hui: dans son potager, il renoue avec le travail de la terre.
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(Photos DR et C.J.-B.)

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