Le préfet de police se défausse sur l’Elysée
Le ministre de l’Intérieur a nié hier avoir commis une quelconque faute dans la gestion de l’affaire Benalla. Entendu pendant près de deux heures et demie par la commission des Lois de l’Assemblée nationale, dotée de prérogatives d’enquête, Gérard Collomb, appelé à la démission par des personnalités de droite comme de gauche, a dû affronter un feu nourri de questions des députés. Il a affirmé avoir été informé le lendemain des faits par son cabinet de l’existence de la vidéo sur laquelle on voit Alexandre Benalla frapper et malmener deux manifestants en présence d’un employé de La République en marche (LREM), Vincent Crase, lui aussi «obser- vateur».
« C’était à eux de prendre les sanctions »
Mais il a estimé que ce n’était pas à lui de saisir la justice de ces actes qu’il a de nouveau condamnés «avec la plus grande fermeté» .« Ce n’est pas au ministre qu’il appartient de le faire. (...) Je considère que c’est à ceux qui sont en responsabilité dans leurs administrations, au plus près du terrain, de recueillir les éléments permettant de justifier la transmission d’un signalement au titre de l’article 40» du Code de procédure pénale, a-t-il déclaré. Le 2 mai, «je m’étais assuré que tant le cabinet du président de la République que le préfet de police avaient été destinataires de l’information. Je pensais, comme c’est la règle, que les mesures appropriées avaient été prises. C’était à eux de prendre les sanctions et éventuellement d’informer les autorités judiciaires», a souligné Gérard Collomb. Le préfet de police, Michel Delpuech, entendu en début d’après-midi par la même
commission, a contesté ce point de vue, rappelant être «sous l’autorité des autorités exécutives». Après avoir appris l’existence de la vidéo le 2 mai, il a contacté le ministère de l’Intérieur, qui lui a répondu être «déjà en liaison» avec la présidence de la République. Dès lors, «il était établi pour moi que le sujet Benalla était traité par l’autorité hiérarchique dont il dépendait», a-t-il poursuivi.
«Dérives individuelles inacceptables »
De même, alors que Gérard Collomb a contesté connaître Alexandre Benalla, dont il ignorait les fonctions même s’il l’a forcément «croisé» lors de la campagne électorale d’Emmanuel Macron, le préfet a assuré que ce chargé de mission à l’Élysée «était un interlocuteur connu». Par ailleurs, le préfet «assume» avoir autorisé Alexandre Benalla à porter une arme, sans que le cabinet du ministre de l’Intérieur
n’en soit avisé, comme l’a indiqué plus tôt Gérard Collomb. Michel Delpuech l’a expliqué après une demande de l’Élysée, « dans le cadre des fonctions liées à la sécurité qu’exerçait M. Benalla ». Enfin, Michel Delpuech, a dénoncé des «dérives individuelles inacceptables, condamnables, sur fond de copinage malsain ». Il a ensuite indiqué que le « copinage »dénoncé visait avant tout les trois fonctionnaires de la Direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC) de la préfecture de police mis en examen et Alexandre Benalla. Le directeur de cabinet d’Emmanuel Macron, Patrick Strzoda, sera auditionné aujourd’hui à 16 h 30 par la commission qui entendra lundi la cheffe de l’Inspection générale de la police nationale, Marie-France Monéger-Guyomar’ch, ainsi que Stéphane Fratacci, directeur de cabinet du ministre de l’Intérieur.