Nice-Matin (Cannes)

À Monaco, il a trouvé sa plus belle clientèle

- CEDRIC VERANY

L’émotion et la discrétion. L’annonce de la disparitio­n du chef hier matin, à l’hôtel Métropole , son QG depuis presque quinze ans en Principaut­é, a été une onde de choc. « Les équipes sont bouleversé­es, nous pensons à sa famille », confie la direction, avec pudeur. En coulisses, on savait son état de santé

‘‘ fragile, mais les équipes voulaient croire à une guérison. Car à chacun de ses passages en Principaut­é, l’oeil attentif et bienveilla­nt de Monsieur Robuchon donnait le change des cuisines à la salle, où aucun détail ne lui échappait.

« Qu’on ne vienne pas chez nous comme on va à la messe » Ses séjours monégasque­s étaient réguliers dans son tour du monde annuel pour suivre le quotidien de ses restaurant­s. À Monaco, il se sentait toujours « libre et détendu » confiait-il un jour, pour une interview, au bar de l’hôtel, dans le petit salon à droite de l’entrée, où se situait sa table préférée. L’aventure monégasque de Robuchon démarre en 2003. Il reçoit la propositio­n de la famille Boustany d’ouvrir un restaurant dans l’hôtel Métropole qu’ils sont entrain de rénover entièremen­t. L’année suivante, l’établissem­ent ouvre ses portes à un jet de pierre de la place du Casino. Le chef devient l’un des artisans de la mue du palace, avec un restaurant à son nom, une des adresses les plus courues de la Principaut­é. « La famille Boustany m’a proposé de faire un restaurant convivial, pas guindé, sans cérémonial. Que ce ne soit pas pompeux comme certains étoilés. Le cahier de route était : qu’on ne vienne pas chez nous comme on va à la messe », racontaiti­l en 2014, pour fêter sa décennie monégasque. Le restaurant obtient deux étoiles au guide Michelin en deux ans. « Ce n’était pas prévu. Je me suis fait un peu tirer les oreilles, mais nous sommes restés dans cette atmosphère décontract­ée ». Épaulé par son bras armé en Principaut­é, le chef Christophe Cussac, le chef Robuchon imagine deux nouvelles tables pour le Métropole. Ce sera le Yoshi en 2007 – étoilé l’année suivante – inspiré de sa passion pour la gastronomi­e japonaise. Et l’Odyssey en 2013, réalisé par la complicité de Karl Lagerfeld.

« On ne trompe pas la clientèle avec de la poudre de perlimpinp­in » À chaque fois des créations, « car Monaco est le seul endroit du monde ou l’on peut faire ça », assurait-il, en évoquant son parcours en Principaut­é, où il disait avoir trouvé la plus belle clientèle au monde, «une clientèle vraie sur le plan gustatif, qu’on ne trompe pas avec de la poudre de perlimpinp­in. Ils veulent la vérité dans l’assiette ». C’est cette vérité dans l’assiette qu’il partageait avec Alain Ducasse. Les deux hommes avaient d’ailleurs cuisiné à quatre mains en 2011 à Monaco le brunch du mariage du prince Albert II et de la princesse Charlène servi dans les jardins du Palais. Une belle reconnaiss­ance pour celui qui se disait monégasque de coeur.

Ils veulent la vérité dans l’assiette ”

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