Nice-Matin (Cannes)

Grain de sable à Bijou Plage

S’estimant injustemen­t évincée de la plage que sa famille exploitait depuis une trentaine d’années, la gérante refuse de partir et a introduit un recours devant le Conseil d’État

- ALEXANDRE CARINI

Amère ironie de l’histoire. À l’entrée de Bijou Plage, une affiche promotionn­elle de la série Demain nous appartient, avec Ingrid Chauvin. L’actrice est une habituée de l’établissem­ent situé à la Pointe Croisette. Mais le titre de la fiction de TF1 prend désormais une résonance toute particuliè­re pour la maîtresse des lieux, tant son avenir y est pour le moins incertain. Depuis le 17 juillet dernier, Nathalie Di Sotto risque l’expulsion pure et simple de sa plage. Du jour au lendemain. À l’unanimité, le conseil municipal a décidé d’attribuer l’exploitati­on de Bijou Plage à un nouveau concession­naire, le restaurate­ur Patrice Pittavino (notre édition du 18 juillet). Une rupture avec l’histoire de ces trente dernières années, sur cette plage atypique et familiale. Depuis l’arrivée sur la Croisette de Gaetane Lepore, en provenance de St-Etienne, dont la personnali­té avait insufflé une identité propre.

« On ne nous a pas laissé notre chance »

Un sens de l’accueil, transmis de grand-mère à mère et petite-fille. « Adolescent­e, J’y suis d’abord venue l’été pour y passer des vacances, mais pour ma grand-mère, il n’était pas question que je me tourne les pouces. Alors j’ai tout de suite fait la vaisselle, puis assuré le service et installé les matelas», se souvient Nathalie. C’est dire si le sable de Bijou Plage fait partie de son ADN ! Au conseil, le maire David Lisnard s’est dit « chagriné » que la candidatur­e des exploitant­s sortants n’a pas pu être examinée, pour raison légale : « Le fait que les redevances dues à la collectivi­té ne soient pas réglées ne rend pas possible l’examen de la candidatur­e ». Une « justificat­ion » qui fait bondir l’intéressée. « Nous ne sommes pas des mauvais payeurs !!!, affirme-t-elle, sans nier des difficulté­s financière­s. Nous avons connu une année 2014 très compliquée, mais malgré les intempérie­s de 2015, nous nous sommes efforcés d’épurer progressiv­ement notre dette. L’an dernier, nous avons encore signé un chèque de 82 000 € pour payer notre redevance à la mairie, souligne Nathalie. Quant à notre dossier de candidatur­e, il bénéficie de l’apport de nouveaux investisse­urs, dont un brasseur qui apporte 100 000 € dans l’affaire, et des garanties financière­s pour l’avenir. Et pourtant, notre dossier est écarté sans être examiné, on ne nous laisse même pas notre chance ! ».

Bijou plutôt que Bobo plage

Placée en redresseme­nt judiciaire par un administra­teur, sommée de donner les clés à son successeur désigné, Nathalie n’entend pas pour autant plier les parasols de Bijou Plage. La voilà qui fait de la résistance, et son personnel avec. D’autant plus que le projet présenté par le nouveau concession­naire ressemble en tout point au sien, avec l’obligation de garder le caractère et le nom de Bijou Plage ! « Si on est si mauvais, pourquoi nous garder comme référence ?!». Après un référé suspensif rejeté par le tribunal administra­tif, Nathalie Di Sotto en appelle désormais au Conseil d’État pour faire annuler la délibérati­on contestée, tant sur le fond que sur la forme. «À l’annonce du changement à la plage, il y a eu soudain un orage », conclut-elle. Signe du ciel ne trompe pas ?

‘‘ Nous ne sommes pas des mauvais payeurs ! ”

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(Photo G.T.) Nathalie, toujours à pied d’oeuvre sur le sable de Bijou Plage, « malgré une épée de Damoclès audessus de la tête. Mon dossier n’a pas réellement été pris en compte », estime-t-elle.

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