Benjamin Griveaux: «Lutter contre les conservatismes»
Le porte-parole du gouvernement, en villégiature dans le Var, reste « connecté », vante « l’état d’esprit » macroniste et la poursuite des transformations
Quasiment le même âge, la même volonté affichée que le Président dans ses propos. Benjamin Griveaux a marché dans les pas du candidat Macron et semble s’être glissé dans le même costume, en offensif porte-parole du gouvernement depuis décembre 2017. Depuis le golfe de Saint-Tropez, entre Grimaud et Ramatuelle, il continue à guetter les soubresauts de l’actu : «Impensable de ne pas rester connecté. J’ai une fonction très transversale, il faut avoir dans le viseur les sujets brûlants. » Comme la canicule, avec une « ultra grosse gestion sur la vigilance ». L’un de ses derniers tweets, le 12 juillet, relayait le plan sur la limitation du plastique, «le plus ambitieux en terme de protection de la biodiversité ». Naturellement, Benjamin Griveaux se dit horrifié par le drame de Gênes. « C’est une terrible tragédie. Je pense d’abord aux victimes et à leurs proches. La seule chose que nous puissions faire, c’est apporter toute l’aide technique et matérielle dont nos amis italiens ont besoin. Aujourd’hui c’est le temps du deuil ; celui de l’enquête pour connaître la vérité viendra. »
Réformes : « On va continuer sans ralentir »
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Présent au concert de Julien Clerc à Ramatuelle, et touché par la prestation de Simon Ghraichy au festival des Nuits du château de la Moutte, il a accepté cette entrevue. Pourquoi ? «On arrive à la moitié du mois, on est déjà dans la préparation de l’après, on a eu une année d’intense activité. » Un sprint à perdre haleine… «Un sprint, ça a une fin ; on va continuer sans ralentir», lâche-t-il avec le sens de la formule. La rentrée chargée avec les dossiers de la dépendance, l’assurance-chômage, l’apprentissage, la réforme institutionnelle. « Notre conviction, c’est que les Français attendent les transformations. Ils avaient perdu l’habitude d’un pouvoir politique qui fait des choses, que l’on soit d’accord ou pas, d’ailleurs. » Il n’a rien loupé de l’échange musclé de Nicolas Hulot s’écharpant avec Brigitte Bardot. «Le soleil varois échauffe les esprits », souritil. Un ministre de l’Écologie sur tous les fronts en ce mois d’août, défend-il.
■ Environnement : « On n’a pas attendu le procès Monsanto »
Sur le front du glyphosate, notamment. Le porte-parole reprend l’historique : «Le texte de Bruxelles autorisait le glyphosate pour 15 ans. On l’a ramené à cinq [au niveau européen, Ndlr] . Et le Président l’a ramené à trois ans sur le territoire national. » Au passage, Benjamin Griveaux fustige le recul sur #EGalim, le projet de loi Agriculture-alimentation, « défait par le Sénat en supprimant l’interdiction de vendre le produit et le conseil de manière liée. C’est comme si le médecin vendait les médicaments !» Selon lui, l’oeuvre d’«un conservatisme et d’une faiblesse à l’égard des lobbies, alors que les Français sont prêts à ce changement. Il y a des forces qui ne veulent pas le changement, car elles en vivent grassement. Donc, on va réintroduire l’ensemble du texte lors du passage devant l’Assemblée nationale. » Il accorde au passage « un vrai crédit à Nicolas Hulot. Il a été beaucoup attaqué pour son action », mais, énumèret-il, « on ne fait pas NDDL [l’aéroport de Notre-Damedes-Landes, Ndlr] ; la fermeture de [la centrale nucléaire de] Fessenheim est programmée ; plus de centrale à charbon en 2022. Quand on refait le film, les dossiers environnement ont avancé en une année. On n’a pas attendu le procès Monsanto. L’Institut national de la recherche agronomique et les industriels sont autour de la table pour trouver un modèle alternatif aux produits chimiques. »
■ Emploi et éducation : « Les promesses de CDI au plus haut »
S’il ne commentera pas la baisse du chômage selon l’Insee, tombée ce matin du 14 août, il remarque «une bonne nouvelle : depuis 11 ans, jamais il n’y avait eu autant de promesses d’embauche en CDI. » Et d’enchaîner sur l’éducation : « Tout le projet du Président repose sur l’éducation et le travail. Là, on a les premiers résultats sur les classes [à l’école primaire, Ndlr] divisées par deux, c’est spectaculaire. Les enfants ont rattrapé leur retard. Il n’y a plus de différences. »
■ L’Aquarius : « La solution passe par l’Europe »
Autre question d’actualité de ces dernières heures : l’Aquarius. Pourquoi la France n’accueille-t-elle pas le bateau et ses réfugiés ? « Parce que la réponse à ce type de situation ne peut être qu’européenne. Les nationalistes comme [le ministre de l’Intérieur italien] Matteo Salvini, qui pensent pouvoir régler la question migratoire en se repliant sur eux-mêmes, sont dans la plus pure démagogie. Ils mentent à leur peuple et instrumentalisent cyniquement la détresse des migrants. La coopération européenne, c’est ce qu’Emmanuel Macron a fait immédiatement avec le Premier ministre maltais, le pays le plus proche pour faire accoster l’Aquarius. Ensuite, il faut pouvoir traiter au cas par cas et nous envoyons pour cela une mission de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides pour identifier les demandeurs d’asile. La France en accueillera 60, près de la moitié. Les autres le seront par l’Espagne, le Portugal, l’Allemagne et le Luxembourg. C’est cela l’Europe : travailler ensemble pour apporter des solutions humaines et concrètes. »
■ Affaire Benalla : « Pas de questions illégitimes »
Sur l’emballement médiatique autour de l’affaire Benalla, il regrette « les conneries écrites – non, il ne vivait pas dans un appartement de 200 m2, mais de 80 m2. Et non, parce qu’il n’y a jamais emménagé –, des petites imprécisions qui entretiennent une atmosphère», estime celui qui découvrait l’affaire dans les médias. Pour le flottement au sommet de l’État pendant cinq jours, il se retranche derrière la séparation des pouvoirs : « On a pris le parti d’attendre que le juge ait décidé de la mise en examen. On a alors pu s’exprimer. Qu’aurait-on dit dans le cas contraire !» se défend le porte-parole, qui en filigrane, a tiré une leçon personnelle de cet épisode : « Être encore plus réactif sur des questions qui se posent, légitimes. Il n’y a pas de questions illégitimes… »
Attractivité de la France : « Le plus impressionnant »
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« Sans doute le changement le plus impressionnant », évoque-t-il avec l’arrivée symbolique, le 1er janvier 2019, de l’Autorité bancaire européenne à Paris, pour devenir, avec l’implantation de banques internationales, la capitale financière de l’Europe. « En misant aussi sur la finance verte, ce serait intéressant. » Alors, Emmanuel Macron, président des riches ? «Les riches n’ont pas besoin de président, assène-t-il. Les investisseurs veulent un cap. Le président est celui de tous les Français, ils lui reconnaissent l’énergie et l’envie de faire. » Presque un autoportrait, semble-t-il, de Benjamin Griveaux lui-même. Celui qui, est aujourd’hui porte-parole sera peut-être bientôt candidat aux municipales à Paris.