De la graine au pain avec les paysans boulangers
Installés en agriculture biologique à Tourves dans le Var, Blandine et Vincent font leur pain à partir de variétés de blé ancien. De la production à la commercialisation, ils maîtrisent deux métiers et construisent leur avenir
De la graine au pain comme de A à Z, Vincent et Blandine Arcusa maîtrisent leur activité, du champ au fournil, en pleine Provence Verte. Ils se sont rencontrés durant leurs études d’ingénieur agronome à Rennes et ont saisi l’opportunité de pouvoir travailler sur des terres familiales en 2013. « Mon arrière-grand-père travaillait à la bastide de La Reyne et à Vaubelle, une ancienne magnanerie à Tourves. Quand ma grand-mère nous a proposé de récupérer des parcelles, on n’a pas hésité », explique Blandine Arcusa. Elle s’est installée comme jeune agricultrice en mars 2014. Vincent, conjoint collaborateur, songe à le faire aussi. Le couple loue désormais 21 hectares de champs sur lesquels il cultive des variétés anciennes de céréales, après avoir bien enrichi et préparé les sols avec des légumineuses ou du fumier de cheval composté selon les terres. « On a choisi six variétés de blés, dont trois pour les tester. Elles sont rustiques, plus adaptées au terroir. » Blés tendres ou durs, certains ont de jolis noms, tels que rouge de Bordeaux ou khorasan (appelé aussi kamut). Les deux trentenaires produisent aussi du seigle et du petit épeautre pour le pain, des pois chiches pour la vente et du sainfoin pour le fourrage… Cette saison, le climat ne leur a pas simplifié la tâche. La sécheresse de 2 017 les a obligés à décaler les semis beaucoup plus tard (le petit épeautre et le seigle en novembre, au lieu de septembre, le blé début janvier au lieu de mi-octobre, mi-novembre). Et cet été 2018, les orages les ont contraints à étaler les moissons sur plus de trois semaines, au lieu de huit à quinze jours.
Un projet de vie, du champ au fournil
« On a commencé à moissonner le 20 juillet. On a débuté par les blés tendres, remarque Blandine Arcusa. Les premiers semés (seigle et petit épeautre) sont les derniers moissonnés. À cause des conditions météo, la récolte est moyenne, surtout pour ces deuxlà. » Mais comme ils ont semé sur davantage de surface (10 hectares), cela devrait leur suffire. Les grilles de leur moissonneuse, un vieux modèle acheté 3 500 €, séparent les épis des grains. Les céréales sont mises dans des gros sacs de 600 à 800 kilos, stockés sur des palettes dans le bâtiment en bois qu’ils ont construit sur l’exploitation et qui est alimenté par des panneaux solaires. Ces stocks sont utilisés selon les besoins de la transformation, des grains à la farine, de la farine au pain. La production est commercialisée en circuit court, dans les magasins de vente collectifs bio et quelques AMAP (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne). Les paysans boulangers participent aussi à des marchés de producteurs locaux. Ils valorisent tout : les épis et les tiges sont assemblés en bottes de 15 kilos, grâce à une petite presse. Cette paille se vend très bien, avec le développement de la permaculture et du maraîchage dans le Var. Parallèlement, ils ont construit leur fournil. « On espère faire notre pain chez nous au printemps prochain ». Regardant plus loin, ils imaginent déjà un laboratoire pour se diversifier. Ils construisent leur avenir à la force du poignet, partageant la passion de leurs deux métiers. Ce projet de vie repose sur des convictions et valeurs communes faites de respect de l’homme et de l’environnement, de transmission aussi. Vincent est impliqué dans la Confédération paysanne, alors que Blandine a été élue présidente d’AgribioVar.