La rue des Augustins et l’essor des ordres mendiants
Retrouvez chaque samedi la nouvelle formule de notre rubrique «Résurgences». Notre passionnante historienne et guide conférencière, Corinne Julien-Bottoni vous emmène dans les souvenirs de notre patrimoine Grasso-Cannois. Un rendezvous agrémenté de clichés anciens présentés en miroir avec une photo du site actuel.
Plus que toute autre période, le Moyen-Âge est celle des religieux et des moines. À l’époque, point de ville sans monastère, point de campagne sans abbaye. La multiplication des congrégations est particulièrement importante du XIe au XIIIe siècle. Le nombre des couvents installés va de pair avec la richesse et la densité démographique de la ville considérée.
Un nouvel apostolat
Apparentés comme les Dominicains et les Cordeliers aux ordres mendiants, les Augustins s’établissent à Grasse dans le courant du XIIIe siècle. Leur façon de subsister par la quête et non par la perception de dîmes et autres impôts, frappe les contemporains. La ville appelle un nouvel apostolat et ce sont les Mendiants qui vont le réaliser en répondant au besoin spirituel que les laïcs d’alors ne trouvent plus dans le clergé existant. Derniers arrivés à Grasse, les Augustins se logent dans l’espace laissé libre par les deux autres ordres, en construisant leur église dès , sur l’emplacement d’un jardin situé hors les remparts de la ville. Les bâtiments cultuels seront ensuite intégrés dans la nouvelle enceinte du XIVe siècle, pour des raisons de sécurité évidente. Les couvents modèlent la nouvelle morphologie de Grasse au XIIIe siècle. Sa situation économique lui permet de «supporter» trois couvents mendiants. La cité représente alors le prototype parfait d’une ville médiévale de quatre à six mille âmes, capable de subvenir aux besoins de ces ordres religieux récemment établis.
Une reconstruction sous l’Ancien-Régime
Endommagée lors des guerres de la Ligue, durant les XVIe et XVIIe siècles, l’église des Augustins est ensuite reconstruite. Sur l’encadrement d’une fenêtre en plein cintre demeure gravée dans la pierre, le millésime et les lettres S et A de «Sancti Augustini». Vendus aux enchères à la Révolution, les anciens bâtiments cultuels sont successivement occupés par un atelier de parfumerie, puis par un théâtre avant de céder la place à une salle de cinéma, le Rex. Le nom de la rue évoque encore l’importance de l’ordre mendiant au sein de la société médiévale. Aujourd’hui, le Crédit Agricole s’élève sur l’emplacement de l’église dont on peut toujours voir le chevet en empruntant le passage du théâtre.