Nice-Matin (Cannes)

Et si la clé de l’énigme se trouvait en Pologne ?

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Côté pile, le consul honoraire de Pologne se présentait comme un businessma­n à succès. Côté face, c’était un industriel raté. Un à un, ses fumeux investisse­ments ont été démontés par la minutieuse enquête de la PJ. Alors même que sa belle-mère versait au couple 500 000 € par mois, Wojciech Janowski tirait le diable par la queue. Selon les enquêteurs, il puisait sur les comptes de sa compagne Sylvia, dans son dos, pour se renflouer de ses pertes. « Il faisait de la cavalerie, ce qui permettait de faire attendre l’un pour payer l’autre », témoignera-t-elle après avoir découvert le pot aux roses. Le plus calamiteux de ses investisse­ments est sans conteste la raffinerie Glimar. Ce complexe pétrochimi­que, situé dans le sudest de la Pologne, dans la ville de Gorlice (30 000 habitants), fut à la belle époque la cinquième raffinerie du pays. Elle produisait alors près de 3 400 barils par jour.

L’odeur sulfureuse de la mafia

Sauf que, lorsque Wojciech Janowski s’y intéresse au détour de 2011, ce n’est plus qu’un site perclus de rouille, livré aux herbes folles. Les six cents salariés ont été licenciés et plane sur sa gestion une odeur de soufre, celle de la mafia polonaise. À tel point qu’en 2009, Barbara Bartus, députée de la Diète, une des deux chambres du Parlement polonais, s’était alarmée de la situation après le décès suspect d’un inspecteur de la Chambre suprême de contrôle. Venu en mission pour investigue­r sur la faillite, il avait été retrouvé mort. « J’ai la conviction que la faillite de Glimar est liée à la mafia », écrivait la parlementa­ire au ministre de la Justice. Voilà le contexte dans lequel le consul honoraire débarque avec ses souliers vernis, sur un site quasi à l’abandon. Pour le racheter – pour la coquette somme de 30 millions de dollars – il crée une coquille vide au Canada, la Hudson Oil Corporatio­n. « La société n’aurait jamais disposé de plus de 50 000 dollars canadiens », notent les enquêteurs qui ont épluché les comptes de cette entité fantôme. Gregorz Wojatszek, le vendeur, constate assez rapidement qu’il a été payé en monnaie de singe – des actions sans valeur [(ce que dément Janowski, ndlr) – et saisit la justice. Des démêlés en eaux troubles que le consul honoraire se garde bien de révéler à sa compagne Sylvia. «Wojciech m’a demandé d’ouvrir un compte Ratkowski bis, spécialeme­nt par rapport à cette société Hudson Oil. Je n’ai jamais regardé les relevés de ce compte. Ce que je peux vous dire c’est que je l’ai clôturé après la garde à vue, il était débiteur », a-t-elle témoigné face aux enquêteurs. Janowski, qui court d’un côté les galas les plus huppés en Principaut­é, se débat de l’autre dans le bourbier polonais.

Un assaut de cent mercenaire­s

Par deux fois, en 2011 et 2012, un tribunal de commerce polonais le contraint à payer les 30 millions de dollars du prix de vente. Lassé de ces atermoieme­nts, le vendeur décide finalement de récupérer son bien. Et l’épisode est tout bonnement incroyable. Le 9 janvier 2012 au petit matin, armés jusqu’aux dents et encagoulés, une centaine de mercenaire­s d’une société privée lancent l’assaut sur l’usine. Manquant de déclencher une fusillade, ils maîtrisent la dizaine de gardiens présents sur le site. Le coup de force terminé, ils rendent les clés à Gregorz Wojatszek. Ce dernier n’en démord pas : «Le motif de l’assassinat de madame Pastor était la situation qui était survenue à la suite des condamnati­ons prononcées.» Selon lui, Wojciech Janowski était acculé, incapable de payer les 30 millions – menacé ? – et craignait que ses déboires ne finissent sur la place publique. Gregorz Wojatszek affirme que Janowski a pu planifier l’assassinat de sa belle-mère pour se sortir de ce marasme. Depuis ces faits, l’usine Glimar est toujours à l’abandon. Les riverains, qui manifesten­t régulièrem­ent, la qualifient de « bombe écologique ».Des fuites d’acide y ont été détectées et plus aucun poisson ne nage dans la rivière voisine, contaminée. Mais que diable allait faire le consul honoraire dans cette galère ?

 ??  ?? La raffinerie Glimar est depuis toujours à l’abandon. En janvier , l’ancien propriétai­re envoyait une centaine de mercenaire­s pour récupérer son usine des mains de la société de Janowski. (Photo Gorlice)
La raffinerie Glimar est depuis toujours à l’abandon. En janvier , l’ancien propriétai­re envoyait une centaine de mercenaire­s pour récupérer son usine des mains de la société de Janowski. (Photo Gorlice)

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