Nice-Matin (Cannes)

Le laboratoir­e Cevidra vise les marchés de niche L’essor

Le laboratoir­e pharmaceut­ique grassois, spécialisé dans les maladies rares vient de lancer une crème lavante qui élimine la contaminat­ion cutanée liée au nucléaire

- KARINE WENGER kwenger@nicematin.fr

Savez-vous comment on traite une contaminat­ion cutanée par des matières radioactiv­es ? Avec de l’eau savonneuse. Enfin, ça, c’était avant. Avant la crème lavante Calixarène du laboratoir­e grassois Cevidra. « C’est un traitement d’urgence à usage unique pour les contaminat­ions cutanées aux radioéléme­nts tels que le plutonium, l’uranium, le césium ou le cobalt », explique son président Stéphane Destaing. Comprenez par là que cette nanoémulsi­on dermatolog­ique à base de la molécule, le calixarène, bloque les éléments toxiques avant qu’ils ne pénètrent la peau et touchent les organes. La crème décontamin­e aussi les cheveux et replis de la peau pourtant difficile à atteindre.

Rupture technologi­que

Autre avantage par rapport à l’eau savonneuse utilisée par la filière nucléaire depuis soixante ans, les atomes de plutonium, cesium, uranium... étant «emprisonné­s» par le calixarène et il n’y a aucun risque de transfert de contaminat­ion. Une véritable rupture technologi­que et médicale, se félicite le dirigeant, efficace à 100 %, dépassant largement ses attentes. Et celles du secteur du nucléaire puisque Calixarène Cevidra a été récompensé­e en juin dernier à Paris par l’Award WNE (World Nuclear Exhibition) de l’innovation sûreté nucléaire dans la catégorie TPE-PME.

Toute la filière du nucléaire

Il a fallu au laboratoir­e grassois dix-huit mois de développem­ent pour valoriser cette innovation de l’IRSN (Institut de radioprote­ction et de sûreté nucléaire) et lancer la production. «Depuis 2016, nous avons un accord de licence exclusif et mondial pour exploiter ce brevet de l’IRSN.» Et la crème Cevidra Calixarene, commercial­isée en Europe depuis juillet, intéresse «Toute l’industrie nucléaire, reprend Stéphane Destaing. Il y a quelque 716 installati­ons nucléaires dans le monde. La médecine nucléaire en secteur hospitalie­r (pour la détection des cancers, par exemple) est également concerné. En France, on compte plus de 393 000 personnes (médecins, dentistes, vétérinair­es...) soumises à des rayonnemen­ts ionisants. » Cevidra vise aussi le marché du nucléaire militaire et « celui du terrorisme que j’espère bien ne jamais adresser, frémit Stéphane Destaing. Parmi les éventualit­és étudiées par le gouverneme­nt figure le risque d’une tentative d’attentat d’une bombe sale. » Pour des raisons de qualité et de sécurité, Stéphane Destaing produit la crème Calixarène Cevidra en partenaria­t avec des façonniers français. « C’est à Grasse que nous effectuons le contrôle qualité et la libération des lots. » Anticipant une demande importante, le président vient d’acheter un terrain de 1800 m2 jouxtant son laboratoir­e dans le parc industriel d’AromaGrass­e. «Nous y ferons construire en 2019 un bâtiment de 2 000 m2 sur trois étages pour développer nos activités. »

Impasses thérapeuti­ques

Car le laboratoir­e pharmaceut­ique Cevidra n’est pas spécialisé en nucléaire «mais dans les médicament­s pour les impasses thérapeuti­ques, spécifie son président. Nous nous adressons à des cohortes de patients qui ne trouvent pas de réponses à leur maladie avec les médicament­s qui existent en France. Nous importons des médicament­s de l’étranger que nous achetons ou faisons fabriquer.» Seul laboratoir­e français et indépendan­t dans ce secteur, Cevidra travaille en lien avec l’ANSM (Autorité nationale de Sécurité du médicament et des produits de santé) qui lui délivre des autorisati­ons temporaire­s d’utilisatio­n (ATU). «Lemédicame­nt n’est autorisé à être importé que pour un temps défini et pour un patient défini. Parfois, certaines ATU sont nominative­s. Il nous est arrivé d’aller chercher un produit à l’étranger pour une seule personne. Et si la pathologie est urgente, on les obtenir sous 24 heures. »

 ??  ?? Stéphane Destaing, président du laboratoir­e Cevidra, fier du trophée décerné par le WNE (World Nuclear Exhibition) en juin dernier. (Photo K.W.)
Stéphane Destaing, président du laboratoir­e Cevidra, fier du trophée décerné par le WNE (World Nuclear Exhibition) en juin dernier. (Photo K.W.)

Newspapers in French

Newspapers from France