La semaine de Roselyne Bachelot
Lundi
L’Église catholique fait paraître un ouvrage de pages pour expliquer pourquoi elle est opposée à l’assistance médicale à procréation aussi bien pour les couples hétérosexuels qu’homosexuels. Dont acte. Se reconnaîtront dans ces objurgations les fidèles, de moins en moins nombreux, qui veulent bien concéder un magistère moral à l’Eglise dans le domaine de la protection des droits de l’enfant. On eut aimé que les crimes abominables attentatoires à la dignité de l’enfant commis par de nombreux prêtres n’aient pas été couverts continument par la hiérarchie catholique, y compris au Vatican. On eut aimé que la prévention de ces crimes et l’accompagnement des victimes fassent l’objet d’autant de sollicitude. On eut aimé que les couples infertiles qui ont eu ou auront recours à la PMA ne soient pas disqualifiés dans un texte qui, sous le couvert de la compassion, est d’une violente inhumanité.
Mardi
Les ministres Agnès Buzyn et Gérald Darmanin présentent le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour . Miracle, s’esbaudit le bon peuple, il n’y a plus de « trou de la Sécu ». Mais comment ce tour de force est-il possible ? On se pose la question. Mieux, les commentateurs qui ne jurent que par l’augmentation de la dépense publique entonnent l’antienne : vous voyez bien que les apôtres de la rigueur vous ont menti et qu’il était bien inutile d’en appeler à la retenue. Certains imaginent déjà l’utilisation possible des M€ « d’excédent ». Ce qui est amusant est de considérer les raisons de cet assainissement. Il ne faut pas le chercher
du côté de l’assurance-maladie toujours en déficit, mais du côté de l’assurance-vieillesse et cela massivement grâce à la réforme Fillon de qui a porté l’âge de la retraite à ans, ensuite à la future désindexation des pensions qui limitera leur progression à , % dans un contexte d’inflation à , %. Le comique de l’affaire est que ceux qui, pour pousser à la dépense, utilisent bruyamment ce retour à l’équilibre sont précisément ceux qui ont combattu non moins bruyamment les réformes qui l’ont permis.
Mercredi
Jeremy Corbyn prononce, aujourd’hui, le discours de clôture du Parti travailliste à Liverpool. Il sera peutêtre le prochain occupant du , Downing Street tant Theresa May est en perdition. L’erreur fondamentale de cette dernière a été de penser qu’il y aurait négociation avec l’Union européenne. Or la négociation est impossible : c’est comme si le conjoint demandant le divorce exigeait de celui qui reste dans l’appartement d’en changer le plan de fond en comble ! Il peut, à la rigueur, demander d’occuper la chambre de bonne en attendant de trouver un logement…et encore. Par ailleurs, les Britanniques avaient misé sur la division de l’Europe. Or les Européens ont fait preuve d’une unité qui les a surpris eux-mêmes. Ils ont pour cela, un négociateur hors pair, Michel Barnier, qui ne met aucun affect dans les discussions à la tête d’une équipe qui constate chaque jour l’impréparation de leurs interlocuteurs. Outre-Manche, on a parié que les Européens allaient se trainer à leurs pieds sur l’air de Ne me quitte pas et ils entendent On s’est aimé comme on se quitte. Pour autant, Corbyn ne sera pas mieux loti car il sera piégé dans une contradiction majeure. Comme l’explique Marc Roche dans son livre Le Brexit va réussir (Ed. Albin Michel), la Grande-Bretagne peut s’en sortir en faisant de ce pays un état-voyou, une plate-forme dérégulée aux portes de l’Union européenne, débarrassée de normes sociales et environnementales. Corbyn promet précisément le contraire à coup d’interventionnisme d’État, de nouvelles lois sociales, d’investissements publics massifs. Le programme de Liverpool est grandiose : aides sociales en pagaille, emplois dans les énergies vertes (oui, oui, …), nationalisation de l’eau, du rail, de l’électricité, etc. Avec les conservateurs, l’ouvrier de Birmingham – qui a voté le Brexit – sera pauvre tout de suite, avec Corbyn, ce sera plus tard mais ça durera plus longtemps.
Samedi
L’actualité ne porte jamais à un optimisme débridé, aussi je veux terminer cette semaine en rendant un hommage vibrant à celui qui en fut le rayon de soleil, Manuel Valls. Arrêtez, les ronchons, les raisonneurs, les pisse-vinaigres ! Cet homme nous donne une leçon de folie et de romantisme qui devrait l’emporter sur toute autre considération. Car, enfin, il faut être cinglé pour décider, après avoir été Premier ministre de la République française il y a seulement quelques mois, de tenter de conquérir la mairie de Barcelone, là où les sondages ne lui donnent pas le quart d’une moitié de chance. Par-dessus le marché, le coin est pourri de chez pourri avec une population au bord de la guerre civile. Purement génial ! Décidément, c’est encore une chanson qui me vient en mémoire, celle qu’a si bien chantée Jacques Brel, La quête : Peu m’importent mes chances… et puis lutter toujours sans questions ni repos, se damner pour l’or d’un mot d’amour, ce mot d’amour que le peuple catalan ne lui donnera probablement jamais.
« Miracle, s’esbaudit le bon peuple, il n’y a plus de “trou de la Sécu”. »