Nice-Matin (Cannes)

Agresseurs de retraités à Èze: de  à  ans de prison

-

En partant délibérer, hier, les jurés avaient encore en tête les cris d’effroi d’Iris, 80 ans, défigurée par les coups d’un voleur sans scrupule. C’était dans une villa cossue d’Eze le soir du 24 octobre 2015. Ils avaient aussi l’image de ce couple d’industriel­s (soutenue par Me Germanetto), si touchant par sa retenue, sa dignité, sa pudeur malgré un traumatism­e indicible. En face, dans le box, les trois accusés font pâle figure. Même dans le milieu du banditisme auquel ils appartienn­ent depuis toujours, s’en prendre à des octogénair­es et les frapper gratuiteme­nt n’est pas glorieux. Hier matin, l’avocat général Clotilde Ledru-Tinseau avait conclu un réquisitoi­re sans concession en demandant trente ans de réclusion (dont deux tiers incompress­ibles) contre Riad Hafiane, l’auteur des coups de poing qui ont provoqué la perte d’un oeil d’Iris. Quinze ans contre Paul Ginines, le complice. Vingt ans dont dix ans de sûreté à l’encontre de Franck Dominoni, présenté comme le commandita­ire. Le serment des jurés leur demande de n’écouter « ni la haine ou la méchanceté ni la crainte ou l’affection ». Pas simple dans une affaire où les images insoutenab­les de l’agression ont été diffusées… La cour d’assises présidée par Patrick Véron a su s’extraire de l’émotion pour rendre un verdict qui satisfait la défense. Vingt ans de réclusion pour Hafiane, dix pour Ginines, tout comme Dominoni. Seul ce dernier a balancé sa tête de dépit et déclaré à haute voix qu’il ferait appel.

«J’aihonte»

Depuis trois jours, Paul Ginines, 38 ans, mains sur le visage, ploie sous le poids de la culpabilit­é. « J’ai honte et cette honte me suivra toujours », répète-t-il, en regardant Iris et Jean-Yves. Lui a reconnu avoir participé à cette équipée sauvage. «Des faits détestable­s», souligne son conseil, Me Frédéric Monneret. L’avocat général attendait des aveux complets. « Ce n’est pas la loi du silence mais la loi de la prudence », explique Me Monneret qui présente son client comme « un déshérité de la vie, pas un grand bandit ». Riad Hafiane, 46 ans, dont 24 ans en détention, avait aussi admis sa participat­ion lors de sa garde à vue devant les gendarmes la brigade de recherche de Nice. Il avait été repêché in extremis au large des Marinières après une rocamboles­que course-poursuite. De manière inattendue, il a récusé son avocat et nié les évidences tout au long du procès. C’est lui qui est accusé de s’être acharné sur une femme sans défense, excédé de ne parvenir à lui arracher sa bague. Iris a été secourue le nez et une main fracturés, un oeil irrémédiab­lement mutilé. Me Cathy Guittard, désignée par le bâtonnier en dernière minute pour assurer sa défense, ne comprend pas que les psychiatre­s n’aient pas décelé de maladie mentale chez un homme asocial aux traits psychopath­iques. Franck Dominoni, 49 ans, ancien braqueur, est présenté comme le mauvais génie de cette équipée sauvage. «Je suis innocent », clame l’accusé, en détention provisoire depuis trois ans. « Dans un procès, on n’est jamais innocent mais on peut le devenir », plaide son conseil, Me Richard-Dixon Pyne, qui tente d’arracher l’acquitteme­nt en cherchant à instiller le doute chez les jurés. « Les charges ne sont pas des preuves », insiste le pénaliste niçois. Ginines et Hafiane ne disculpent-ils pas le troisième larron? La piste d’un autre commandita­ire, patron d’un bar de SaintLaure­nt, a été, selon Me Pyne, négligée. Des arguments qui n’ont pas ébranlé l’intime conviction des jurés. L’ADN de Dominoni sur le casque d’Hafiane et les conversati­ons ambiguës avec Ginines pesaient trop lourd.

 ??  ?? Mes Monneret, Pyne et Guittard ont eu fort à faire pour défendre trois accusés dans un dossier qu’ils qualifiaie­nt eux-mêmes de «détestable». (Photos Ch. P.)
Mes Monneret, Pyne et Guittard ont eu fort à faire pour défendre trois accusés dans un dossier qu’ils qualifiaie­nt eux-mêmes de «détestable». (Photos Ch. P.)
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France