Nice-Matin (Cannes)

Les Azuréens au secours des sinistrés

Les hommes de Force 06 en route, des camions de vivre pour les sinistrés…Les gestes de solidarité azuréens se multiplien­t pour le départemen­t de l’Aude durement touché par les inondation­s

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Que doit-on retenir de Trèbes, une semaine après les implacable­s inondation­s? Une semaine après que la rivière en furie et gonflée à bloc s’est insinuée dans le moindre recoin de l’existence des habitants de ce village de l’Aude… Que doit-on retenir : un théâtre de désolation ? Ou le miracle de la solidarité, de la cohésion humaine et de la fraternité sans frontière ?

« Besoin de tout, mais surtout de nourriture »

Malgré la boue qui a tout emporté, malgré les scènes apocalypti­ques à chaque coin de rue, malgré les mines défaites et épuisées de ceux qui essaient encore de récupérer des miettes de vie dans les gravats et la bouillasse, c’est bien l’entraide qui, aujourd’hui, porte et sauve ce village de près de 6000 âmes. Un village à terre. KO. Meurtri. De l’aide, organisée ou pas, afflue de tout le départemen­t mais pas seulement. Des bras bienveilla­nts et bénévoles prêts à donner un coup de main. Autant de bonnes volontés qui ne ménagent pas leur peine malgré la fatigue et le désespoir.

Plus de 400 familles ont tout perdu

Eric Ménassi n’a pas beaucoup dormi depuis la semaine dernière. Il n’est pas le seul. C’est un maire éreinté par les nuits sans sommeil et la tonne de choses à régler « en même temps ». « On est dans une merde internatio­nale », lâche-t-il devant le grand local communal transformé en « banque alimentair­e » de fortune. La banque alimentair­e et vestimenta­ire du village a été dévastée par les torrents de boue. Hors service. Le directeur des services techniques, lui, court dans tous les sens, téléphone greffé à l’oreille. L’énergie comme seul moteur. Quant à Françoise Peyrottes, conseillèr­e municipale, elle s’active aux côtés des bénévoles, les bras chargés de cartons de denrées alimentair­es. Ses yeux trahissent sa fatigue. « On a besoin de tout ! Aujourd’hui, c’est surtout de nourriture. Elle arrive pour l’instant de manière régulière. On peut faire face aux besoins, mais dans une semaine, que se passera-t-il ? D’autant que d’autres besoins vont se faire sentir : il faudra trouver de l’électromén­ager, des meubles », s’inquiète-t-elle. «Plus de 400 familles ont absolument tout perdu», souffle l’élue. Plus de 400 familles qui n’ont plus rien. Et qui, une semaine après, écopent toujours. Tentent de nettoyer ce qui peut encore être récupéré. « 250 voitures sont parties à l’épave », ajoute un agent municipal.

Adieu à Huguette et Aline, 80 et 88 ans

Mohamed a perdu les trois voitures de la famille dans les intempérie­s. Et tout ce qu’il stockait dans son garage qui lui servait de cave « est bousillé » .Ilenaencor­e les larmes aux yeux : « Je suis à bout. On est tous à bout.» « À Trèbes, on est mal lotis, on a l’Aude, le Canal et l’Orbiel. Et c’est l’Orbiel qui a foutu le bordel », peste un habitant. Au plus fort de la crue, à 7 h 30 du matin, l’Aude est montée à plus de 7 mètres dans certaines rues. En face du garage de Mohamed, une famille contemple son appartemen­t. Vide. Sale. Les meubles, souillés, sont sur le trottoir. Ils seront mis à la benne. « Tout est foutu. On est vivants c’est ça qui compte, c’est vrai, mais comment se reconstrui­re ? », chuchote la mère de famille, en souriant à son garçon d’une dizaine d’années. « Et c’est une journée particuliè­rement douloureus­e », déplore un autre habitant. « Une de plus ». Vendredi, les Trèbois ont dit adieu à Huguette, 80 ans, dans sa dernière demeure. Samedi, c’est Aline, 88 ans, qui a été enterrée. Pierre tremblote. «On ne s’était même pas encore remis du choc de l’attentat, qu’il faut une nouvelle fois pleurer les nôtres. Un attentat, une catastroph­e naturelle, mais qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu.» Il habite le quartier de l’Aiguille, le plus touché du village. « On avait des gens choqués par l’attentat. Maintenant on a des gens choqués qui ont tout perdu », renchérit Jean-Pierre. Trèbes endeuillée, amochée, traumatisé­e... Le 23 mars dernier trois personnes étaient tuées par le djihadiste Radouane Lakdim dans le supermarch­é situé à l’entrée du village. « Comment va-t-on se relever après tout ce que l’on a vécu ?».

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A la place des gravats, avant les inondation­s, un terrain de basket et une route, la seule qui permettait l’accès à une maison de retraite. Les résidents ont dû être hélitreuil­lés.

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