Nice-Matin (Cannes)

« L’enjeu : savoir parler des peurs pour les dépasser »

Olivier Rolland présente L’enfance de Monsieur Bulot, un spectacle qui aborde avec humour et en musique les peurs des enfants, sur la scène d’Antibea mercredi à 14 heures

- PROPOS RECUEILLIS PAR JÉRÉMY TOMATIS jtomatis@nicematin.fr

Olivier Rolland a un rituel avec ses deux petites filles : leur conter une histoire avant qu’elles ne s’endorment. C’est donc tout naturellem­ent que le comédien aborde sur scène le sujet des peurs chez les enfants, mais également chez les parents, avec le second volet d’un spectacle qu’il a appelé L’enfance de Monsieur Bulot. A voir mercredi, à 14 heures, au théâtre Antibea.

Qui est ce Monsieur Bulot ?

C’est un personnage issu de l’imaginaire d’un papa, qui raconte une histoire à sa petite fille qui a du mal à s’endormir. C’est le second volet de ce spectacle en fait. Dans le premier, la petite fille a du mal à s’endormir lors d’un mariage, pendant que les adultes font la fête à côté. Alors elle demande à son papa de lui raconter une histoire. Dans cette histoire, Monsieur Bulot est un personnage qui écrit des contes pour les enfants. Dans ce second volet, on est toujours dans ce quotidien du papa avec sa petite fille. J’ai gardé ce principe de mise en abîme. La petite fille a plein de questions et d’angoisses qu’ont les enfants. Des questions bêtes comme par exemple comment respire un poisson sous l’eau ? Ou moins bêtes, comme tu as déjà eu peur papa ? Comment, avec maman, vous savez que vous êtes des bons parents ? Comment on choisit son métier ? Comment Monsieur Bulot a choisi... En tout cas cette histoire lui trotte. Voyant que ça va être compliqué de se passer d’une histoire pour l’endormir, le papa va donc choisir de raconter l’enfance de Monsieur Bulot.

Vous traitez les peurs de l’enfant dans ce second volet...

J’ai choisi, à travers l’enfance de Monsieur Bulot, de montrer que dans nos vies en tant qu’enfant notamment, nous avons des peurs qui nous sont propres comme l’inconnu ou le vide. Mais on a aussi des peurs qui ne sont pas les nôtres, qui ont été induites par notre environnem­ent. L’enjeu, c’est de savoir en parler pour les dépasser. Il y a beaucoup d’attentes chez les parents et ça peut générer des peurs chez l’enfant. Ce sont des choses toutes simples. Ça part donc d’une présentati­on de Sacha Bulot, qui est son prénom. Il parle de son papa et de sa maman. Il commence avec une scène où il joue avec sa nourriture. Sa maman va le prendre sur le fait et il va lui dire que c’est pour faire un « pestacle ». Donc ça part d’une faute de prononciat­ion. Il a une maman qui est très inquiète et qui pense qu’il a des problèmes d’élocution car il a  ans et dit encore « pestacle ».

Monsieur Bulot, lui, essaie de

trouver des solutions aux peurs des enfants ? Il dit que la meilleure des choses quand on a peur, c’est d’agir. Il est dans l’action. Il cherche des solutions avec sa logique d’enfant. On nous dit que des animaux disparaiss­ent ? C’est simple, il faut leur faire faire des bébés.

Il est dans le rationnel...

Exactement. Il y a toute une part poétique. Pour moi c’est très important. Il y a une double lecture. Les parents rient autant que les enfants. Ils s’identifien­t au papa qui raconte l’histoire alors que les enfants vont s’identifier à Sacha.

Au final, vous traitez aussi bien les peurs de l’enfant que des parents...

Oui. Je pense qu’en grande partie, les peurs des enfants découlent de celles des parents.

Pourquoi aborder cela sur scène ?

J’avais envie, je pense, de parler de mes propres peurs quand j’étais enfant. Je parle par exemple de quelque chose de personnel que j’appelle le syndrome du frigo. C’est-à-dire d’avoir l’impression parfois d’être enfermé dans un frigo. Dans un frigo, on a froid et on ne fait pas grand-chose. En tout cas une carotte, ça n’a pas l’air de beaucoup bouger... [Rires]. Du coup, j’avais besoin de parler de ça. Pour l’écriture, j’ai été aidé par Clémence Richard-Magis qui m’a recadré sur pas mal de choses. Après, tout ça est très personnel.

Parce qu’enfant, ces histoires ont compté pour vous ?

Je n’en ai pas eu tant que ça. J’ai découvert la lecture assez tôt mais ça n’a pas été un rituel comme ça l’est aujourd’hui avec mes enfants. Chez nous, c’est une obligation. Même si on est rentré tard. Il faut une petite histoire, on ne peut pas y déroger.

C’est aussi important pour vos enfants que pour vous, finalement ?

Oui, je crois. Dans la constructi­on de leur imaginaire, dans leur capacité à se projeter... et puis c’est un moment où on se retrouve. C’est particulie­r et rien d’autre ne compte. On partage, on lit ou on invente une histoire ensemble.

Et vous voyagez ensemble...

Exactement. Même si mes enfants on fait une bêtise, on trouve un moyen de raconter une histoire, sinon ça ne passe pas... [Rires].

Y a-t-il des similitude­s chez les peurs des enfants et des parents, et si oui, lesquelles selon vous ?

Il y a des similitude­s qui sont toutes bêtes. Par exemple, vers  ou  ans, les enfants commencent à réaliser qu’ils vont mourir un jour. Que dans leur développem­ent, la mort fait partie de la vie. Et c’est très compliqué à accepter pour eux. En tant que parents, notre peur première ce n’est pas que nous mourrions mais que nos enfants meurent. Je ne traite pas de ça dans le spectacle mais par exemple du réchauffem­ent climatique. Et donc, in fine ,de notre fin à tous parce qu’on se demande un peu ce qu’on va devenir.

La musique est très importante dans votre spectacle...

C’est Cyril Bakana qui est le compositeu­r musical. C’est une vraie création musicale. Il m’accompagne sur tous mes spectacles écrits.

Pourquoi ?

J’ai besoin de ça. C’est quelque chose qui vient énormément renforcer l’univers. Dans le spectacle, il y a une musique qu’il avait composée. Un petit ajout qu’il a composé après que je lui ai parlé de mon spectacle. Ça a donné une scène très visuelle, que l’on a insérée. Et c’est la musique qui est à l’origine de cette scène, clairement. On a une vraie symbiose par rapport à sa compositio­n et mes attentes d’auteur et de comédien. Il renforce cet univers de manière incroyable. Je voulais quelque chose à la fois de nostalgiqu­e et de joyeux, donc ce n’était pas si évident que cela d’arriver à tout faire.

Les parents rient autant que les enfants”

La musique vient renforcer l’univers”

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