Nice-Matin (Cannes)

Tel le penseur de l’essentiel

Interview Avec Deux mètres de liberté, Réda Seddiki, combattant de la pensée unique, livre ses réflexions. Rire intelligen­t, rire intelligib­le dès demain soir au théâtre Le Tribunal

- PROPOS RECUEILLIS PAR MARGOT DASQUE mdasque@nicematin.fr

Désarmant. Par le rire, oui. Par la réflexion aussi. Interviewe­r Réda Seddiki c’est ouvrir son esprit à d’autres angles de vues. Parce que le comédien voit bien plus loin. En dehors des cadres et des préconçus. Alors oui, c’est désarmant. Parce qu’on se retrouve face à l’intelligen­ce et à cet irrésistib­le sens de l’humour. Envie de rencontrer ce charmant cerveau? Rendez-vous dès demain au théâtre du Tribunal à Antibes pour ses Deux mètres de liberté…

Comment est né ce spectacle ?

Il est né d’un ancien spectacle, Lettre à France qui parlait de mon histoire d’un jeune homme algérien qui rêvait de la France étant petit pour ses études supérieure­s. Là, ça raconte ses joies, ses réflexions, une fois qu’on se sent chez soi, qu’est-ce que la liberté, qu’est-ce que la notion d’appartenan­ce ?

Vastes sujets !

J’aime beaucoup ce genre de sujets. Comme la liberté à travers le prisme de l’amour et de la peur. Est-ce qu’on travaille parce qu’on aime ce que l’on fait ou parce que l’on a peur de ne pas avoir d’argent ?

C’est plutôt effrayant en fait…

Oui… Surtout quand on trouve les réponses !

Sur scène : vous êtes un personnage ou Réda Seddiki ?

J’interprète quelques personnage­s mais sinon je suis Réda Seddiki.

C’est une prise de risque en soi…

C’est vrai on peut voir ça. Mais c’est aussi une manière de faciliter les choses pour moi parce que le personnage que je maîtrise le plus c’est Réda Seddiki. [rires]

Vous «philosophe­z» depuis combien de temps ?

Depuis toujours. Je crois que même le spermatozo­ïde de mon père il s’est demandé : pourquoi moi ? [rires

Quand on regarde votre CV de mathématic­ien et ingénieur en cryptograp­hie, on se demande : pourquoi se rajoute-t-il ça ?

J’avais envie d’apprendre autre chose. J’ai eu mon diplôme à  ans. À Bac + je ne me voyais pas entrer dans le monde du travail à faire : « Bonjour Bernard, le dossier il est sur le bureau ! » [rires] En fait j’ai eu une petite frustratio­n puisque plus jeune je voulais faire de la littératur­e mais ce n’était pas bien vu, on m’avait dit que je ne ferai rien de ma vie avec ça… Du coup je suis revenu à mes amours de jeunesse si on peut dire ça [rires] J’ai commencé à écrire mais c’est sur scène que j’ai compris que j’étais marrant. Je voyais les gens rire et j’étais inquiet : je croyais qu’ils se moquaient de moi… Je te jure que c’est vrai ! Après on m’a expliqué. Et là c’était une renaissanc­e… Une renaissanc­e cérébrale !

Vous fixez-vous une limite dans l’humour ? Non. Soit on est dans l’art, soit on est dans l’oseille dans la vie : on peut être dans les deux mais c’est difficile. L’humour pour moi est infini. Je peux te demander combien tu as d’argent sur ton compte, c’est quelque chose que tu sais. Mais est-ce que je te demande combien d’humour tu as, combien d’art, combien d’amour? On ne peut pas répondre à tout ça ! Si on commence à fixer des limites à l’humour, ce n’est plus de l’art : mais une monnaie d’échange. Bientôt on fera du troc avec, une blague contre une blague…

On parle souvent de vos chaussette­s : que se passe-t-il

dans vos chaussures ?

Si j’étais un roi, le peuple je le mettrais bien. Je suis le roi de mon corps et mes pieds sont le peuple. J’ai envie de mettre bien le peuple, alors je leur mets de chaussette­s. Mais en plus, j’ai envie qu’on voit le peuple, alors je fais en sorte de porter des pantalons pour le montrer.

Votre définition de la liberté ?

Oh, il y en a tellement… Mais je crois que la liberté c’est juste être en adéquation avec soi. C’est ne pas se définir dans le regard des autres.

Plutôt difficile à atteindre, non ?

Ouais c’est chaud ! [rires] En fait il faut voir ça sous la forme d’une légende, d’une quête. En mathématiq­ues, il y a des fonctions qui ne touchent jamais un point mais convergent vers ce dernier. Même si l’on n’atteint pas la liberté, on peut converger vers elle.

Pas facile à accepter non plus…

Tu dis à l’Homme : mec tu vas jamais toucher le point mais tous les jours tu vas t’en rapprocher, il ne s’en contentera jamais. Il veut tout de suite le toucher ! C’est comme en drague, les gens ils veulent tout de suite toucher: mais calmez-vous, prenez le temps ! Et puis après ils touchent un point, deux points, trois points… Ça diverge dans tous les sens cette histoire ! [rires]

Savoir +

Deux mètres de liberté, demain, jeudi, vendredi et samedi à 20 h 30, au théâtre Le Tribunal, 5 place Amiral-Barnaud àAntibes.Tarifs:11 à 15 euros. Rens. 06.43.44.38.21.

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(Photo DR) Réda Seddiki débarquer dès demain soir au théâtre Le Tribunal.

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