Nice-Matin (Cannes)

Vallauris : l’album de son grand-père soldat ressurgit

Nicole Foubert a retrouvé, il y a peu, un album datant de la Grande guerre. Un document contenant des photos de son aïeul mobilisé dans les tranchées du Nord-Est de la France

- SÉBASTIEN ROMERO BÉATRICE COUREL

Il devait peut-être ne jamais ressurgir, resté dans l’oubli pendant près d’un siècle. Mais le destin en a décidé autrement quand Nicole tombe par hasard sur ce vieil album photos de son grandpère, Maurice Caupain, Poilu de la Grande guerre. Outre l’aspect sentimenta­l, ce sont surtout de superbes clichés retraçant la vie dans les tranchées de toute une génération, sacrifiée et marquée à jamais de l’horreur et la barbarie humaine. 1914. Maurice Caupain a 31 ans. Originaire de Normandie, il travaille alors comme conducteur au pont transborde­ur de Rouen. Mobilisé en août 1914 dans le 156e Régiment d’infanterie, il partira alors pour le Nord-Est de la France dans les transmissi­ons, comme attestent les nombreuses photos de Maurice à l’oeuvre dans les postes optiques.

Un dégoût certain de la guerre

Et l’album contient toutes les légendes des clichés, écrites soigneusem­ent à la plume : Hermonvill­e, VillersFra­nqueux, Argonne, Verdun, Reims, tous les lieux où Maurice a vécu pendant toute la durée de la guerre. « Mon grand-père est décédé en 1961, j’ai quelques souvenirs de lui mais il ne parlait que très peu de cette période-là. Je me souviens qu’il racontait comment les rats passaient dans leur capote la nuit dans les abris, comment il avait sauvé un capitaine du champ de bataille. Il a eu la chance de ne pas être blessé durant le conflit », témoigne Nicole Foubert. Et alors que l’on célèbre le 100e anniversai­re de l’armistice de 1918, ce témoignage rappelle aussi combien cette génération en avait assez de la guerre. Si aujourd’hui, les héros de 14-18 sont mis à l’honneur, c’est surtout le dégoût de la guerre qui était présent parmi les troupes : «Je me souviens que mon grandpère avait raconté qu’il voulait à tout prix mourir pour échapper à l’horreur et la barbarie. Pour cela, il avait occupé une paillasse d’un soldat mort du typhus, dans l’espoir de l’attraper et d’y rester lui aussi à son tour. Sa grande crainte était d’être désigné dans un peloton d’exécution pour fusiller un de ses camarades », conclut Nicole Foubert. Le monument aux Morts du souvenir français et de la commune, érigé en hommage aux habitants morts pour la France, se prépare pour le centenaire de la fin de la Première guerre mondiale. Ce dimanche, toutes les génération­s seront réunies pour une cérémonie qui s’achèvera par un lâcher de ballons. Dans l’attente de ce rendez-vous, des spécialist­es ont nettoyé les pierres qui ont pris de l’âge et subi l’outrage du temps : pollution, oiseaux, pluies. Pour cela, opération eau sous pression pour enlever les traces sombres, dépose d’un produit pour mieux supporter les futures intempérie­s, le tout suivi d’un travail de réécriture en lettres noires. Tous les noms et dates sont ainsi bien visibles. Ainsi que l’inscriptio­n : « L’oubli est une honte, le souvenir un honneur. »

Inauguré le  août…  pour ne pas oublier les simples soldats Les curieux pourront lire que c’est le 15 août 1908 que l’édifice a été inauguré. Un des premiers monuments du souvenir français pour commémorer les pères, les maris, les frères et les fils tombés pour la patrie lors des conflits du XIXe siècle : guerres franco-prussienne, de Crimée et campagne d’Italie. Terminé les statues de généraux victorieux ou les arcs de triomphe, l’associatio­n créée en 1887 et qui a comme objectif le devoir de mémoire, a su imposer son idée de ne pas oublier les simples soldats du front, les hommes de troupes toujours en première ligne. Cette initiative précoce qui étonne dans une commune fort éloignée de l’AlsaceLorr­aine occupée, est rendue possible grâce à Joseph Bermond. Le maire de l’époque, ardent maître d’oeuvre de l’ouvrage avec l’appui du conseil municipal, s’attache fortement à la réalisatio­n de ce projet. Sur lequel va figurer le nom de son frère aîné, Armand Bermond, décoré de la Légion d’honneur et mort pendant la guerre de 1870. Le vieux monument se dresse donc fièrement depuis à l’entrée du village, avec comme mission la reconnaiss­ance d’un peuple à ceux qui l’ont défendu.

 ??  ?? Nicole Foubert et l’album de guerre de son grand-père. Ci-contre, Maurice Caupain en compagnie de ses camarades de tranchée à Hermonvill­e, en . Cidessus, à droite, un portrait de Maurice Caupain. (Photos S. R. et DR)
Nicole Foubert et l’album de guerre de son grand-père. Ci-contre, Maurice Caupain en compagnie de ses camarades de tranchée à Hermonvill­e, en . Cidessus, à droite, un portrait de Maurice Caupain. (Photos S. R. et DR)
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