FOOTBALL « On ne veut pas décevoir »
La Cannoise Sarah Bouhaddi, gardienne et cadre des Bleues (133 capes), a accepté d’évoquer le duel face à la Seleçao et le Mondial 2019, organisé dans l’Hexagone et à Nice en juin prochain
Le discours de Sarah Bouhaddi est franc. La gardienne des Bleues ne cache pas les manques d’une équipe qui s’apprête à organiser la e Coupe du monde féminine de l’histoire, du juin au juillet . Oui, les Bleues pèchent encore dans le réalisme. Celui qui leur fait défaut depuis plusieurs années. Pour autant, l’Azuréenne ne tombe pas dans le catastrophisme. Les motifs d’espoirs sont réels. Les Tricolores, es au classement FIFA, sont invaincues depuis sept matchs et viennent, même, de compiler six victoires de rang. Avec Corinne Diacre à sa tête, la France s’appuie sur une défense de fer et une rigueur de tous les instants. Et si, au fond, les bases du premier sacre mondial du foot féminin français étaient là…
Sarah, ce match a une saveur particulière. Vous retrouvez la Côte d’Azur où vous avez grandi…
Il y aura forcément des petites émotions. Toute ma famille et quelques amis seront là. Je vais donner un maximum de places à ceux qui peuvent venir. La Côte d’Azur, c’est là où j’ai commencé. J’y pense souvent, il ne faut pas oublier d’où l’on vient.
Avec six victoires d’affilée, la dynamique est bonne. Comment l’expliquez-vous ?
La coach (Corinne Diacre, ndlr) est arrivée (le août ) avec un discours et un fonctionnement différents. Elle a donné beaucoup de temps de jeu et vu pas mal de joueuses pendant une année. Je pense que des filles étaient timorées par le passé et qu’elles ont pris conscience qu’elles étaient importantes au sein du groupe.
Corinne Diacre a aussi amené beaucoup de rigueur…
Tous les sélectionneurs ont eu leur discours au sujet du travail. Corinne Diacre l’impose réellement. Quand on est sur le terrain, il n’y a pas de place pour l’amusement. Elle y tient. Je ne dirais pas que l’on manquait de rigueur, mais c’est vrai qu’on était pas mal de cadres assises tranquilles sur notre siège. Elle a rebattu les cartes, ça a fait du bien.
Un mot sur ce Brésil privé de Marta (blessée)…
C’est une belle affiche. Le Brésil est une nation du Top mondial (e). Même si sa meilleure joueuse n’est pas là, on devra être méfiantes et essayer d’être le plus efficaces possible. C’est une équipe assez joueuse mais qui manque de sérieux et de concentration sur le repli défensif. Il faudra en profiter.
Vous avez un rôle de cadre dans cette équipe (e plus âgée du groupe sur ce rassemblement)…
J’essaie d’apporter mon expérience. Maintenant, on arrive avec une génération qui est pleine de fougue et de folie. Ce n’est pas évident de donner des conseils, même si les jeunes sont à l’écoute.
Comment régler le manque de réalisme, votre mal récurrent ?
Ces derniers mois, on a beaucoup travaillé tactiquement et défensivement. On commence à bosser nos situations offensives. Il faut être patientes et bien soutenir nos attaquantes, ne pas leur mettre la pression. Elles ont conscience qu’il y a un souci qui va, j’espère, se régler dans quelques mois. On va démarrer une compétition importante et il faut un discours et une attitude positifs. On vous taxe d’être friables mentalement… J’ai du mal à comprendre. Parce qu’on perd en quart d’un tournoi, on est faible dans la tête ? Non, je ne pense pas qu’on a un problème mental. Ces dernières années, on avait surtout des filles en manque de compétition dans leurs clubs et ça nous a fait défaut.
N’est-ce pas pénible d’entendre que vous n’avez toujours pas gagné de titre majeur ?
Je ne pense pas qu’il faille en avoir marre. Ça fait partie de notre parcours. C’est réel. Aujourd’hui, on n’a rien apporté à cette équipe. Finir dans le dernier carré n’est pas un objectif. L’ambition, c’est de gagner. Cet été ce sera de remporter le Mondial. On va être suivies et il ne faudra pas décevoir les Français. On a une pression. Elle est positive et va nous pousser jusqu’au bout.
Le Mondial démarre dans sept mois, avez-vous demandé la recette du succès aux garçons ?
Je ne sais pas s’il y a réellement un secret mais il y a un état d’esprit à avoir. S’il est là, on est capables d’aller très loin. J’ai eu la chance de vivre le Mondial et j’avais plein d’étoiles dans les yeux. On a vu l’engouement cet été autour des garçons, leur capacité à nous amener des sourires. On les a vus évoluer tout au long de la compétition et on s’identifie à ça.
Un titre changerait votre vie ?
On l’a vu avec les Bleus alors, forcément, un titre changera la nôtre. On sera regardé autrement. On dira : ‘‘ah, c’est la gardienne championne du monde’’.
Vous en rêvez la nuit ?
Je suis patiente, je n’ai pas envie de brûler les étapes. Mais forcément, la Coupe du monde est dans un coin de ma tête.
Avec capes, avez-vous l’envie de battre le record de sélections de Sandrine Soubeyrand () ?
Non, je ne sais même pas s’il sera atteint un jour. Il y a plus de sélections qui nous séparent. C’est un nombre quand même.
A ans et après avoir tout gagné avec l’OL en club, n’avezvous pas envie d’autre chose ?
J’ai tout gagné à Lyon, c’est vrai. Je dois être la gardienne la plus titrée au monde en club. Un départ ? Je ne ferme pas cette porte. Si je dois finir ma carrière à Lyon, je ne le regretterai pas, mais je rêve de jouer aux Etats-Unis depuis toute petite. Au-delà des titres, c’est pour le plaisir de goûter à cette aventure. Ça reste dans un coin de ma tête.
Pensez-vous à la maternité ?
J’ai la chance d’avoir un conjoint vraiment derrière moi. Je n’ai pas la pression de faire un enfant tout de suite. Il me dit de profiter et de jouer un maximum d’années tant que je prends du plaisir. Je n’arrêterai pas dans un an mais je ne resterai pas non plus sur le terrain pour rester sur le terrain.
Quelle sera votre reconversion ? A ans, avant le foot, vous vous imaginiez dans la restauration…
Ça a évolué. Je veux rester dans le foot. En parallèle de ma carrière, j’ai passé mes diplômes d’entraîneur. Je vais continuer après ma retraite. C’est le domaine qui m’intéresse le plus. Je veux rendre ce qu’on m’a donné aux jeunes gardiennes ou à une équipe. Billetterie sur www.allianz-riviera.fr. Billets dès 5€.
Sarah Bouhaddi
Née le octobre à Cannes ✓ Carrière : SC Mouans-Sartoux (-), FC Mougins (), OS Monaco (-), CNFE Clairefontaine (), Toulouse FC (-), Juvisy (-), Olympique Lyonnais (depuis ). ✓ Palmarès : Ligues des champions (, , , , ), Championnats de France (de à ), Coupes de France (de à ). ✓ Sélection : capes (re le février contre l’Ecosse).