Nice-Matin (Cannes)

Rien ne se jette... Tout se

Depuis deux ans, Aline, Michel et leur fille Justine font la guerre aux déchets ménagers, et tout particuliè­rement au plastique. Les astuces sont simples... et le résultat plutôt surprenant. Bienvenue dans la « famille zéro déchet »

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Le déclic

Il suffit parfois d’un simple déclic. Mais pour les Sulter, les choses se sont faites petit à petit. D’abord, la famille hyéroise a vite déchanté, il y a six ans, en emménagean­t dans une résidence «où les gens balancent encore leurs déchets dans un vide-ordures, comme dans les années 70 ». Très vite, la famille a commencé à crouler sous les cartons et les emballages divers. « On s’est dit que ce n’était plus possible et qu’on allait se lancer dans le recyclage ». Quitte à devoir «prendre un charriot et mettre quinze minutes pour se rendre à pied au tri ». Vétérinair­e biologiste de profession, soucieuse du respect de l’environnem­ent, Aline a souvent du mal à se dire… qu’on est en 2 018. Il y a un, la jeune maman a eu un autre déclic. Celui-ci s’est présenté sous la forme d’une banale liste de fourniture­s scolaires. « Quand j’ai vu que la maîtresse de ma fille demandait 50 gobelets et 50 assiettes en plastique par élève, raconte-t-elle encore sous le choc, j’ai eu du mal y croire ». Toute la famille est donc passée à la vitesse supérieure. La guerre aux déchets était déclarée.

Le mode d’emploi

S’il y a bien une chose qu’Aline a « du mal à comprendre, c’est la barquette en plastique pour la fraise. Pourquoi toutes les fraises sont-elles vendues dans des barquettes en plastique?» On trouverait bien une réponse toute faite pour la rassurer mais le lobby des fabricants de barquettes en plastique est sans doute plus puissant qu’on ne le croit… On est donc gentiment accueilli par Justine, 5 ans, qui nous a vus arriver de loin avec notre bloc-notes de journalist­e à l’ancienne: «Oui à la vie, non au papier». Telle est la devise de la maison, parfaiteme­nt récitée par cette élève de maternelle qui s’apprête à rentrer «chez les grands ». Comme le rappelle souvent sa maman, avec nostalgie, «vers l’après-guerre, on ne se posait même pas ces questions. Nos grands parents étaient vraiment au top niveau zéro déchet. » Seulement voilà… les temps ont changé. La guerre aux déchets est une « bataille qui se À la fin de chaque repas, c’est le même rituel : « ça nous prend juste cinq minutes. On trie les restes et on les prépare pour le compost ». Dans la cave, le lombricomp­osteur s’en lèche déjà les babines. À table, même Justine fait sa part en découpant les cartons de papier toilette qui partent eux aussi au joue au quotidien ». Évidemment, tout n’est pas simple. « Au début, je me sentais un peu seule dans ma démarche, reconnaît Aline. On avait déjà contacté les pouvoirs publics pour qu’ils fassent des efforts dans notre quartier mais on n’a jamais eu de réponse». La Hyéroise estime que «quand on a un problème, mieux vaut chercher des solutions ensemble ». Aujourd’hui, ces solutions sont à portée de quelques clics sur internet. Les Sulter ont surtout acquis une bible en la matière: un livre intitulé La famille zéro déchet, sorte de petit guide pratique garni d’astuces en tout genre pour éviter de produire des déchets. On y explique, en gros, que rien ne se jette. Tout se récupère, tout se fabrique. Et le principe s’applique dans toutes les pièces de la maison… *Cet article est déjà paru dans l’édition

du 31 juillet 2017. compost. « Si on ne met que des légumes, explique Aline, ça déséquilib­re le milieu et le ver meurt, donc on est obligé d’apporter du carbone. » C’est bien simple, la poubelle n’existe pas. « Tout a une fonction. Même les queues de cerise ! En infusion, c’est très bon pour la circulatio­n du sang ». Et les noyaux ? « Il faut bien les laver, et vous pouvez fabriquer des coussins avec, que vous chauffez au micro-ondes avant de le poser sur une blessure, ça soulage si vous vous êtes cassé le pied ou autre chose. »

« Le marc de café, c’est génial » Tout ce qui ne va pas au composteur part au seau à Bokashi : viandes, poissons, agrumes, ail, oignons, restes d’infusion… En japonais dans le texte, le seau à Bokashi signifie « matière organique fermentée ». Tout est dit, ou presque. Une fois la fermentati­on finie, « en général au bout de trois semaines », le compost est enterré dans le jardin et fait un très bon engrais. Résultat : la famille est fière de son petit potager. «Melons, tomates, herbes, ça a poussé tout seul du jour au lendemain ». Pour faire la vaisselle enfin, plus besoin de produit non plus. « Un simple savon de Marseille à 5 euros pièce suffit. Et cela dure au moins un an ou deux. » Pareil pour les autres produits ménagers. Un peu de bicarbonat­e et de vinaigre de vin blanc et votre nettoyant à vitres est prêt. Pour la lessive ou le sol, Aline n’utilise plus que du savon noir. « Avec ça je fais tout ». Un peu comme le marc de café. « Ca, c’est génial. Soit ça va dans le lombricomp­osteur, soit dans les plantes, ou je m’en sers pour déboucher les éviers, récurer les plats et même pour me faire des gommages ». Évidemment, les éponges sont « tissées avec des chutes de tissu » et lorsque, vraiment, les casseroles sont trop cramées, un peu de coquille d’oeufs en poudre fait parfaiteme­nt l’affaire.

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Textes et photos : Guillaume AUBERTIN gaubertin@nicematin.fr
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Le lombricomp­osteur qui sert d’engrais pour le potager est très gâté. Et tout ce qui ne va pas au composteur (viandes, poissons, agrumes...) part au seau à Bokashi.
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