Le mal est fait
« Ghosn est passé en quelques heures du statut de demi-dieu à celui de simple délinquant en col blanc.»
C’est la malédiction du numéro . Quelques mois seulement après avoir annoncé avec fierté avoir hissé l’Alliance RenaultNissan-Mitsubishi à la première place mondiale des constructeurs, Carlos Ghosn est sur le point d’être débarqué. Il y a trois ans, emporté par les fumées du « dieselgate », le patron de Volkswagen, alors numéro , avait subi le même sort, poussé à la démission. Aussi brutale qu’inattendue, la chute de Carlos Ghosn provoque une onde de choc qui met l’État français, actionnaire numéro de Renault, dans une position terriblement délicate. Et interroge sur la notion d’homme providentiel. Artisan infatigable du redressement de Nissan, à l’origine de la modernisation de Renault et de son audacieux virage électrique, Ghosn a régné sans partage pendant près de deux décennies. Dirigé sur plusieurs continents à la fois. Brassé des milliards. Tenu tête à des chefs d’État. Premier patron de
l’histoire à assurer
en même temps les commandes de deux grandes des sociétés plus de la planète, Carlos Ghosn est tombé au petit matin comme un vulgaire narcotrafiquant. Traqué sur le tarmac d’un aéroport japonais à bord du jet privé siglé Nissan avec lequel il jonglait avec les fuseaux horaires comme d’autres vont chercher le pain à la boulangerie, Ghosn est passé en quelques heures du statut de demi-dieu à celui de simple délinquant en col blanc, accusé des pires turpitudes par le P.-D.G. de Nissan dont il était encore, il y a peu, le mentor. De quels délits est-il précisément accusé ? A qui profite le crime ? Ni Renault ni l’Etat français ne peuvent se permettre de prendre le temps de la réflexion et de l’analyse. Le mal est déjà fait. Au-delà des conséquences pour le groupe et l’Alliance, les dégâts en terme d’image sont irréversibles. La simple évocation des sommes astronomiques perçues par Carlos Ghosn provoque des haut-le-coeur chez les Français, qu’ils aient qu’il ait ou pu non dissimuler enfilé un au gilet fisc jaune plusieurs ces derniers dizaines jours. de millions Et l’idée d’euros supplémentaires, allant même jusqu’à faire financer par ses sociétés l’achat de résidences de luxe au Liban et au Brésil, donne la nausée au moment où une partie du pays descend dans la rue pour protester contre quelques centimes d’euros d’augmentation à la pompe.