Incapables de nous taire, écoutons Beckett y faire...
Stéphane Eichenholc met en scène et joue dans son adaptation d’En attendant Godot. Une création à découvrir sur la scène du théâtre Antibéa dès ce soir
Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Reste à savoir qui. Derrière la plume de Samuel Beckett, des centaines de questions lévitent. Avec En attendant Godot, Stéphane Eichenholc a voulu s’y confronter. Pour cette toute nouvelle création jouée pour la première fois il y a quelques jours de cela au Théâtre de la Cité à Nice, le metteur en scène a fait le choix de s’entourer d’artistes solides et complices. Une rencontre à découvrir sur les planches d’Antibéa dès ce soir. En plus, vous pourrez y reconnaître un p’tit Antibois, Antoine…
Pourquoi vouloir monter Godot maintenant ?
C’est avant tout une histoire d’équipe, de rencontre. Il y a quinze ans, j’ai monté Petit boulot pour vieux clown de Visniec. On y retrouve des choses communes avec Godot. Nous allons d’ailleurs y revenir à la saison prochaine à Antibéa. Le parallèle avec la pièce de Beckett est intéressant, j’avais envie d’approfondir cette veine-là avec mes partenaires Sylvain Guiné, Jean-Louis Stora et Eric Guyaunneau. Il y a réellement un avant et un après Godot.
Il y a eu tellement d’adaptations… C’est un challenge de monter le sien, non ?
C’est une pièce qui, au premier abord, peut faire un peu peur. Elle est un peu longue : h , deux actes, sans entracte. Pour autant on ne la voit pas passer du tout ! Parce qu’il y réside une véritable profondeur, un questionnement sur le sens de notre existence ici sur Terre. On dans l’existentiel, la métaphysique. Et, à côté de cela, la pièce est pleine d’humour. Beckett utilise parfois des grosses ficelles, des expressions triviales dans son écriture. Et puis on est dans la veine du travail burlesque ici.
Vous parliez d’influence clownesque avec votre travail sur Visniec. On la retrouve ici ?
Quand Beckett crée Godot, il y met les chapeaux melon du duo Laurel et Hardy. C’est dans la continuité du travail clownesque. Notamment avec ces duos qui fonctionnent naturellement.
Votre parti pris pour la scénographie ?
On va à l’essentiel. Sur le dénuement le plus total.
Comment ne pas être influencé par les précédentes adaptations ?
Je n’aime pas me laisser influencer par ce qui a été fait. J’ai dû le voir jouer il y a de cela ans, je n’en ai pas du tout un souvenir net. Mais j’ai choisi de respecter à la lettre les didascalies de Beckett en prenant le parti d’appliquer les rectifications que l’auteur a luimême effectuées en le montant avant sa mort. Ce sont des petites modifications très judicieuses.
Puriste, donc !
J’ai envie de prendre du plaisir, de servir la pièce, de la transmettre et que les gens ressentent de l’émotion. Le rire et les larmes : ce mélange est fort, puissant, salvateur. C’est ça le théâtre. Je trouve que l’on dénature le propos si l’on y met un parti pris. Des metteurs en scène l’ont très bien réussi cependant ! Je ne dis pas le contraire. Sachant que l’oeuvre est contemporaine elle n’a pas besoin à mes yeux d’être revisitée.
Que dîtes-vous aux comédiens pour qu’ils montent sur scène avec la bonne intention ?
Qu’ils doivent être vrais, justes, généreux. L’acteur doit se transcender et devenir un éclaireur afin que l’oeuvre paraisse limpide au public.