Rendre nos villes plus humaines
Redynamiser les centres-villes, créer des lieux de vie en misant sur la verdure et les commerces de proximité, pour retrouver le temps de vivre et d’échanger… Des solutions existent pour rendre nos villes moins stressantes et surtout plus agréables à vivre
Un habitant sur deux vit aujourd’hui en ville. Et à l’horizon 2030, près de 75 % de la population sera urbaine. Une évolution qui pose des défis majeurs : comment faire face aux flux de déplacements ? Quelles solutions pour endiguer la pollution et le bruit ? Et surtout, comment vivre de manière sereine dans un monde hyperconnecté qui va de plus en plus vite ?
La question peut paraître un tantinet philosophique. Elle est pourtant au coeur des réflexions engagées par de nombreuses municipalités.
Vitrines vides, rideaux baissés
Ce n’est pas un hasard si le métier de manager de centreville fleurit un peu partout en France. Comme l’explique Christophe Baraston, délégué général du Club des managers de centre-ville, « de nombreuses municipalités (comme Cagnes-sur-mer) ont désormais recours à ces postes pour développer leur coeur de ville ». Car c’est bien là que, souvent, le bât blesse.
Journaliste et écrivain, auteur de Comment la France a tué ses villes, Olivier Razemon a fait le tour des principales villes moyennes de France. Vitrines vides, rideaux baissés, façades défraîchies… Partout où il est passé, il a observé le même phénomène.
Pour comprendre ce qui a conduit à cette « dévitalisation urbaine », il invite notamment à regarder du côté de la grande distribution.
« On continue à construire des zones commerciales en périphérie dans des proportions qui n’ont rien à voir avec la demande », déplore-t-il. Or, cette tendance participe aussi, selon lui, à la « paupérisation générale des centres-villes ». Professeur associé à l’Institut d’urbanisme de l’université d’Aix-Marseille, Michel Chiappero partage ce constat. Lui aussi fustige cette « dispersion de l’attractivité commerciale », dont « les élus sont en partie responsables ». «Aujourd’hui, regrette-t-il, tout le monde est dans l’urgence, dans le tout voiture, sans prendre le temps de vivre réellement… »
« Ralentir la ville »
Sébastien Passel, géographe, suggère de rendre la ville aux piétons. « Le rapport à l’espace est complètement différent quand on marche : ça permet aux habitants de se rencontrer, de flâner, de contempler et ainsi de se réapproprier leur espace de vie. » Et le géographe de développer : « C’est important de favoriser ces lieux “apaisés ”, où l’on ralentit la ville. » Des villes ont d’ailleurs choisi de lever le pied. De mettre le bien-être de leurs habitants au coeur de leur projet. C’est le cas de Bra, à 50 km au sud de Turin, ville pionnière du réseau des « Citta slow » qui compte près de deux cents cités un peu partout dans le monde (lire pages 4 et 5). Redynamiser le centre sans l’asphyxier pour autant. L’équation n’est pas évidente à résoudre. Certaines municipalités proposent donc de multiplier les lieux de convivialité, avec de la verdure et des bancs publics.
« Une ville, résume Olivier Razemon, ce n’est pas que des bâtiments, c’est avant tout des habitants, et ce sont eux qui font la ville. »