Réunis à Munich, Européens et Américains règlent leurs comptes
Dirigeants américains et européens ont affiché hier leurs divergences, Washington rejetant des critiques « exagérées » et ne reflétant «pas la réalité ». La Conférence sur la sécurité de Munich, grand-messe annuelle internationale sur les questions de défense, a du coup pris des airs de règlement de compte, avec à la clé un mini-éclat diplomatique germano-américain.
Sans prendre de gants, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a répliqué à des propos tenus la veille, lors de ce même forum, par le chef de l’État allemand Frank-Walter Steinmeier. Le chef de l’État allemand avait regretté que « notre principal allié, les États-Unis, refuse sous l’administration actuelle l’idée même d’une communauté internationale ». « Les pays sont invités à placer leurs propres intérêts au-dessus de ceux de tous les autres », avait-il déploré. Le ministre américain des Affaires étrangères lui a répondu du tac au tac, faisant valoir que son pays avait contribué au renforcement de l’Otan sur son flanc oriental chez les voisins de la Russie, ou encore conduit l’effort pour mettre fin au « califat » autoproclamé de Daesh. « Estce que c’est ça les États-Unis qui “rejettent la communauté internationale” ? », a-t-il demandé. « J’ai le plaisir de vous annoncer que l’idée selon laquelle l’alliance transatlantique serait morte est grandement exagérée », a-t-il ironisé, avant de clamer : « L’Occident est en train de l’emporter. »
Les relations avec Pékin et Moscou au centre du jeu
Mais peu de temps après, le président français Emmanuel Macron, qui lui a succédé à la tribune à Munich, a pris son contrepied. « Il y a un affaiblissement de l’Occident » face à l’Asie ou la Russie, a-t-il avancé, et « il y a une politique américaine d’une forme de repli relatif, d’une reconsidération de sa relation avec l’Europe ». Dans ce contexte, l’Europe doit se « revivre comme une puissance politique, stratégique », a lancé le chef d’État français.
Américains et Européens sont aussi en désaccord concernant la Chine : Washington fait pression sur les pays européens pour qu’ils ne donnent pas accès à l’équipementier Huawei dans leurs futurs réseaux 5G, y voyant un risque d’espionnage. Mais jusqu’ici, la plupart des pays européens font la sourde oreille. Les tensions sont aussi vives dans le domaine énergétique, où Washington s’inquiète de la dépendance de l’Europe à l’égard de Moscou et dénonce le projet de nouveau gazoduc russe Nord Stream II. M. Pompeo a annoncé à ce
(1) sujet que les USA allaient financer des projets énergétiques à hauteur d’un milliard de dollars dans des pays d’Europe centrale et de l’Est pour renforcer leur indépendance énergétique.
1. Soutenu notamment par l’Allemagne, il vise à acheminer le gaz russe en Europe via la mer Baltique en contournant l’Ukraine.