La France serait très loin de pouvoir effectuer tests par semaine
Alors que, comme l’OMS n’a cessé de le rappeler, les capacités de tests constituent depuis le début un point clef de la réponse à la crise sanitaire, et encore plus avec le déconfinement, une enquête de la cellule investigation de Radio France publiée hier jette un pavé dans la mare.
« La France est prête pour tester massivement », avait déclaré mercredi dernier le ministre de la Santé, Olivier Véran : « La capacité de dépistage est dès aujourd’hui au niveau des besoins estimés », dont il avait indiqué qu’ils étaient de 700 000 tests par semaine. Or les recherches poussées menées par nos confrères montrent qu’on en serait en réalité très loin.
La direction générale de la Santé ellemême admet « de fortes fluctuations au cours des dernières semaines », avec un nombre de dépistages variant « entre 200 000 et 270 000 tests par semaine ». Un chiffre déjà bien en dessous de l’objectif affiché. Mais qui semble, qui plus est, optimiste si l’on se fie aux données publiques disponibles, explique Radio France : selon celles-ci, « 149 800 tests virologiques ont été réalisés la semaine du 27 avril au 3 mai ». Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y en a pas eu davantage, faute de centralisation automatisée de cette information. Santé publique France n’a pas été en mesure de répondre, indiquent nos confrères, qui soulignent aussi la disparité des bulletins épidémiologiques régionaux (certains ne mentionnant par exemple que les tests positifs), et citent un responsable de l’ARS Occitanie confirmant que les chiffres locaux sont agrégés « à la main ».
Pas de montée en puissance ?
Mais même en prenant soin de relativiser, l’écart semble considérable. « Depuis le 24 février, 831 174 tests virologiques ont été réalisés, à la fois dans les hôpitaux publics et dans les laboratoires privés de ville », selon les statistiques disponibles sur Santé publique France, soit «unpeu plus de 830 000 tests en dix semaines d’épidémie ».
Facteur aggravant, « partout, les graphiques en attestent : la montée en puissance des tests n’existe pas. Ils ont démarré en février pour les premières régions touchées, puis ils ont augmenté jusqu’au 23 avril. Ensuite, leur nombre stagne. Depuis le 20 avril, il diminue même chaque semaine. [...] Selon notre décompte, la France n’a en fait jamais dépassé les 150 000 tests par semaine », explique Radio France. Et de citer le président du Syndicat national des biologistes des hôpitaux, Xavier Palette : « C’est impossible d’arriver à 700 000 tests en une semaine. Il manque des surblouses, des kits de prélèvement, du personnel… »
La faute, détaille longuement cette enquête, à une mobilisation laborieuse des moyens disponibles, avec semble-t-il une préférence donnée aux laboratoires hospitaliers et aux laboratoires de biologie médicale de ville, au détriment de structures nonmédicales, plus petites ou avec des méthodes plus expérimentales (« laboratoires agro-vétérinaires, [...] ceux de la gendarmerie, de la police et les laboratoires de recherche publique »). Quitte à importer, installer et former en urgence, apparemment avec parfois une certaine improvisation, de l’équipement chinois (qui aurait aussi été fourni à deux laboratoires privés, dont un à Saint-Laurent-duVar).