A Menton : « Ce ne sera pas un retour à la normale »
La directrice de l’école élémentaire Saint-Exupéry était hier sur le pont pour mettre aux normes sanitaires son établissement et accueillir ses élèves le mieux possible ce jeudi
La cloche de la reprise ne retentira que jeudi dans les quinze écoles mentonnaises, mais les équipes pédagogiques et les personnels des écoles s’activent depuis hier matin pour préparer cette rentrée pas comme les autres... Dans le quartier du HautCareï, avenue de Saint-Roman, la directrice de l’école élémentaire Saint-Exupéry, Céline Bentz, est à pied d’oeuvre pour appliquer à la lettre le protocole sanitaire, qu’elle avoue être « anxiogène et très strict ». Des salles de classe aux couloirs intérieurs, de la cantine à la cour extérieure, des toilettes aux espaces couverts et périscolaires... tout est passé au crible de la réorganisation. En ce premier jour de pré-rentrée, Céline accueille ses collègues masqués sous le préau couvert, orné d’une fresque géante du Petit Prince, mais le temps des retrouvailles physiques est très vite supplanté par l’annonce des mesures édictées par le ministère qu’il faut mettre en pratique avec rigueur et sans stress dans chaque recoin de l’établissement.
Car, dès jeudi, 30 élèves seront accueillis dans cet établissement mentonnais, qui compte en temps normal 176 enfants : « Nous aurons des CP, des CM2, sur la base du volontariat et un groupe multiniveaux d’enfants dits prioritaires, c’est-à-dire, ceux dont les parents sont des soignants, des enseignants ou des forces de l’ordre. Puis, trois autres groupes à partir du 25 mai, soit un total d’une soixantaine d’élèves ». Ce qui correspond bien à la moyenne départementale d’environ 30 % des enfants de retour sur les bancs de l’école. « Mais nous n’avons pas encore toutes les réponses des parents, certaines étant conditionnées par la reprise ou non de leurs activités le 2 juin...» Désormais, le temps scolaire nécessite une planification sans faille, car les enfants seront présents physiquement deux jours par semaine à l’école et les deux autres en télétravail. « On a fait aussi le choix de respecter les fratries, afin de les scolariser les mêmes jours de classe ! » Tandis que les uns s’affairent à la désinfection des lieux, d’autres réorganisent la circulation dans les couloirs et au réfectoire...
Cohésion d’équipe
« C’est pire qu’une rentrée normale avec de nombreuses équations à beaucoup d’inconnues ! Mais la cohésion de mon équipe me rassure, car chacun a pris tout de suite conscience des enjeux de ce retour et apporte sa pierre à l’édifice... Sans oublier le soutien de la Ville, très investie pour la désinfection des locaux et l’organisation de l’entretien quotidien ». Face à cette implication de tous,
Céline n’est pas inquiète de reprendre. Enfin, « c’est une reprise en présentiel, car pendant les deux mois du confinement, je ne me suis pas arrêtée ! Comme mes collègues, j’ai assuré la continuité pédagogique à distance et ma charge de la direction ». Une expérience qu’elle a voulue bénéfique pour les enfants comme pour les parents : « J’ai choisi de ne pas trop charger les familles, en apportant des choses très ludiques et en variant les supports » explique cette enseignante de CE2-CM1. « Bien sûr, il y avait du travail purement scolaire, mais j’y ai ajouté des activités physiques, des recettes en italien, des jeux mathématiques, des capsules vidéo... Mon objectif étant d’accompagner au mieux les familles et de dédramatiser la situation. J’ai pu remarquer que des liens se sont créés entre les parents et leurs enfants au niveau du savoir, et cette relation apaisée qu’ils ont tissée était selon moi prioritaire ». Alors, aujourd’hui, l’état d’esprit de cette enseignante reste positif : « On reprendra les enseignements fondamentaux, les maths, le français et
‘‘ les activités physiques. Et s’il y a du retard, les enfants reverront de toute façon à la rentrée, car on révise toujours ce qui a été fait l’année précédente...» Mais elle compte aussi parler de la période de crise que l’on vient de vivre, « de la manière la moins anxiogène possible » et des contraintes liées à la réouverture de l’école. « Nous avons pu bénéficier – grâce aux vidéos des enseignants du Réseau d’aide spécialisée sur la circonscription – de conseils pédagogiques sur le bien-être des enfants et leur retour à l’école, cela va nous aider au quotidien. La pédagogie, c’est notre métier ». Céline sait bien pourtant que rien ne reviendra à la normale dès jeudi, et que le temps contraint l’est toujours. Alors, « il faudra les mettre en confiance, on a déjà beaucoup travaillé sur le lavage des mains, et les enfants avaient réalisé des affichettes collées en différents lieux de l’école. Cette pratique est déjà bien ancrée en eux. Toutes les mesures, nous les avons aussi transmises aux parents que l’on a voulu rassurer... » Et, en cette première matinée, l’école était déjà configurée dans son nouveau mode de fonctionnement. La classe de Céline passe de 28 élèves à 15. « Il y a déjà plus d’un mètre entre chaque bureau » explique-t-elle, une règle à la main, et les tables qui accueillaient habituellement deux élèves seront désormais individuelles. Sur chaque bureau, une petite feuille rappelant les gestes barrières et les règles sanitaires est sur le point d’être collée.
Du mobilier sacrifié
« Ce n’est pas une mince affaire dans certaines classes, et nous avons dû sacrifier du mobilier afin d’avoir plus d’espace. Non seulement pour faciliter la circulation des élèves, mais aussi le nettoyage...» Une nouvelle manière de concevoir les repères de la vie scolaire et sociale de nos chères têtes blondes.
Dans la cour aussi, la distanciation sera marquée au sol : «Curieusement, la récréation qui, d’habitude, pose le moins de problèmes, va devenir le point central de notre vigilance ! » Les jeux traditionnels de contact laisseront place à des activités ludiques, autonomes ou dirigées dans trois espaces différents. « Ce ne sera pas facile, mais les enfants ont déjà bien intégré le confinement et ont une grande capacité d’adaptation, c’est finalement pour eux un petit degré de liberté, quand ils s’apercevront que petits et grands ont les mêmes contraintes. Ce qui compte c’est que chacun va reprendre sa place : enfant, enseignant et parents ».
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Désormais, le temps scolaire nécessite une planification ”
Les enfants ont une grande capacité d’adaptation ”