Scandale de la villa « Hier » à Antibes : une société paye pour éviter un procès
L’enquête ouverte à Nice en 2014 pour blanchiment aggravé après la vente suspecte en 2008 de la luxueuse villa « Hier » du Cap d’Antibes vient de connaître un nouveau rebondissement. La villa achetée officiellement 36 millions, aurait coûté en réalité 128 millions. 92 millions auraient été versés par l’acheteur à différents intermédiaires via des sociétés off-shore.
Dans un communiqué daté d’hier, le procureur de la République Xavier Bonhomme annonce que la société suisse Swiru Holding SA, mise examen le 14 novembre 2019 pour complicité de fraude fiscale, vient de payer 1,4 million d’euros d’amende. «Lasociété ayant déjà versé, par le biais de l’une de ses filiales, la somme de 10 386 800 euros à l’administration fiscale au titre de l’impôt éludé. », précise le communiqué.
Le fisc et l’oligarque
Le parquet, qui pense sans doute qu’un bon arrangement vaut mieux qu’un mauvais procès, explique avoir conclu « cette convention judiciaire d’intérêt public » le 4 mai dernier, convention homologuée par le président du tribunal judiciaire de Nice lundi.
« Elle sera publiée sur le site de l’Agence française anticorruption à l’issue d’un délai de dix jours, sauf usage par la société, dans ce délai, de son droit de rétractation. » Ce qui paraît peu probable puisque l’exécution de cette convention éteint les poursuites engagées contre la société suisse. En revanche, le communiqué indique que « l’information judiciaire se poursuit à l’égard des autres personnes mises en examen. » Un mandataire liquidateur, deux avocats, un notaire, un agent immobilier... restent dans le collimateur du juge d’instruction Alexandre Julien qui enquête sur la vente de la villa « Hier », propriété de la famille Borghetti et les dessous-de-table qui ont été généreusement distribués. L’acquéreur, un homme d’affaires suisse, aurait agi pour le compte de Souleyman Kerimov, oligarque russe, un temps mis en examen. Ce que ces deux hommes ont toujours contesté. Le milliardaire et sénateur russe avaient été contraints de verser une caution de 5 millions d’euros pour mettre fin à une assignation à résidence en France. Ils auraient également versé 70 millions au fisc, information non confirmée officiellement, pour mettre fin aux poursuites judiciaires.
Le groupe d’intervention régional, la section financière de la police judiciaire de Nice, sous l’égide du juge d’instruction niçois, se sont intéressés de près aux circuits financiers qui alimentaient des comptes de personnalités locales dans des paradis fiscaux. Le préjudice pour l’Etat aurait dépassé les 400 millions d’euros. Très loin des sommes versées par Swiru Holding SA.
Des considérations politiques ont-elles guidé la stratégie de la Chancellerie et de Bercy ? Mystère pour l’instant.