Guerre du Lol : je t’aime moi
Le rire, la dérision et l’humour comme armes de destruction individuelle de l’angoisse collective massive. Depuis le début de la crise sanitaire, des internautes ont pris le parti d’en rire
Ça se marre toujours sur la toile. Pas d'armistice malgré le signal du déconfinement. A coup de détournements d'images, de punchlines décalées, la Guerre du LoL continue. Plus blitzkrieg certes que guerre des tranchées. Malgré le télétravail et le maintien du chômage partiel, le retour au boulot a sans doute réduit notre temps de cerveau disponible à la blague viralisable.
Mais ça balance quand même. Moins anthropologue du confinement général. Plus tourné vers l'avenir.
Les stigmates de deux mois de sevrage de toute relation sociale sont encore là : sujet de toutes les autodérisions. Avec parfois la tentation de la nostalgie en mode syndrome de Stockholm. On l'a détesté notre geôlier immatériel ou plutôt viral, mais la crainte de ne plus savoir comment faire... nous pousserait presque à regretter le temps balisé des attestations de sortie.
Au passage, fatalement, on règle deux trois comptes : la génération spontanée de joggeurs des heures sombres du confinement en prend pour son grade.
Pas Sibeth, la politique !
Voilà pour l'écume du LOL. Sauf que la crainte de la seconde vague d'un Covid-19 nous jouant le mauvais tour d'une troisième mi-temps macabre est le vrai fil rouge de la dérision générale.
Permis de tuer à condition qu'on en meure de rire afin de se délivrer de l'angoisse suscitée par l’après. Cet après qu'on s'est tous "pantaillé" si plus solidaire, plus écolo, plus bienveillant, mais dont les contours tardent tant à se dessiner. Hors les post partisans - voire de pré-campagne électorale anticipée - ça casse pas mal la classe politique. En tête de gondole, la porte-parole de gouvernement d'Edouard Philippe collectionne les coups de griffes. Au palmarès du Lol, Sibeth Ndiaye est cependant sans concurrence. Humour en mode poil à gratter par exemple sur l'école impossible, sur le tempo du déconfinement, sur nos travers de village Gaulois, nos crises de manque totalement assumées – la convivialité de la « bistrot culture » en tête – que l'on tempère avec nos angoisses à demi avouées dont la plus belle illustration est cette carte de France du confinement entre soi dans le déconfinement estival présumé général : « Ici, on est complet!».
Je t'aime moi non plus, le déconfinement ! Telle est sans doute la morale des salves de Lol qui continuent de s'abattre sur la toile.