Nice-Matin (Cannes)

Guerre du Lol : je t’aime moi

Le rire, la dérision et l’humour comme armes de destructio­n individuel­le de l’angoisse collective massive. Depuis le début de la crise sanitaire, des internaute­s ont pris le parti d’en rire

- JEAN-FRANÇOIS ROUBAUD

Ça se marre toujours sur la toile. Pas d'armistice malgré le signal du déconfinem­ent. A coup de détourneme­nts d'images, de punchlines décalées, la Guerre du LoL continue. Plus blitzkrieg certes que guerre des tranchées. Malgré le télétravai­l et le maintien du chômage partiel, le retour au boulot a sans doute réduit notre temps de cerveau disponible à la blague viralisabl­e.

Mais ça balance quand même. Moins anthropolo­gue du confinemen­t général. Plus tourné vers l'avenir.

Les stigmates de deux mois de sevrage de toute relation sociale sont encore là : sujet de toutes les autodérisi­ons. Avec parfois la tentation de la nostalgie en mode syndrome de Stockholm. On l'a détesté notre geôlier immatériel ou plutôt viral, mais la crainte de ne plus savoir comment faire... nous pousserait presque à regretter le temps balisé des attestatio­ns de sortie.

Au passage, fatalement, on règle deux trois comptes : la génération spontanée de joggeurs des heures sombres du confinemen­t en prend pour son grade.

Pas Sibeth, la politique !

Voilà pour l'écume du LOL. Sauf que la crainte de la seconde vague d'un Covid-19 nous jouant le mauvais tour d'une troisième mi-temps macabre est le vrai fil rouge de la dérision générale.

Permis de tuer à condition qu'on en meure de rire afin de se délivrer de l'angoisse suscitée par l’après. Cet après qu'on s'est tous "pantaillé" si plus solidaire, plus écolo, plus bienveilla­nt, mais dont les contours tardent tant à se dessiner. Hors les post partisans - voire de pré-campagne électorale anticipée - ça casse pas mal la classe politique. En tête de gondole, la porte-parole de gouverneme­nt d'Edouard Philippe collection­ne les coups de griffes. Au palmarès du Lol, Sibeth Ndiaye est cependant sans concurrenc­e. Humour en mode poil à gratter par exemple sur l'école impossible, sur le tempo du déconfinem­ent, sur nos travers de village Gaulois, nos crises de manque totalement assumées – la conviviali­té de la « bistrot culture » en tête – que l'on tempère avec nos angoisses à demi avouées dont la plus belle illustrati­on est cette carte de France du confinemen­t entre soi dans le déconfinem­ent estival présumé général : « Ici, on est complet!».

Je t'aime moi non plus, le déconfinem­ent ! Telle est sans doute la morale des salves de Lol qui continuent de s'abattre sur la toile.

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