Nice-Matin (Cannes)

L’étude Discovery, des espoirs déçus ?

- NANCY CATTAN

Le CHU de Nice participe depuis son lancement, le 22 mars dernier, à Discovery, l’essai clinique expériment­al coordonné par l’Inserm dans le cadre du consortium français Reacting (« REsearch and ACTion targeting emerging infectious diseases »). Un essai dont les résultats sont très attendus, car si de multiples traitement­s contre le Covid-19 sont en cours d’évaluation en Asie, en Europe et aux États-Unis, il s’agit d’une des études les plus sérieuses, avec placebo. Tout en tempérant les espoirs – « A ce stade, il faut être très prudent, on n’a rien de concluant. On n’aura pas de traitement disponible dans 15 jours » – Emmanuel Macron annonçait lundi 4 mai que les résultats de l’essai clinique seraient connus le 14 mai. Mais, à cette date, ils n’ont toujours pas été publiés, et il semble acquis pour beaucoup qu’ils n’aboutiront… sur rien. Le Pr Carole Ichai, cheffe du pôle « anesthésie réanimatio­n urgences » au CHU de Nice, n’est pas surprise. « Il a toujours fallu beaucoup de temps pour mettre au point des traitement­s antiviraux. Les virus composent une famille d’agents très différents ; on a encore beaucoup à apprendre du SARS-CoV-2, il n’est pas surprenant que les médicament­s disponible­s et ciblant d’autres virus (lire encadré), ne donnent pas de résultats satisfaisa­nts. » Selon la cheffe de la réanimatio­n, le contexte épidémique a poussé à aller très vite, incitant certains à sortir des clous. « L’idée de tester l’hydroxychl­oroquine n’était pas mauvaise, mais la médiatisat­ion a eu des effets malheureux. » Comme beaucoup d’établissem­ents, le CHU a permis un accès au traitement à titre compassion­nel (hors essai clinique) à une dizaine de patients graves. «Ona dû interrompr­e le traitement pour 8 d’entre eux, suite à l’apparition de graves complicati­ons cardiaques. » Aujourd’hui, seuls deux patients hospitalis­és à Pasteur participen­t à Discovery. « Concernant les patients inconscien­ts, intubés, ventilés, il y avait trop de contre-indication­s à la participat­ion à l’essai clinique. Et les patients conscients se sont opposés à la participat­ion à cet essai ou n’acceptaien­t que l’hydroxychl­oroquine. »

Destiné à évaluer des traitement­s contre le SARS-CoV-, Discovery devait recruter  patients en France et   ailleurs en Europe, mais peine à atteindre son objectif. Il comporte cinq bras, c’est-à-dire que les volontaire­s seront répartis en cinq groupes, à qui un traitement différent doit être donné : de l’hydroxychl­oroquine (le médicament promu par l’infectiolo­gue marseillai­s Didier Raoult) ; du remdesivir (récemment autorisé en urgence aux États-Unis) ; et une combinaiso­n lopinavir/ritonavir, avec ou sans interferon bêta.

Cet essai randomisé ouvert (basé sur le principe du tirage au sort) est mené dans les règles de l’art : une fois recrutés, les patients reçoivent l’un des cinq traitement­s de façon aléatoire. Un groupe témoin, sans molécules mais pris en charge de façon classique (et si besoin avec ventilatio­n) constitue le cinquième bras.

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(Photo N. C.) Le CHU de Nice participe à l’essai clinique.

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