Nice-Matin (Cannes)

À Roquestero­n, c’est « l’âme du village »

- A. L. alouchez@nicematin.fr

Voilà une espèce qui n’a pas attendu le coronaviru­s pour être en voie de disparitio­n. Les troquets de campagne, véritables poumons des petites communes, sont pour la plupart en souffrance. Mais à Roquestero­n, ça continue de prospérer. Vendredi, même par une matinée maussade, ça grouillait de monde, au Cabanon. Bien plus qu’un bar, un coeur de vie. On vient se restaurer, acheter le journal, gratter des jeux, faire le plein de clopes, mais aussi et surtout discuter. Facteur, pompiers, médecin, maire, habitués, retraités, randonneur­s, chasseurs, cyclistes… C’est tout un pan de la société qui défile tous les jours. « C’est l’âme du village », tranche une tablée d’anciennes. Dont fait partie Claude : « Je vis toute seule, mais je monte le matin et là, vous voyez, on est quatre ! » Pas de rendez-vous pris à l’avance. Chacune sait que c’est ici qu’on trouve les autres, jour après jour. Pour papoter, mais aussi prendre des nouvelles des absents.

« C’était très dur »

Indispensa­ble, donc. À tel point que pendant le confinemen­t, ils sont nombreux à avoir fait de la résistance. Le bistrot était ouvert, mais interdicti­on de rester sur place. « C’était très dur, raconte Bernard Abbadi, agriculteu­r et client quotidien. Le village était désert. On prenait un café à emporter, mais ce n’est pas la même chose. On s’installait sur un muret, un peu plus bas, mais la mairesse veillait. Quand elle arrivait, ça faisait comme une volée de moineaux. » Pendant le confinemen­t, les propriétai­res ont changé. Chez Pat’ est devenu Le Cabanon. Mais l’établissem­ent est resté ouvert sans interrupti­on, comme le répète avec fierté la patronne, Stéphanie Lanteri. Le déconfinem­ent et le mauvais temps l’empêchent de tourner à plein régime : «On a déjà passé les 30 couverts par jour, mais on a une capacité maximale de 40 ou 50. » Mais ça pourrait être pire. D’autant qu’elle a bien conscience que son établissem­ent compte : « Ici, c’est un lieu de rencontre, des gens viennent parce qu’ils ont besoin de discuter. Vous voyez bien, quand les commerces sont fermés, il n’y a plus de vie. » Elle compare avec Pierrefeu, le village voisin où elle habite avec sa famille depuis huit ans. « Il n’y a pas un seul commerce, et donc pas de communauté. Ici, c’est une grande famille. En un mois, on a créé plus de liens qu’en huit ans à Pierrefeu ». En terrasse, Seb’ abonde : « Si on ferme ici, c’est cuit pour la vallée. »

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Le bar-restaurant du village est peuplé d’habitués, tous les matins. (Photo A. L.)

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