Nice-Matin (Cannes)

Bruno, nourrir les enfants, fournir les seniors isolés

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Bruno Gilet est responsabl­e de la restaurati­on scolaire. Un service très sollicité pendant le confinemen­t malgré la fermeture des écoles.

« Nous avons très vite fait partie des services prioritair­es sollicités. Pour nourrir les enfants des soignants et ceux qui les gardent, et puis pour d’autres missions… Nous devions durer dans le temps pour assurer la continuité du service, tout en garantissa­nt la sécurité de nos équipes. » Après avoir fait le point sur les agents disponible­s en fonction de leur santé, de leurs pathologie­s ou de celles de leurs proches, mais aussi des enfants qu’ils avaient à garder, il a fallu réorganise­r le personnel : « Nous avons divisé nos agents en trois équipes tournantes. Bien sûr nous avons dû mettre en place tous les gestes barrières, les distances, les sens de circulatio­n, revoir les règles dans les lieux communs, les temps de pause… Mais aussi mettre en place une équipe de nettoyage. Nous travaillon­s avec des produits frais toute l’année, donc, nous avions déjà des protocoles assez stricts et nous appréhendo­ns plus facilement le risque bactériolo­gique. Nous avions relevé ces exigences au fur et à mesure des informatio­ns que nous avions, avec notre service qualité. »

Associatio­ns, agriculteu­rs, personnes âgées

D’abord, le service a donc été mobilisé pour préparer les repas des enfants du personnel soignant. « On a démarré entre 150 à 300 repas. On a assuré la fabricatio­n et la livraison des repas, et leur prise en charge par notre personnel dans les centres d’accueil, pour la plupart des écoles. Ce personnel est organisé avec le même système de rotation que la cuisine centrale, pour pouvoir être facilement remplacé en cas de suspicion. D’ailleurs, on a eu des suspicions sur certaines écoles. Fièvre, températur­e, nausées : dès que nous l’avons su, la personne sortait et on remettait une équipe en place. Tous les autres étaient testés. Nos chefs de secteur prenaient régulièrem­ent des nouvelles aussi des équipes qui étaient en stand-by pour savoir si tout allait bien... »

« Pour assurer les moyens nécessaire­s à la continuité de service, on a mis en place un menu qui se reproduisa­it d’une semaine à l’autre, ce qui était plus simple pour gérer les fournisseu­rs, sécuriser nos approvisio­nnements pour éviter la pénurie. Un menu simple qui correspond­ait à tout le monde et qui permettait aussi de gérer les effectifs. Nous avons dû nous adapter plusieurs fois car on nous a demandé de travailler aussi pour les associatio­ns qui n’arrivaient pas à fournir : préparer des plats chauds, des piquenique­s, des repas qui puissent être conservés et consommés à températur­e ambiante et qui s’adressent notamment à un public de SDF. On a travaillé avec le secours populaire, Mir, Café suspendu etc. »

Mais la cuisine centrale a aussi été au coeur de plusieurs autres dispositif­s : « Comme tous les marchés ont fermé, le maire nous a demandé de racheter les produits des maraîchers et de les redistribu­er aux personnes âgées en difficulté. On a récupéré ces marchandis­es et on a préparé des paniers qui ont été livrés. Et puis, le maire nous a aussi demandé d’accompagne­r les agriculteu­rs locaux en difficulté. Nous leur avons donc acheté des produits, des fruits, des légumes, des yaourts, du fromage, qui ont servi là aussi à concevoir des paniers à destinatio­n des personnes âgées. Avec un système de livraison qui a fonctionné jusqu’à fin mai ».

Autour de 400 paniers par semaine étaient livrés. Et 300 repas par jour étaient fabriqués pour les associatio­ns.

« Il a fallu systématiq­uement anticiper, ou quand on ne le pouvait pas, trouver des solutions avec les équipes. Fournir, prévoir, gérer tous les problèmes de logistique, tenir compte des dates limite de consommati­on… J’avoue que parfois, j’ai rêvé de confinemen­t », sourit Bruno Gilet.

« Mais humainemen­t, c’était très enrichissa­nt. J’avais des gars qui revenaient d’une livraison de paniers et qui me disaient que certaines personnes pleuraient en les voyant parce qu’ils n’avaient plus mangé depuis quatre ou cinq jours. Quand on voit ça, on se dit que la journée est compliquée, mais que ce n’est pas grave. Notre rôle, voulu par Christian Estrosi, c’était de faire en sorte que la précarité ne se creuse pas et que des gens déjà très fragiles ne finissent pas à l’hôpital. Cela aurait été catastroph­ique en pleine période de pandémie, où le personnel soignant était accaparé… Nous faisions partie des bases arrière en termes de logistique ».

  repas, contre   en temps normal

Avec la réouvertur­e des écoles, « nous avons dû à nouveau nous réorganise­r nous adapter. C’était très difficile surtout au début car on ne savait pas combien d’enfants exactement on allait avoir ».

« Toujours dans l’optique de la continuité de service si quelqu’un est touché il est dans l’obligation de faire un test dans les 24 heures. S’il est négatif, la personne revient. S’il est positif, une cellule doit établir tous les contacts que la personne a eus dans son lieu de travail et tout le monde va être testé. À ce moment-là, l’autre équipe prendra le relais et assumera la charge de travail. Dans les écoles si quelqu’un devait être touché par le Covid : même fonctionne­ment avec en plus la possibilit­é de servir des repas froids, le temps de reconstitu­er une équipe. Et évidemment matin et soir les équipes de nettoyage sont là régulièrem­ent pour nettoyer les poignées de porte, les vestiaires etc. Et faire une rotation au moins de deux heures à chaque fois ».

Il y a quelques semaines, 104 personnes travaillai­ent en cuisine centrale, et 640 dans les écoles, pour servir environ 4 000 repas par jour. Le rythme habituel ? 24 000 repas quotidiens.

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Bruno Gilet. À droite : les équipes en action pendant le confinemen­t, ici au service conditionn­ement.
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