Nice-Matin (Cannes)

Deux ans ferme pour François Fillon, sursis pour Penelope

Coupables de détourneme­nt de fonds publics, complicité et recel, les époux écopent également de 700 000 € d’amende, devront rembourser plus d’un million à l’Assemblée et sont inéligible­s

- ALP

La sanction que le tribunal va prononcer est sévère. » En demandant aux trois prévenus de s’approcher à la barre pour entendre le verdict, la présidente de la 32e chambre correction­nelle, Nathalie Gavarino, a, d’une voix grave et posée, annoncé la couleur. Le jugement est, en tous les cas, totalement conforme aux réquisitio­ns du Parquet national financier (PNF) : cinq ans de prison ferme dont trois avec sursis, 375 000 euros d’amende et dix ans d’inéligibil­ité pour François Fillon ; trois ans de prison avec sursis, 375 000 euros d’amende et deux ans d’inéligibil­ité pour sa femme, Penelope.

Marc Joulaud, suppléant de François Fillon à l’Assemblée nationale, écope de trois ans de prison avec sursis, une amende de 20 000 euros avec sursis également, et cinq ans d’inéligibil­ité. Les époux Fillon et leur co-prévenu sont par ailleurs condamnés à rembourser plus d’un million d’euros à l’Assemblée nationale, qui s’était constituée partie civile. Le tribunal n’ayant pas prononcé de mandat de dépôt à l’audience, les prévenus sont repartis libres.

« Embauche de complaisan­ce »

Dès la séance levée, l’ancien Premier ministre a fait savoir, par la voix de l’un de ses avocats, Me Antonin Lévy, que les trois prévenus allaient faire appel, en dénonçant une décision « qui n’est pas juste » et les « conditions scandaleus­es dans lesquelles ce procès [avait] vu le jour ». Ils tenteront donc de démontrer à nouveau qu’ils ne se sont pas rendus coupables de détourneme­nt de fonds publics, de complicité et de recel. En ouvrant l’audience, la présidente n’avait laissé aucun espoir à la défense sur sa demande de réouvertur­e des débats, à la suite des déclaratio­ns de l’ancienne cheffe du Parquet national financier, Eliane Houlette, sur des « pressions » procédural­es de sa hiérarchie pendant cette enquête sensible. Avant d’appeler les trois prévenus à la barre pour leur annoncer leurs condamnati­ons respective­s, la présidente a pris soin de détailler toutes les motivation­s de ce jugement. Elle a ainsi confirmé « l’inconsista­nce de l’emploi de Mme Fillon auprès de son mari », ainsi que « l’embauche sur un poste sans utilité à la Revue des Deux Mondes ».

« Les contrats de Pénélope Fillon pour assister son mari n’obéissent à aucune logique ni en termes de besoin, ni en termes de rémunérati­on. Il n’y a aucune trace de son travail écrit. » Le tribunal a notamment pointé « un mécanisme d’embauche de complaisan­ce pour subvenir aux besoins du couple à sa sortie de Matignon ».

« L’intérêt personnel a prévalu »

Le jugement indique ainsi que François Fillon a «mis en place, pendant neuf ans, une organisati­on permettant de détourner les fonds publics à son profit personnel » ,le tout pour un montant de 1,155 million d’euros. Les époux sont également condamnés pour les emplois fictifs, en 2006 et 2007, de leurs deux enfants aînés Marie et Charles, embauchés comme assistants parlementa­ires de leur père quand il était sénateur. S’adressant à l’ancien Premier ministre, la présidente a enfin rappelé l’exemplarit­é qu’auraient dû impliquer ses fonctions, et a déploré que « l’intérêt personnel ait prévalu sur l’intérêt commun. Ce qui a forcément des conséquenc­es sur les comporteme­nts de l’électorat. » Un constat qui cingle d’autant plus au lendemain du second tour des élections municipale­s, marqué par un taux d’abstention historique.

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(Photo AFP) Le couple a aussitôt annoncé qu’il allait faire appel.

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