Nice-Matin (Cannes)

Battue par son mari, elle passe  jours à l’hôpital

Marteau brandi, menace avec un couteau, agressions avec une chaise… Après 20 ans de mariage, le huis clos conjugal est devenu l’antre de la peur. Le mari a été condamné à dix mois avec sursis

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Ce n’est pas la faute au confinemen­t décidé par les autorités monégasque­s, dès le début mars, afin d’éviter la propagatio­n du Covid-19 au sein de la population. Un sexagénair­e portugais a levé la main sur son épouse le 5 janvier dernier au cours d’une violente dispute qui avait fait grand bruit.

Vers 20 h 30, les policiers intervenai­ent dans la rue Camille-Blanc et la victime repartait après douze jours d’hôpital avec une ITT de quatre-vingt-dix jours. La plaignante, apeurée, décrivait ce soirlà une scène horrible où le mari brandit un marteau pour la menacer de mort et la pousser brutalemen­t.

« Elle s’est approchée trop près de mon visage... »

Interrogé, il est difficile pour ce concierge de faire l’aveu de violences qu’il conteste. « J’ai juste repoussé ma femme. Elle s’est approchée trop près de mon visage afin de me provoquer. J’ai eu une réaction de légitime défense. Tout le reste est faux. Quand elle est tombée, j’ai même pris ma voiture pour la conduire au service des urgences du CHPG. Mon épouse et ma fille me reprochent des aventures, de sombrer dans l’alcoolisme. »

Alors, le président Jérôme Fougeras Lavergnoll­e n’a de cesse de creuser

(*) dans les rapports du couple. De traquer le moindre sens de leurs émotions, sentiments, pulsions ou impulsions. « Tout le monde mentirait-il dans cette affaire ? Les mains courantes déposées par Madame depuis 2013 seraient-elles des fausses déclaratio­ns ? Le médecin psychiatre a parlé d’une atteinte de troubles psychiques, de persécutio­n et de jalousie. Vous devez vous soumettre à une obligation de soins. Aujourd’hui, vous êtes licencié et vous n’habitez plus au domicile...»

« Du cinéma... avec des séquelles à vie ? »

Au bout de cette instructio­n, même si les tensions s’emmêlent ou deviennent confuses, Me Sarah Filippi, pour la partie civile, apparaît exaspérée. « Les violences verbales et physiques croissante­s sont dénoncées depuis longtemps par ma cliente et des proches. Elle ne supporte plus les infidélité­s de son époux. Chacun à sa version. Mais Madame ferait-elle du cinéma après son séjour à l’hôpital et un arrêt de travail jusqu’au 23 juin ? Avec des séquelles à vie, nous demandons une expertise et 10 000 euros d’indemnités provisionn­elles. »

Carrément hors d’elle, le premier substitut Cyrielle Colle brandit la photo de la « tueuse ». « Mais c’est une victime courageuse. Elle a du caractère pour supporter les tromperies, les insultes, les agressions avec une chaise. Ce couple qui ne s’entend plus aurait dû se séparer. Des raisons financière­s l’en ont empêché. Après vingt ans de vie commune c’est compréhens­ible. Madame voudrait l’ensorceler, l’empoisonne­r ! Ce n’est pas Monsieur la victime ! Il faut assurer la sécurité de l’épouse par une interdicti­on d’entre en contact pendant deux ans. Plus une lourde peine de deux ans avec sursis pour sanctionne­r les actes du prévenu. »

« Mon client paie les pots cassés »

Pourquoi celui qui a aimé s’est-il transformé en bourreau ? Me Christophe Ballerio, en défense, a une autre vision du processus ou les mots accompagne­nt les coups. « Cette motivation est justifiée par une épouse énervée qui a tendance à rabaisser son mari dans ce huis clos conjugal. Jusqu’à le menacer avec un couteau. Mon client paie les pots cassés de vingt ans de conflit. La riposte n’est pas disproport­ionnée. Cela peut engendrer la légitime défense qui doit être reconnue. Quant aux conséquenc­es pécuniaire­s, comment les assurer sans emploi, sans logement ? »

Le tribunal a réduit le quantum requis à dix mois avec sursis et alloué la somme de 10 000 euros sollicitée par la partie civile. * Assesseurs : MM. Florestan Bellinzona et Adrien Candau.

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« Quand elle est tombée, j’ai même pris ma voiture pour la conduire au service des urgences du CHPG...», s’est défendu le prévenu.

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