Nice-Matin (Cannes)

Chernobyl

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et l’appareil étatique ne voudront jamais répondre, laissant ses propres hommes aller se sacrifier sur l’autel de la raison d’État. L’URSS ne pouvait pas admettre publiqueme­nt son erreur. Officielle­ment, il n’y a pas eu de faille et il n’est pas concevable de révéler au monde cette incapacité à gérer un problème si grand.

Toute une génération sacrifiée

Alors le gouverneme­nt soviétique va s’enfoncer dans le mensonge et sacrifier toute une génération. Des pompiers, des civils, des militaires, des scientifiq­ues. Il y a dans cette forme de déni étatique un terrible écho à la gestion chinoise de la pandémie du Covid-19. Tout est sous contrôle, ne vous inquiétez pas en quelque sorte. Mais derrière le discours officiel, il y a cette centrale et ce noyau atomique qui se consument à ciel ouvert, libérant dans l’air des particules radioactiv­es. En 1986, la censure existe et les réseaux sociaux ne sont pas de ce monde, il est donc plus « facile » de garder un secret, même le plus effroyable.

Dans ce labyrinthe de non-dits, il y a pourtant des hommes qui tentent

Une brutalité fidèle aux faits pour l’Ouest, un mensonge bien habillé pour l’Est

de s’élever, des personnage­s ayant vraiment existé comme Valeri Legassov (Jared Harris) et Boris Shcherbina (Stellan Skarsgard) ou encore le personnage fictif campé par Emily Watson.

La frontière entre la loyauté aveugle et le déni est mince dans l’URSS de 1986. Alors certains ont obéi tout en remettant en cause le discours officiel mais, à cette époque, Moscou voulait des coupables. Il y aura d’ailleurs un procès, que la série aborde de manière romancée. La série se sert de cette tribune pour mettre en cause la conception des réacteurs soviétique­s et expliquer que la faille initiale est le résultat terrible d’une volonté permanente de réduire les coûts. Pointer du doigt un problème de conception revient à pointer le régime. Et ça, c’est dangereux. Mais dans les faits, le procès avait surtout pour but de trouver des coupables. Des boucs émissaires. C’est ainsi que les trois responsabl­es de la centrale ont payé pour les autres. Car si défaillanc­e il y a eu, elle ne pouvait être qu’humaine. Bienvenue en URSS, camarade.

MATHIEU FAURE mfaure@nicematin.fr Chernobyl. Disponible sur OCS. Cinq épisodes.

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(DR) Des images qui rappellent celles entrevues à Wuhan, en Chine, début . Pourtant nous sommes à Tchernobyl en .
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