Les gendarmes traquent en mer les dangers de l’été
Excès de vitesse, comportements dangereux, non-respect des zones protégées... Immersion hier avec la brigade nautique d’Antibes, qui veille sur les plaisanciers et alerte contre les risques
Pas le temps de dire ouf. Les amarres sitôt larguées, le Pélagos est déjà appelé sur une mission. Antibes, port Vauban, 14 h 30 hier. La saison des plaisirs nautiques est bien lancée. Le semi-rigide de la brigade nautique de gendarmerie aussi, fort des 500 chevaux qui peuvent le propulser à 45 noeuds (85 km/h). Cap sur l’anse de l’Argent Faux, baie des Milliardaires. « Le sémaphore de la Garoupe nous signale un bateau de plus de 20 mètres au mouillage. C’est interdit, afin de préserver la faune et la flore – notamment la posidonie », expliquent le maréchal des logis-chef Jérémy et le gendarme Nicolas. Lancés à pleine vitesse sur la grande bleue, ces deux coéquipiers ne vont pas chômer. Cap d’Antibes. Les gendarmes croisent un petit catamaran à la dérive... Sans pilote. Cinq jeunes tentent de le rattraper à la nage. Il faut l’intervention de leur moniteur en semi-rigide. Jérémy le sermonne : « Il faudra les sensibiliser pour qu’ils ne sautent pas à l’eau comme ça. On peut avoir des accidents » Le mono assure qu’il maîtrisait la situation. Sa réponse irrite les gendarmes. « Vous leur donnez des cours de voile ou de natation ? » Le mono finit par présenter ses excuses. Arrivée dans l’anse. Eau émeraude. Plusieurs mètres audessus de la mer, des jeunes s’aventurent sur les rochers. D’un coup de sirène, le Pélagos les dissuade de sauter. Bon : à présent, voyons donc ce yacht trop imposant. Son skipper se prête au contrôle, avec sourire confiant : «Ils veillent au bien de tous, aux baies, aux bateaux. C’est vrai, parfois, on fait des erreurs de mouillage... » C’est le cas ici.
Objectif : sécurité
« Vous pouvez monter à bord ? Ça prendra cinq, dix minutes », lancent les gendarmes. Vérifications faites, le bateau mesure 25 mètres, au lieu des 20 autorisées. Le skipper assure qu’il l’ignorait. Son sourire s’est estompé. Il risque une sanction administrative, type interdiction de naviguer en France. Et une sanction pénale devant le tribunal maritime. Voilà les posidonies protégées. Mais l’été, c’est la sécurité des bipèdes qui focalise la brigade nautique. Le weekend dernier, ils sont intervenus pour deux graves accidents d’hélice à Villefranchesur-mer, puis Antibes. Alors, avec le lieutenant-colonel Emmnanuel Boissière, adjoint au commandant de groupement, Jérémy et Nicolas mettent en garde. «Les accidents qu’on constate depuis le déconfinement, ce sont essentiellement sur des locations de bateau. Des gens qui veulent se lâcher, qui louent un bateau à dix et qui n’y connaissent rien en navigation. Le problème, c’est que la mer est un milieu très particulier... Ce n’est pas un jouet ! »
Sourire malgré tout
Cap sur l’île Sainte-Marguerite. Ou plutôt, le chenal qui la sépare de la pointe du Palm Beach. La vitesse y est limitée à 10 noeuds. Quelques instants suffisent à surprendre des bateaux navigant bien plus vite. Comme ce semi-rigide avec neuf
Néerlandais à bord.
« Savez-vous à quelle vitesse vous naviguiez ? » Eric Baker, 55 ans, hésite : « Je dirais 25 noeuds. » Le quinqua est honnête. Et souriant. Le voilà pourtant convoqué par la commission des affaires maritimes à Nice. Pas de quoi doucher son entrain. «On passe deux semaines en France. On dépense de l’argent, on soutient votre économie ! En cas de contravention, on a une réduction ? » La contravention, c’est aussi la crainte de Richard, 71 ans, venu de Grenoble en famille. Parti des Issambres, il voguait trop vite, lui aussi. Les gendarmes en conviennent : Richard n’est « pas un fou de la navigation ».
Secours quand il faut
Ils se montrent moins tendres avec un jeune Niçois passé près de kayaks à 30 noeuds. Contrôle. Convocation. Sanctions en vue. «Ce comportement n’est pas acceptable. Il ne se rend pas compte de ce qu’il fait », grince Nicolas. François et Catherine Duriez, eux, savent ce qu’ils doivent aux gendarmes. Leur bateau est tombé en panne près des rochers de Saint-Honorat. Voie d’eau à bord. L’occasion pour Jérémy et Nicolas de montrer que la gendarmerie ne fait pas que la répression. Ils remorquent le bateau jusqu’au port de Golfe-Juan. François applaudit : « Il était urgent qu’on intervienne. On est contents de vous avoir ! »